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Transfuges Watch (MàJ 2)
La défection des députés André Riedl et Pierre Michel Auger vers le Parti libéral a relancé plusieurs rumeurs sur d‘autres députés adéquistes qui seraient tentés de traverser la Chambre eux-aussi (Le Nouvelliste va jusqu‘à avancer que «au moins une dizaine et même une douzaine d‘autres adéquistes poursuivraient la même réflexion» que le transfuge Pierre Michel Auger). Voici donc un «wrap-up» des noms qui ont été mentionnés depuis jeudi:
- François Benjamin (Berthier): selon La Presse, son nom circule comme futur «prospect» pour le PQ, mais comme ça fait plus d‘un an qu‘il se défend de telles rumeurs, c‘est presque devenu un classique lorsqu‘il est question de transfuges adéquistes;
- Éric Charbonneau (Johnson): le chroniqueur du Soleil Gilbert Lavoie avançait ce matin qu‘en raison de la faible majorité d‘Éric Charbonneau sur le candidat péquiste en 2007, il serait tentant pour lui de joindre ses plus proches adversaires, sauf que le PQ a déjà nommé son candidat dans Johnson;
- Linda Lapointe (Groulx): son était sorti au printemps dernier, mais ça ressemblait plus à du «second guessing» qu‘à une véritable fuite dans les médias;
- Sébastien Proulx (Trois-Rivières): membre de la garde rapprochée de Mario Dumont, son nom est sorti dans Le Nouvelliste ce matin, mais on le met pour la forme vu qu‘il a démenti;
- Claude Roy (Montmagny-L‘Islet): probablement la réaction la plus bizarre des derniers jours. Selon Le Devoir, interrogé par les médias quant à savoir s‘il avait reçu une offre des libéraux, sa réponse aurait été «Malheureusement non». Du même souffle, il avance que «tout le monde [à l‘ADQ] a eu des offres».
On verra bien au cours des prochaines semaines si les vannes sont vraiment ouvertes.
Mà J (25 octobre, 20h30): les députés François Benjamin (Berthier) et Éric Laporte (L‘Assomption) ont admis ce matin à La Presse avoir été approchés par le PQ. Tous deux ont réitéré leur intention de rester à l‘ADQ. Même chose pour Claude Roy (Montmagny-L‘Islet) qui, jeudi dernier, affirmait n‘avoir «malheureusement» pas reçu d‘offre des libéraux.
MàJ (26 octobre, 20h30): un autre à ajouter dans la liste: Jean-François Therrien (Terrebonne) a refusé une offre des libéraux.
Le PQ à l’opposition officielle?
Le Journal de Montréal, inspiré d’un article paru mardi dans Le Courrier parlementaire (accès réservé aux abonnés), a publié ce matin une nouvelle en 2 temps: d’abord, le Parti québécois tenterait activement de recruter des députés de l’Action démocratique du Québec. Ensuite, si le PQ devait parvenir à recruter 3 transfuges adéquistes, la députation péquiste dépasserait celle de l’ADQ (39 à 38) et on compterait alors demander le statut d’opposition officielle.
Le premier aspect de la nouvelle est assez vague car on ne nomme pas de noms (à part celui de la députée de Groulx, Linda Lapointe (ADQ), pour rappeler son hésitation entre le PQ et l’ADQ avant l’élection de 2007, mais pas plus que ça). Probablement que des noms vont sortir au cours des prochains jours. Pariez que des journalistes font déjà le «scan» des députés adéquistes qui ont déjà milité dans les instances du PQ ou d’organisations souverainistes pour essayer de leur tirer les vers du nez, surtout ceux qui, comme le député de Berthier, François Benjamin (ADQ), ont déjà eu à démentir de telles rumeurs.
Pour un historique des transfuges des dernières années, nous vous référons à cet article que nous avions écrit à l’époque où des rumeurs envoyaient l’ex-député de Groulx (!!!), Pierre Descôteaux (LIB), au PQ. Notons que nous avons une définition plus restrictive de «transfuge» que le Journal de Montréal puisque la compilation QuébecPolitique.com n’inclut que les transferts «directs» (c’est-à -dire ceux qui passent directement d’un aprti à l’autre, comme Claude Dubois et Camil Samson; les députés qui siègent comme indépendants ne comptent pas) tandis que la compilation JdeM (format jpg) inclut les transferts «indirects» (c’est-à -dire les députés qui quittent leur parti, siègent quelques mois comme indépendants et adhèrent à un autre parti, comme Rodrigue Biron ou Richard Holden).
Quant au deuxième aspect, soit le PQ qui deviendrait l’opposition officielle, il repose sur une hypothèse qui n’a pas encore été vérifiée en droit parlementaire québécois: est-il possible d’avoir un changement de parti politique occupant les banquettes de l’opposition officielle en pleine législature (et non pas entre 2 élections comme c’est le cas normalement)?
La réponse courte est: on ne le sait pas.
La réponse longue est: il y a des arguments à la fois pour le changement et pour le statu quo.
- Pour le statu quo (l’ADQ qui reste à l’opposition officielle), il y a les dispositions du Règlement de l’Assemblée nationale sur la formation des groupes parlementaires. L’article 13 du Règlement définit un groupe parlementaire comme
Tout groupe d’au moins douze députés élus sous la bannière d’un même parti politique, ou tout groupe de députés élus sous la bannière d’un parti politique qui a obtenu au moins 20 % des voix aux plus récentes élections générales, constitue un groupe parlementaire.
