Point de presse de M. Jean D’Amour, député de Rivière-du-Loup
Le mardi 10 novembre 2009
(Treize heures quarante et une minutes)
M. D’Amour: Alors, merci, mesdames, messieurs. En début de semaine dernière, sur les ondes de CIEL-FM et dans une nouvelle reprise dans le journal… dans le journal, pardon, Le Soleil le lendemain, le maire de Rivière-du-Loup, Michel Morin, racontait avoir fait l’objet, en 2007, d’une tentative de financement de la part d’un entrepreneur. Cette histoire me concerne dans une certaine mesure. En avril 2007, quelques semaines seulement après avoir été défait dans une élection provinciale générale, je rentrais chez mois en après-midi au terme d’une journée de travail sur la ferme. Et mon épouse m’informait qu’une personne s’était rendue à mon domicile pour y déposer une enveloppe en mon absence. C’était pendant la tenue de l’élection à la mairie de Rivière-du-Loup, pour combler le poste que j’avais quitté.
À ma grande surprise, cette enveloppe non cachetée contenait cinq billets de 100 $ et portait la mention: À remettre à Michel Morin pour sa campagne électorale. J’étais extrêmement surpris, pensant qu’il pouvait s’agir de financement illégal. J’ai contacté M. Morin pour l’en aviser. Sans hésiter, il m’a dit ne pas comprendre pourquoi on lui offrait son enveloppe et m’a dit, à ma grande satisfaction, qu’il refusait toute contribution. Je n’ai jamais douté de lui, je le connais personnellement comme une personne honnête et intègre. J’ai d’ailleurs demandé à M. Morin de parler directement à l’entrepreneur pour dissiper toute ambiguïté, ce qu’il a fait sans délai. J’ai aussi contacté l’entrepreneur et je lui ai demandé de venir chercher son argent, ce qu’il a fait le lendemain ou le surlendemain. Je n’ai jamais été un intermédiaire et je ne le serai jamais. Je pensais et je pense toujours que l’entrepreneur, que je connais depuis quelques années maintenant, a posé un geste maladroit, ne connaissant pas la Loi électorale, selon ce qu’il m’a confié lui-même lorsqu’il est venu chercher son enveloppe.
Vendredi dernier, à mon bureau de comté, l’entrepreneur a réitéré qu’il avait posé ce geste, ne connaissant pas la Loi électorale. Je l’ai reçu environ 1 min 30 s. à deux minutes, lui disant qu’on ne pouvait se parler, son dossier étant sous enquête. J’en parle aujourd’hui parce que M. Morin a rendu la chose publique. Dans ces circonstances, j’ai moi-même logé un appel à opération Marteau vendredi dernier, vers 13 h 30, et, hier, j’ai contacté le Directeur général des élections. De plus, je lui ai adressé une lettre ce matin.
Nous devons, en politique plus que tout, plus que dans tout autre domaine, donner l’exemple, et j’espère maintenant que toute la lumière soit faite rapidement sur cette question. Néanmoins, je conviens être dans une position inconfortable et, pour cette raison, j’ai pris la décision de me retirer temporairement du caucus libéral. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que, ces vérifications faites, je pourrai revenir au sein du caucus libéral au cours des prochaines semaines, sinon au cours des prochains jours. Mon intégrité n’a pas de prix, et c’est ce que les vérifications démontreront. Voilà.
M. Duchesne (Pierre): À quelle date la lettre, l’enveloppe a été déposée? Chez vous, d’après ce que je comprends?
M. D’Amour: Oui. Ça s’est fait en avril. La date précise, je ne l’ai pas. Entre le 26 mars, finalement, et le 4 mai, la date des élections à la ville de Rivière-du-Loup. Vers, probablement, la troisième semaine d’avril.
M. Boivin (Simon): M. Morin semblait parler d’octroi d’enveloppe d’argent cash, à Rivière-du-Loup, comme d’une pratique courante. Pourquoi l’entrepreneur a jugé bon de passer par vous pour remettre son enveloppe à M. Morin?
M. D’Amour: Moi, ce qu’il m’a expliqué, c’est qu’il a entendu une entrevue de moi à la radio un matin où je disais appuyer Michel Morin – c’était le cas – et ce qu’il m’a confié pour expliquer la situation, c’est qu’il était dans un commerce tout près de chez moi, qui s’appelle Équipements Yves Landry, et, comme il était près de chez moi, il a laissé cette enveloppe-là chez nous. L’explication est aussi simple que ça.