La notion de députés «élus sous la bannière d’un même parti politique» est centrale dans la définition car elle empêcherait la reconnaissance en plein milieu d’une législature d’un groupe de 12 députés ayant formé un nouveau parti puisqu’ils ne seraient pas élus sous l’étiquette de ce parti. Par extension, on pourrait argumenter que si un groupe parlementaire avait le statut d’opposition officielle au début d’une législature, le fait de tomber en 3e place (en termes de nombre de députés) ne devrait pas remettre ce statut en cause.
- Pour le changement (le PQ qui devient l’opposition officielle), il y a le fait que la reconnaissance de l’opposition officielle ne découle pas du Règlement, mais plutôt des conventions constitutionnelles (celles voulant que l’opposition est le «gouvernement en attente», que l’«opposition de sa majesté» peut remplacer le «gouvernement de sa majesté» si la Chambre lui accorde sa confiance, etc.). Bien qu’il y ait plusieurs articles de loi ou de règlement qui traitent de l’opposition (il s’agit d’articles d’ordre secondaire sur la rémunération du chef, du leader ou du whip, du temps de parole du chef de l’opposition officielle à diverses occasions, etc.) aucun article n’indique nommément comment et sur quelles bases l’opposition officielle est désignée (en d’autres termes, cette expression n’a pas de statut officiel. Par extension, on pourrait donc argumenter que si le gouvernement devait perdre la confiance de la Chambre, c’est le 2e groupe le plus nombreux qui aurait le plus de chances de le remplacer et que le titre d’«opposition officielle» devrait venir avec cet état de fait.
En cas de doute, ce serait donc au président de la chambre de trancher:
Si le nombre de députés ne fait pas ressortir clairement le groupe qui forme l’opposition officielle, il appartient au Président de désigner ce groupe (Arthur Beauchesne, Règlement annoté et formulaire de la Chambre des communes, 6e éd., Toronto, Carswell, 1991, p. 57 et 58, cité dans La procédure parlementaire au Québec (format pdf)).
Probablement qu’il y a des comparables dans d’autres démocraties parlementaires de type Westminster, mais nous n’avons pas fait de recherche en ce sens. Il y a bien le cas de la Chambre des communes où, en 1997, l’opposition officielle (qui était alors le Bloc québécois) est tombée à égalité avec le 3e parti (le Reform Party), mais comme la législature a été dissoute peu de temps après, il n’y a probablement pas d’enseignements à en tirer.
Mais d’abord, il faut que la députation péquiste dépasse celle de l’ADQ, et ce n’est pas encore chose faite. Et peu importe à qui reviendrait le statut d’opposition officielle, l’effet combiné de plusieurs transfuges adéquistes ne risque pas d’avoir un impact important à l’Assemblée nationale, mais plutôt à l’extérieur du Parlement puisque ça alimenterait la perception que «le PQ a le vent dans les voiles», que «l’ADQ est en difficultés», etc.
Terminologie des gouvernements minoritaires
Comment appelle-t-on un gouvernement qui n‘a pas la majorité des sièges en chambre en régime parlementaire de type britannique? Un «gouvernement minoritaire», comme c‘est la coutume dans les autres démocraties parlementaires ou dans les réseaux de télévision («(insérez votre réseau télé favori) annonce que si la tendance du vote se maintient, le prochain gouvernement sera formé par le (insérez votre parti favori) et il sera minoritaire»), ou un «gouvernement de cohabitation», comme on l‘entend de la bouche des ministres du gouvernement Charest depuis quelques mois? Voici ce qu‘en pense Antonin-Xavier Fournier, professeur de science politique au Cégep de Saint-Jean-sur-Richelieu, dans une lettre ouverte parue ce matin dans le Devoir. Poursuivez la lecture de «Terminologie des gouvernements minoritaires»→
Liens du 2008-04-12
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Info07, 12 avril 2008
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Le Soleil, 12 avril 2008
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La Presse, 12 avril 2008
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L‘information du nord Ste-Agathe, 11 avril 2008
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L‘Express, 11 avril 2008
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LBR, 11 avril 2008
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Première édition, 11 avril 2008
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Presse canadienne, 11 avril 2008
Pendant qu‘on discute ouvertement d‘une modification du rôle et du mode de nomination du lieutenant-gouverneur, Le Soleil nous apprend ce matin que M. Pierre Duchesne succèdera incessamment à Mme Lise Thibault au poste de lieutenant-gouverneur du Québec. Toujours selon Le Soleil, le gouvernement Harper devrait faire l‘annonce officielle aujourd‘hui.
M. Duchesne a été secrétaire général de l‘Assemblée nationale (autrement dit, le plus haut fonctionnaire ou le « sous-ministre » du Parlement québécois) de 1984 à 2001. À titre de secrétaire général de l‘Assemblée nationale, il a notamment piloté la publication des ouvrages La procédure parlementaire du Québec (format pdf) et du Recueil de décisions concernant la procédure parlementaire (pour l‘Assemblée et les commissions; format pdf), publications que nous consultons et citons abondamment ces temps-ci. Bref, c‘est une personne drôlement ferrée en matière de droit parlementaire et dont il sera difficile de remettre en question l‘intégrité (il a été secrétaire général pendant 17 ans, à la fois sous les péquistes et sous les libéraux).
En ces temps de gouvernement minoritaire où le lieutenant-gouverneur pourrait être appelé à jouer un rôle davantage à l‘avant-plan, l‘éventuelle nomination d‘une personne aussi expérimentée que M. Duchesne en matière de parlementarisme est de nature à rassurer.
N‘empêche, nous aurions été bien curieux de savoir ce que M. Duchesne pense de l‘idée de faire élire le chef de l‘État québécois par le Parlement ou par le peuple.
Le vendredi 18 mai 2007
Lieutenant-gouverneur: Harper nomme Pierre Duchesne
Gilbert Lavoie
Le Soleil
C‘est l‘ancien secrétaire général de l‘Assemblée nationale, Pierre Duchesne, qui remplacera Lise Thibault au poste de lieutenant-gouverneur du Québec. Le Soleil a appris que le premier ministre Stephen Harper en fera l‘annonce aujourd‘hui même. Comme le veulent les conventions, le gouvernement fédéral en a informé le premier ministre Jean Charest.
Après la controverse soulevée autour des dépenses de Mme Thibault, le gouvernement Harper tenait à faire une nomination non partisane, sous le signe de l‘intégrité et de la connaissance des institutions parlementaires. Âgé de 67 ans, M. Duchesne a été secrétaire général de l‘Assemblée nationale du Québec de 1984 à 2001, après y avoir travaillé sous différentes fonctions depuis 1974.
Il s‘y est notamment démarqué par ses efforts pour assurer la perpétuation des traditions et des pratiques parlementaires, en présidant à la publication
du Recueil des décisions concernant la procédure parlementaire. On lui attribue également le mérite de la publication d‘un autre ouvrage important, La Procédure parlementaire du Québec.
M. Duchesne a également participé à la réforme des pratiques administratives de l‘Assemblée nationale.
Selon les informations recueillies par Le Soleil, la possibilité d‘un autre référendum au Québec a été l‘une des considérations retenues par le premier ministre Harper dans l‘étude des candidatures à ce poste. Des sources fiables veulent que des pressions aient été exercées auprès de M. Harper pour la nomination de l‘ancien ministre conservateur Benoît Bouchard. Mais le premier ministre tenait à ce que le représentant de la reine en poste dans l‘éventualité d‘un référendum soit bien au fait de ses responsabilités et prérogatives s‘il avait un jour à trancher sur un sujet litigieux.
À l‘occasion du départ à la retraite de M. Duchesne, en décembre 2001, le président de l‘Assemblée nationale, Jean-Pierre Charbonneau, a rappelé sa grande préoccupation pour la sécurité à l‘Assemblée nationale, à la suite de l‘attentat perpétré dans l‘institution par Denis Lortie en mai 1984. « M. Duchesne, depuis cet incident dramatique, n‘a cessé de rappeler à la présidence (!) que les premières victimes avaient été d‘abord et avant tout des employés de l‘Assemblée, et certains d‘entre eux en gardent encore des traces dramatiques. »
La nomination de M. Duchesne devrait normalement être suivie sous peu par la publication du rapport de vérification commandé par le gouvernement sur les dépenses de Lise Thibault.
Un Parlement multipartite
- Les précédents
- Les règlements
Il y a deux jours, nous postions dans ce blogue un article où nous recensions les (rares) cas où il y avait plus de deux groupes parlementaires reconnus à l‘Assemblée nationale du Québec. Tel que promis, nous publions la deuxième partie de notre série «un Parlement multipartite» qui analysera la teneur des règles en vigueur au parlement en contexte de gouvernement minoritaire et de multipartisme. Or, le moins que l‘on puisse dire en lisant les Règlements de l‘Assemblée nationale, c‘est que ça paraît qu‘il n‘y a pas eu de gouvernement minoritaire au Québec depuis 1878 et que ça paraît que l‘Assemblée nationale a vécu sous un régime bipartite durant la majeure partie de son existence.
Mais avant de débuter, nous tenons à préciser que le texte qui suit ne constitue pas un avis juridique sur les règles de procédure de l‘Assemblée nationale. Les opinions qui y sont exprimées ne sauraient être invoquées par quiconque dans le cadre des travaux parlementaires, ni être considérées comme un aperçu des décisions qui pourraient être prises par la présidence de l‘Assemblée durant les travaux de la 38e législature. Nous ne présumons de rien. Considérez simplement cet article comme une synthèse commentée des règlements en vigueur à l‘Assemblée nationale.
Donc, pour le bénéfice des lecteurs, rappelons les critères que doit rencontrer une formation politique pour constituer un groupe parlementaire tels que définis à l‘article 13 du Règlement de l‘Assemblée nationale :
- avoir obtenu au moins 20% des bulletins valides lors de l‘élection générale précédente ou
- avoir fait élire au moins 12 députés lors de la même élection générale.
Contrairement à d‘autres chambres législatives, notamment l‘Assemblée nationale française et le Parlement européen, le Règlement de l‘Assemblée nationale du Québec ne permet pas à deux partis qui n‘ont pas le nombre minimum requis d‘élus pour constituer un groupe parlementaire de réunir leurs forces afin de constituer un groupe parlementaire commun. Dans les deux cas susmentionnés, il suffit de rassembler 20 députés (sur 577 et 785 députés respectivement), peu importe leur appartenance politique et le score obtenu lors de l‘élection générale précédente, pour former un «groupe politique», quoique dans le cas du Parlement européen, il y a également un critère de provenance (les membres d‘un groupe doivent provenir d‘au moins 1/5e des États membres de l‘Union européenne).