Journaliste: Avez-vous déjà reçu des enveloppes comme ça lorsque vous étiez … Rivière-du-Loup?
M. D’Amour: Jamais, monsieur. Jamais.
M. Deschênes (Alexis): Est-ce qu’on vous en a déjà offert?
M. D’Amour: Jamais non plus.
M. Duchesne (Pierre): Sept mois pour appeler le Directeur général des élections. Ça fait sept mois que c’est passé, ça?
M. D’Amour: Ça fait deux ans et huit mois ou à peu près. Pourquoi? c’est simple. C’est que j’ai reçu le monsieur, l’entrepreneur en question, je lui ai remis son enveloppe, je lui ai remis son argent, et, en discutant avec lui, ce qu’il m’a dit, et je n’ai aucune raison d’en douter, ce qu’il m’a dit, c’est qu’il ne connaît pas la Loi électorale. Alors, comme il ne connaissait pas la Loi électorale, que c’est un geste que je considérais comme étant maladroit et qu’il a repris son argent, je n’ai pas cru bon à ce moment-là en parler. Je me suis dit : je ne veux pas nuire à personne, c’est réglé, l’argent est retourné à son expéditeur, et ça s’est terminé comme ça. Et c’est M. Morin…
M. Salvet (Jean-Marc): Pourquoi vous en parlez aujourd’hui? Qu’est-ce qu’il y a de changé?
M. D’Amour: Parce que M. Morin en a parlé. Comme il a senti le besoin d’en parler, c’est très correct, je respecte ça, mais je sens aussi le besoin de justifier cette affaire-là.
M. Deschênes (Alexis): De quel entrepreneur s’agit-il?
M. D’Amour: Écoutez, on est sous enquête, hein, j’ai adressé, je l’ai dit tantôt, une lettre à la direction générale des élections, alors je pense qu’il faut protéger ça pour le moment. Puis, si j’interviens puis je reviens sur la question qui m’a été posée, si je reviens aujourd’hui puis si je pose ce geste-là aujourd’hui, ce n’est évidemment pas de gaîté de coeur. Cependant, mon intégrité n’a pas de prix, je l’ai mentionné. Je le fais pour ma famille, je le fais pour mes collègues et puis je le fais aussi parce qu’en fin de semaine, j’étais dans des activités de comté comme député, Noël chez nous, à Rivière-du-Loup à la commémoration du Jour du souvenir, et, à six occasions, il y a des gens qui sont venus me voir puis qui ont dit: C’est qui, l’entrepreneur? Et j’ai entendu des noms qui n’avaient rien à voir.
Donc, pour l’ensemble de ces gens-là, aujourd’hui, moi, je sens le besoin de poser ce geste-là. J’espère que les choses vont aller rapidement, vont aller rondement pour qu’on puisse clarifier, que je puisse le plus rapidement possible réintégrer le caucus chez nous, chez les libéraux.
M. Duchesne (Pierre): Votre propre parti disait: Si vous avez des choses à déclarer faites-le. Il le disait à l’ADQ, il le disait au PQ. Vous, vous ne disiez rien. Pendant ce temps-là vous attendiez une dénonciation, M. D’Amour?
M. D’Amour: C’est exactement ce que je fais. Je me suis adressé à opération Marteau vendredi dernier et à la direction générale des élections.
M. Boivin (Simon): Mais pourquoi est-ce que, dans le cas du Commissaire au lobbyisme – vous êtes sous enquête – vous ne vous êtes pas retiré du caucus libéral, mais, cette fois-ci, vous vous sentez obligé de vous retirer du caucus libéral.
M. D’Amour: Bien, écoutez, je ne l’ai pas fait dans le cadre du Commissaire au lobbyisme, parce que ça regarde mes anciennes fonctions. Ça ne me touche pas comme député, ce n’est pas quelque chose qui est politique. Alors là, il y a une portée politique aujourd’hui, puis je veux que les choses s’éclaircissent le plus rapidement possible. Et je vais vous dire que, quitter un caucus, il faut un certain courage, puis, en mon âme et conscience, aujourd’hui, c’est le geste que je me dois de poser. L’intégrité n’a pas de prix, puis, en politique, on doit donner l’exemple. Et, de toute évidence, cette situation-là a heurté M. Morin. Moi, je respecte la déclaration qu’il a faite, et mon rôle à moi, c’est de faire en sorte que la lumière soit faite.