2- Les règlements
Responsabilités parlementaires
La nomination du président de l‘Assemblée nationale et des trois vice-présidents est prévue à l‘article 19 de la Loi sur l‘Assemblée nationale qui, s‘il ne dit mot sur l‘appartenance politique du président,
19. L‘Assemblée nationale doit, dès le début de sa première séance après une élection générale, élire, parmi les députés, un président et, par la suite, un premier, un deuxième et un troisième vice-présidents.
Vice-présidents.
Les deux premiers vice-présidents sont élus parmi les députés du parti gouvernemental et le troisième parmi ceux du parti de l‘opposition officielle.
Notons qu‘il n‘y a pas de règle alternative en cas de gouvernement minoritaire ou de présence de plus de deux groupes parlementaires.
Pour ce qui est des responsabilités au sein des groupes parlementaire, il est précisé à l‘article 16 du Règlement de l‘Assemblée nationale qu‘au sein de chaque groupe parlementaire, le chef du parti désigne un leader parlementaire, qui est le spécialiste et le porte-parole de son groupe parlementaire sur les questions de procédure parlementaire et de planification des travaux de l‘Assemblée.
16. Leaders – Chaque chef de groupe parlementaire désigne un leader parmi les membres de son groupe. Le leader du groupe formant le gouvernement porte le titre de leader du gouvernement. Le leader du groupe formant l‘opposition officielle porte le titre de leader de l‘opposition officielle.
Pour ce qui est des whips, dont le mandat est de maintenir le bon ordre dans les rangs de leur groupe parlementaire, la cohésion et la solidarité parmi leurs collègues, le Règlement parle indirectement de leur existence à l‘article 115, qui porte sur la composition de la Commission de l‘Assemblée nationale, qui prévoit que les whips de chaque groupe parlementaire en font partie.
115. Composition – La commission de l‘Assemblée nationale est composée : [!]
3. des leaders et des whips des groupes parlementaires; [!]
Tout groupe parlementaire a donc droit à un leader et à un whip attitré, mais, comme on le verra plus loin, tous ne bénéficient pas nécessairement des mêmes ressources pour accomplir leur tâche.
Temps de parole
Selon le Règlement de l‘Assemblée nationale, le principe général sous-tendant le temps de parole veut que tout député ait le droit de parole une seule fois sur une même question et que chaque député ait un temps de parole égal, sauf pour les représentants des chefs de groupe parlementaire auxquels un temps de parole additionnel est accordé. Donc, globalement, le temps de parole de chaque groupe parlementaire est proportionnel au poids numérique de chaque groupe en Chambre.
209. Règle générale – Sauf dispositions contraires, un député peut s‘exprimer une seule fois sur une même question. Son temps de parole est de dix minutes pour une motion de forme et de vingt minutes pour toute autre affaire.
Cependant, l‘auteur d‘une motion, le Premier ministre et les autres chefs de groupes parlementaires, ou leurs représentants, ont un temps de parole d‘une heure pour les motions de fond et de trente minutes pour les motions de forme.
S’agissant des motions par contre, le droit de parole est limité à l‘auteur de la motion et à un représentant par groupe parlementaire.
204. Temps de parole – Le député qui a proposé la mise aux voix immédiate et un représentant de chaque groupe parlementaire ont un temps de parole de dix minutes. L‘auteur de la motion a droit à une réplique de cinq minutes.
Pour ce qui est de la détermination de l‘ordre dans lequel les sujets sont déterminés, le Règlement spécifie que dans certains cas, la présidence doit tenir compte de l‘alternance entre les groupes parlementaires et de la présence de députés indépendants dans les cas suivants :
- affaires inscrites par les députés de l‘opposition (art. 97.2);
- sujet d‘une interpellation (art. 295);
- répartition des motions de censure (art. 305);
- ordre des débats de fin de séance (art. 308 et 311).
Période des questions
Il n‘y a pas dans le Règlement de règle fixe et immuable . Selon La procédure parlementaire au Québec (pp. 185-188), la tâche de répartir les questions (sauf mention contraire, par «question», nous entendons ici «question principale») revient au président et pour ce faire, il fonde ses décisions sur un certain nombre de principes et de facteurs – certains de nature structurelle et d‘autres de nature conjoncturelle – élaborés au fil des ans lors de décisions prises par ses prédécesseurs :
- Tout député peut poser une question à un ministre (par conséquent, même un député ministériel peut poser une question durant la période des questions et des réponses orales).
- La période des questions est principalement dévolue à l‘opposition dans son ensemble.
- La reconnaissance des groupes parlementaires doit être prise en compte.
- Le rôle de premier plan que doit accomplir l‘opposition officielle lors des contrôles parlementaires.
- La composition de l‘Assemblée nationale.
- L‘importance, l‘actualité et l‘urgence des questions principales.
- Le nombre de questions complémentaires.
Comme la composition de l‘Assemblée nationale telle qu‘on la connaît depuis le 26 mars est sans précédent dans l‘histoire parlementaire québécoise, il serait hasardeux de présumer de la répartition des questions entre les groupes parlementaires durant la 38e législature, d‘autant plus que nous ne connaissons pas les précédents en cette matière lors d‘autres législatures où l‘Assemblée comprenait plus de deux groupes parlementaires (29e législature (1970-1973) et 31e législature (1976-1981)), ni les manières de procéder en cette matière dans d‘autres parlements où le gouvernement est ou a été minoritaire. Toutefois, généralement, les deux première questions reviennent à l‘opposition et le troisième question va au deuxième parti d‘opposition lorsqu‘il y en a un.
À titre indicatif, rappelons que durant la 37e législature, en vertu d‘une décision prise par le président Michel Bissonnet le 30 octobre 2003, les «députés indépendants» (qui étaient quatre à l‘époque) avaient droit à deux questions à toutes les cinq séances (au quatrième rang durant la période des questions), les députés ministériels à deux questions à toutes les trois séances (au cinquième rang ou au sixième rang si un «député indépendant» avait posé une question durant la séance) et l‘opposition officielle toutes les autres. Le ratio de questions attribuées aux députés indépendants fut élevé à deux questions par période de quatre séances en octobre 2004, alors qu‘ils étaient passés de quatre à six.
Commissions parlementaires
La composition des commissions parlementaires «sectorielles» est fixée aux articles 121 et 122 du Règlement de l‘Assemblée nationale. L‘article 122, qui couvre les cas où il y a un troisième groupe parlementaire, stipule que :
122. Membres supplémentaires – Malgré l‘article 121, tout député indépendant ou appartenant à un groupe d‘opposition autre que l‘opposition officielle peut être membre d‘une commission. Le cas échéant, le nombre de membres de cette commission est porté à douze, ainsi répartis :
1. sept députés du groupe formant le gouvernement;
2. quatre députés de l‘opposition officielle; et
3. un député d‘un groupe d‘opposition autre que l‘opposition officielle ou un député indépendant.
Pour ce qui est de la présidence des 10 commissions sectorielles permanentes, la règle veut que six d‘entre elles soient attribuées à un député ministériel et quatre à un député d‘opposition (et vice versa pour les vice-présidences).
126. Répartition des présidences – Six commissions sont présidées par des députés du groupe formant le gouvernement et trois par des députés de l‘opposition.
La présidence d‘une commission peut elle être attribuée à un député issu d‘un troisième parti? Oui, si on se fie à l‘article 128 du Règlement de l‘Assemblée nationale, qui prévoit qu‘à défaut d‘accord unanime au sein de la Commission de l‘Assemblée nationale sur la répartition des présidences de commissions, le troisième parti a le septième choix sur les présidences de commission.
Mentionnons par ailleurs que les règles régissant le temps de parole en commission sont similaires à celles qui prévalent à l‘Assemblée elle-même.
On remarquera que le fait que le parti ministériel soit majoritaire ou minoritaire à l‘Assemblée nationale ne se reflète pas dans la composition des commissions parlementaires, où il conserve toujours la majorité. Cela est dû au fait que la composition des commissions est fixée dans le Règlement, ce qui ne permet pas de prendre en compte des circonstances exceptionnelles telles qu‘un gouvernement minoritaire et/ou la présence d‘un troisième groupe parlementaire en Chambre (notons, à titre de comparaison, qu‘à la Chambre des communes, la composition des comités parlementaires est déterminée par un vote en Chambre au début de chaque législature, ce qui donne une souplesse additionnelle et explique pourquoi le parti ministériel est minoritaire dans les comités parlementaires depuis les élections fédérales de 2004 et de 2006, qui ont toutes deux vu l‘élection d‘un gouvernement minoritaire).
Cela risque de susciter certaines situations incongrues, telles qu‘une commission parlementaire présidée par un député issu d‘un parti dont il est le seul représentant et un gouvernement qui peut imposer ses vues en commission parlementaire, mais pas à l‘Assemblée elle-même. Mais l‘effet le plus important de ces dispositions sera vraisemblablement d‘occasionner une charge de travail additionnelle des députés ministériels et un dégarnissement des rangs ministériels en Chambre durant les travaux des commissions (il n‘est pas rare qu‘une ou deux commissions siègent en même temps que la Chambre elle-même, sauf durant la période des questions). Compte tenu du fait que le président de l‘Assemblée nationale (généralement issu du parti ministériel) et les ministres ne sont pas membres des commissions et du fait que les ministres sont peu présents à l‘Assemblée en dehors de la période des questions, il ne resterait donc que 27 députés ministériels (si on retient l‘hypothèse d‘un Conseil des ministres de 20 ministres) pour tenir le fort à l‘Assemblée et dans les commissions. Mais le plus étonnant, c‘est que, dans les cas où deux commissions siègent pendant les travaux de la Chambre, le troisième parti se retrouverait avec une pluralité à l‘Assemblée!
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LIB : 48 – le président – 14 députés en commission = 33 députés en Chambre
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ADQ : 41 – 8 députés en commission = 33 députés en Chambre
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PQ : 36 – 2 députés en commission = 34 députés en Chambre
Et encore, cette hypothèse suppose que tous les ministres seront présents en Chambre en dehors de la période des questions, ce qui est rarement le cas.