Donc, il y a des éléments, il y a un processus, il y a des mesures qui ont été mises en place, d’abord opération Marteau, et d’autre part la direction générale des élections. Hier, j’ai parlé au secrétaire général de la direction générale des élections; ce que je souhaite, c’est qu’on agisse le plus rapidement possible. Moi, je me rends disponible pour les questions qu’on pourrait me poser au moment qu’ils jugeront opportun.
M. Robillard (Alexandre): Avez-vous été interrogé par le Commissaire au lobbyisme?
M. D’Amour: Non.
Mme Brassard (Marie-Andrée): Est-ce que M. Charest vous a demandé de vous retirer du caucus?
M. D’Amour: Je n’ai pas parlé à M. Charest de ça de vive voix ou en personne ou…
Mme Brassard (Marie-Andrée): …l’entourage qui vous a demandé de vous retirer?
M. Chartrand (Yves): Vous n’allez pas nous faire accroire que vous n’avez pas mis M. Charest en…
M. D’Amour: Je n’ai pas eu l’occasion… Je suis très sincère, la main sur le coeur, je vous dis que je n’ai pas eu l’occasion de parler à M. Charest de cette question-là. J’ai rencontré par ailleurs, dimanche en soirée, Marc Croteau, son directeur de cabinet, que j’ai revu hier et que j’ai revu aujourd’hui. Et l’idée de me retirer du caucus, bien sincèrement, c’est moi qui ai eu cette idée-là, et je l’ai soumise par respect pour mes collègues, par considération pour ma famille, par considération pour les entrepreneurs qui actuellement, à Rivière-du-Loup, sont nommés, sont pointés du doigt, alors qu’ils n’ont rien à voir avec ça.
M. Dutrisac (Robert): S’il n’y avait pas eu dénonciation du maire Morin, cette chose-là n’aurait pas été enquêtée comme telle? Vous n’auriez pas fait la démarche que vous nous annoncez aujourd’hui?
M. D’Amour: Je vous dirai, et je terminerai là-dessus : Dans la mesure où l’argent a été remis à l’entrepreneur, moi, si j’avais été à la maison ce jour-là, je lui aurais redonné tout de suite. Dans la mesure où l’argent a été remis à l’entrepreneur et qu’il m’a avoué – et je n’ai aucune raison de douter de cette personne-là – et qu’il m’a avoué ne pas connaître la Loi électorale, il m’a dit: J’ai fait ça pour aider, j’ai entendu que tu appuyais le maire Morin, alors, en ce qui me concerne, je me suis senti cette responsabilité-là de m’impliquer. Il ne l’a pas fait dans un mauvais cadre, alors c’est la raison pour laquelle, moi, je n’ai pas bougé à ce moment-là, je ne voulais pas nuire à personne, ni à M. Morin ni à l’entrepreneur. L’incident, pour moi, était clos.
M. Lavoie (Gilbert): M. D’Amour, est-ce que cet entrepreneur, que vous connaissez depuis quelques années, est-ce qu’il a déjà contribué? Est-ce que c’était quelqu’un qui contribuait aux campagnes électorales, soit au niveau municipal ou provincial?
M. D’Amour: En 1999, quand j’ai été élu à la mairie, il n’était pas impliqué. J’ai été réélu sans adversaire par la suite; évidemment, il n’y a à peu près pas eu de financement, puis le financement qu’il y avait eu à ce moment-là a été retourné à des organismes sans but lucratif. Je sais qu’il a donné 400 $ ou 500 $ à ma dernière campagne électorale, par chèque, et c’est tout ce que je peux dire là-dessus.
M. Lavoie (Gilbert): Comment est-ce qu’il peut dire qu’il ne connaît pas la loi électorale, s’il a déjà donné par chèque…
M. D’Amour: En 2009. Après cet incident-là, en 2009. Là-dessus, je vous remercie, je fais le même exercice dans mon comté à 16 h 30 aujourd’hui.
(Fin à 13 h 49)