Ressources humaines et financières
Il incombe au Bureau de l‘Assemblée nationale de statuer sur les questions relatives aux ressources humaines, financières et matérielles accordées aux députés et aux groupes parlementaires. En vertu de l‘article 88 de la Loi sur l‘Assemblée nationale, le Bureau est composé de la façon suivante :
88. Les membres du Bureau autres que le président sont désignés par les députés de chaque parti selon la répartition suivante:
1. cinq du parti gouvernemental;
2. quatre du parti de l‘opposition officielle ou, s‘il y a plusieurs partis d‘opposition, trois du parti de l‘opposition officielle et un de celui des autres partis d‘opposition qui a obtenu le plus grand nombre de sièges ou, au cas d‘égalité de sièges, de celui qui a obtenu le plus grand nombre de votes valides.
Pour les besoins de cet article, nous nous concentrerons sur le budget aux fins de recherche et le personnel politique. Ainsi, selon l‘article 108 (premier alinéa) de la Loi sur l‘Assemblée nationale,
108. Le Bureau détermine par règlement les sommes que les partis politiques représentés à l‘Assemblée à la suite de la dernière élection générale et les députés indépendants peuvent recevoir de l‘Assemblée à des fins de recherche et de soutien, ainsi que les conditions et modalités de leur versement. [!]
Le Bureau se retrouve donc dans une situation sans précédent depuis l‘adoption de la présente version de la Loi sur l‘Assemblée nationale (en 1982), c‘est-à -dire de fixer le budget de recherche à un deuxième parti d‘opposition. Sur quoi le Bureau se basera-t-il? Nous n‘avons pas la réponse, d‘autant plus que nous ne connaissons pas les précédents en cette matière en 1970 et 1976.
Pour ce qui est du personnel politique, la Loi sur l‘Assemblée nationale, selon l‘article 124.1, attribue aux groupes parlementaires autres que le gouvernement et l‘opposition officielle les mêmes ressources qu‘aux deux principaux groupes, à l‘exception du fait que le troisième parti n‘a pas de budget attitré pour le bureau du whip :
124.1. Le Chef de l‘opposition officielle, un député auquel s‘applique le paragraphe 6° de l‘article 7 [on parle ici du chef d‘un troisième groupe parlementaire] de la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l‘Assemblée nationale (chapitre C-52.1), le président et les vice-présidents de l‘Assemblée nationale, le leader parlementaire du gouvernement, de l‘opposition officielle ou d‘un parti visé au paragraphe 6° de l‘article 7 de la loi mentionnée ci-dessus, le whip en chef du gouvernement et le whip en chef de l‘opposition officielle de l‘Assemblée nationale peuvent nommer le directeur de leur cabinet et les autres personnes nécessaires au bon fonctionnement de leur cabinet. [!]
Conclusions
De ce qui précède, on peut conclure que les règles de procédure de l‘Assemblée nationale sont essentiellement conçues en fonction de l‘existence de deux groupes parlementaires. Toutefois, il y a des possibilités d‘aménagements pour un troisième parti. Par contre, s‘il y a plus que trois groupes parlementaires, il reste bien peu pour le quatrième parti et ceux qui suivent.
Par ailleurs, dans un contexte où l‘idée d‘une réforme du mode de scrutin est discutée, force nous est de constater que dans l‘éventualité où un mode de scrutin proportionnel ou mixte devait être implanté au Québec, une refonte du règlement pourrait s‘en suivre afin de prendre en compte de la nouvelle réalité qui risque d‘en découler, notamment la présence permanente de plusieurs partis en chambre (par «plusieurs», nous entendons plus que deux), les probabilités moindres qu‘un seul parti ait la majorité des sièges ainsi que la possibilité de voir apparaître des gouvernements de coalition.
Un Parlement multipartite
- Les précédents
- Les règlements
Lorsque la 1re session de la 38e législature de l‘Assemblée nationale débutera le 8 mai prochain, il y aura non seulement un premier gouvernement minoritaire au Québec pour la première fois depuis 1878 mais également, pour la première fois en 37 ans, un troisième groupe parlementaire de plein droit (c‘est-à -dire sans avoir obtenu ce statut à la suite d‘une dérogation au Règlement de l‘Assemblée nationale) au Salon Bleu. On l‘a dit et redit des milliers de fois depuis deux semaines, mais cette situation (gouvernement minoritaire et multipartisme «officiel») est rarissime en contexte québécois et sera une source d‘inconnu et, souhaitons-le, d‘innovation et de progrès pour notre système parlementaire.
Puisqu‘il s‘agit d‘un sujet long à traiter, nous l‘avons divisé en deux parties. Dans la première partie ci-dessous, nous traiterons des précédents en matière de reconnaissance des tiers partis à l‘Assemblée nationale. Puis, dans la seconde partie qui paraîtra demain (probablement), nous parlerons des règles en vigueur lorsqu‘il y a une gouvernement minoritaire et un troisième parti en Chambre.
1- Les précédents
Pour bien saisir ce qui suit, il faut faire la distinction entre un «parti politique» et un «groupe parlementaire». Un parti politique est une
Organisation durable qui vise à conquérir et à exercer le pouvoir en défendant un certain nombre d‘idées définies dans un programme. Les partis politiques se démarquent des groupes de pression ou des autres organisations de la société civile (syndicats, chambres de commerce, corporations professionnelles, etc.) dans la mesure où ils visent explicitement à former le gouvernement et non pas simplement à l‘influencer ou à faire pression sur lui. (!) (source)
Quant à un groupe parlementaire, il s‘agit, d‘après le Règlement de l‘Assemblée nationale, d‘une organisation qui satisfait aux critères suivants énoncés à l‘article 13:
13. Définition – Tout groupe d‘au moins douze députés élus sous la bannière d‘un même parti politique, ou tout groupe de députés élus sous la bannière d‘un parti politique qui a obtenu au moins 20 % des voix aux plus récentes élections générales, constitue un groupe parlementaire.
À l‘exception du Président, les députés n‘appartenant à aucun groupe siègent à titre d‘indépendants.
Selon l‘ouvrage La procédure parlementaire au Québec (PDF, 635 Ko), les groupes parlementaires ne sont formellement reconnus dans les règles de procédure de l‘Assemblée nationale que depuis l‘adoption du présent Règlement de l‘Assemblée nationale en 1984. La version précédente du Règlement de l‘Assemblée nationale (1972-1984) contenait plutôt des dispositions concernant les «partis politiques reconnus». Et avant 1972, il n‘y avait pas de critères précis pour qu‘un tiers parti soit reconnu comme tel en Chambre (au moment d‘écrire ces lignes, nous n‘avions pu mettre la main sur le «Règlement annoté de l‘Assemblée législative» ou «Code Geoffrion», en vigueur de 1941 à 1972, mais l‘ouvrage La procédure parlementaire au Québec ne mentionne pas de dispositions sur les groupes parlementaires contenues dans ce règlement). De fait, il n‘existait que deux «groupes parlementaires» (pardonnez l‘anachronisme): le «gouvernement» et «l‘opposition» (ou encore les «ministériels» et les «oppositionnistes»). C‘est ainsi que, par exemple, durant la 12e législature (1908-1912), les députés de l‘opposition envisagèrent de nommer Henri Bourassa comme chef de l‘opposition officielle, même s‘il avait été élu sous la bannière de la Ligue nationaliste canadienne (3 députés) plutôt que sous celle du Parti conservateur (14 députés), compte tenu du fait que le chef conservateur de l‘époque, Pierre-Évariste LeBlanc, avait été défait dans sa circonscription.
En date de l‘inauguration de la 38e législature le 8 mai prochain, l‘Assemblée nationale sera composée, sauf décès ou incapacité d‘un des députés élus, de la façon suivante :
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LIB: 48 sièges;
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ADQ: 41 sièges;
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PQ: 36 sièges.
C‘est la première fois depuis la 29e législature (1970-1973) qu‘il y plus de deux « partis politiques reconnus » (selon l‘expression en vigueur à l‘époque) de plein droit à l‘Assemblée nationale. Lors de l‘élection générale de 1970, l‘Union nationale (19,65%, 17 élus) avait formé l‘opposition officielle, mais le Ralliement créditiste (11,19%, 12 élus) et le Parti québécois (23,06%, 7 élus) constituèrent deux autres groupes parlementaires d‘opposition.
Nous disons «de plein droit» car lors de la 31e législature (1976-1981), l‘Union nationale (18,20%, 11 élus), n‘avait pas atteint le minimum requis par le règlement de l‘époque pour être reconnu comme groupe parlementaire. L‘Union nationale avait néanmoins obtenu des autres partis une modification temporaire au règlement (le 22 décembre 1976, selon la Chronologie parlementaire de l‘Assemblée nationale) afin d‘abaisser le nombre minimum de députés de 12 à 11, permettant ainsi sa reconnaissance comme groupe parlementaire. À la suite de l‘élection générale de 2003, l‘Action démocratique du Québec (18,18%, 4 élus), avait tenté d‘obtenir une dérogation semblable afin d‘être reconnu comme groupe parlementaire, ce qui avait été refusé.
Bien entendu, il est arrivé à de nombreuses reprises depuis la Confédération que des tiers partis soient parvenus à faire élire des députés en Chambre. Toutefois, ils n‘avaient pas été reconnus en tant que «groupes parlementaires», soit parce que le concept n‘existait tout simplement pas et/ou qu‘ils s‘étaient alliés à un autre parti d‘opposition (ex.: la Ligue nationaliste canadienne en 1908, l‘Action libérale nationale et le Parti conservateur en 1935, le Bloc populaire canadien en 1944), soit parce qu‘ils ne satisfaisaient pas aux critères pour être reconnus comme tel (ex. : le Ralliement créditiste en 1973 et 1976, le Parti égalité en 1989 ou l‘ADQ en 1994, 1998 et 2003).
En ce sens, la 38e législature sera unique pour plusieurs raisons dans l‘histoire parlementaire du Québec. D‘abord parce qu‘il s‘agira du premier parlement depuis la Confédération où le gouvernement sera véritablement minoritaire au sens où nous l‘entendons de nos jours, c‘est-à -dire où le parti politique formant le gouvernement est en minorité face à un ou plusieurs partis d‘opposition (l‘historien parlementaire Gaston Deschênes explique sur son blogue les circonstances exceptionnelles qu‘on ne saurait retrouver en 2007 et qui expliquent pourquoi, à la fin du 19e siècle, le libéral Joly de Lotbinière et le conservateur Taillon ont tenté de gouverner sans majorité en chambre. Voir également ce texte qu‘il a publié dans Le Devoir le 26 mars dernier). Ensuite parce que les trois groupes parlementaires ont un nombre de sièges relativement (nous disons bien relativement) équivalent, chacun ayant, grosso modo, un tiers des sièges.
Généralement, lorsque des parlements minoritaires sont élus dans d‘autres juridictions au Canada, le troisième parti est beaucoup plus faible en nombre que les deux autres. Rappelons qu‘en ce début de 38e législature à l‘Assemblée nationale, le parti formant le gouvernement a 38,4% des sièges (à titre de comparaison, le gouvernement Harper avait fait élire 124 députés sur 308 (40,3%) en janvier 2006 tandis qu‘en Nouvelle-Écosse, le gouvernement conservateur de Rodney MacDonald avait fait élire 23 députés sur 52 (44,2%) en juin dernier), le parti formant l‘opposition officielle en détient 32,8% et le troisième parti se retrouve avec les 28,8% «restants» (toujours sur le plan comparatif, le troisième parti à la Chambre des communes, le Bloc québécois, avait gagné 51 sièges (16,6%) en janvier 2006 tandis qu‘en Nouvelle-Écosse, le Parti libéral avait terminé troisième en juin 2006 avec 9 sièges (17,3%)).
À venir: À quel point les règlements de l‘Assemblée nationale sont adaptés à cette nouvelle situation?
Après avoir dormi sur les résultats d‘hier, et avec un peu de recul, voici notre analyse sur l‘élection générale de 2007 et ce qui nous attend au cours des prochains mois.
d‘entrée de jeu, ce qui nous a frappé de l‘élection d‘hier et du déroulement de la campagne électorale est le nombre d‘idées reçues sur la vie politique québécoise qui – en 2007 – ont été contredites par les faits:
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«Les Québécois élisent un parti au pouvoir pour deux mandats»: techniquement, c‘est vrai, mais jamais depuis l‘Union nationale en 1970 a-t-on vu le parti ministériel perdre 13% des voix et 28 sièges (22% des sièges) après un premier mandat. Habituellement, la réélection d‘un gouvernement pour un deuxième mandat (majoritaire qui plus est) est une formalité, mais ça n‘a pas été le cas en 2007.
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«Les Québécois n‘élisent pas de gouvernements minoritaires»: les sondages laissaient entrevoir un gouvernement minoritaire tout au long de la campagne électorale, donc on a eu assez de temps pour se faire à l‘idée que cette idée reçu n‘était peut-être pas aussi vraie qu‘on pouvait le penser. Toutefois, rien ne laissait présager une Assemblée nationale aussi divisée qu‘elle le sera durant la prochaine législature. Le parti majoritaire n‘a que 48 sièges en chambre (38,4% des sièges), le « tiers parti » n‘est que 12 sièges derrière, et l‘opposition officielle est entre les deux.
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«Plus l‘issue d‘un scrutin s‘annonce serrée, plus la participation électorale s‘accroît»: deux chiffres suffisent pour remettre cette idée reçue en cause: 70,5% en 2003; 71,3% en 2007.
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«Les organisations électorales jouent un rôle important dans la sortie du vote»: tous les commentateurs politiques s‘accordaient pour affirmer que l‘ADQ faisait figure de parent pauvre face au PQ et aux libéraux sur les plans des finances et de l‘organisation. Et pourtant… Après l‘élection d‘Andrée Boucher à la mairie de Québec avec un budget de 3000$ en 2005 et l‘élection de 10 députés conservateurs au fédéral en 2006 avec une organisation « légère », il faudrait peut-être relativiser un peu plus l‘importance de la « machine » dans la sortie du vote.
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«Le mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour déforme la volonté exprimée par les électeurs»: c‘est peut-être un accident de parcours, mais la répartition des sièges reflète assez bien le pourcentage de voix obtenus par chaque parti: LIB 38,4% des sièges, ADQ 32,8% des sièges et PQ 28,8% des sièges. Il est vrai qu‘à 4% chacun, Québec solidaire et les Verts n‘ont pas élu de députés, mais avec de tels chiffres, rien ne garantit qu‘ils seraient parvenus à le faire sous un mode de scrutin mixte ou proportionnel.
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«La circonscription de Saint-Jean vote toujours du côté du pouvoir»: cette fois-ci, ce n‘est pas vrai, le député libéral a été battu.
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«Le vote libéral est sous-évalué dans les sondages»: Léger Marketing accordait 35% aux libéraux samedi dernier, CROP leur accordait 34%. Le vote libéral a été légèrement en-deçà de ce qu‘accordaient les sondeurs, mais ça reste dans la marge d‘erreur. Tout comme en 2003, il n‘y a pas eu de « prime de l‘urne ».
À surveiller au cours des prochaines semaines et des prochains mois, beaucoup d‘inconnues qui pourraient nous mener soit vers un tripartisme (multipartisme?) permanent, soit vers un retour au bipartisme PLQ-PQ ou soit vers un nouveau bipartisme.
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Nouvelle dynamique parlementaire: Sur quel parti le gouvernement libéral minoritaire va-t-il s‘appuyer? Tel que nous l‘avons mentionné plus haut, aucun parti ne se démarque clairement des autres. À première vue, bien peu de choses semble rapprocher les trois partis, et ça semble particulièrement vrai pour le Parti libéral et le Parti québécois. Si l‘ADQ joue de façon relativement classique le rôle d‘un parti d‘opposition officielle, il faudra bien que les « vieux partis » trouvent un terrain d‘entente afin d‘éviter de retomber rapidement en élection.
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Élection de réalignement?: On a souvent comparé depuis hier l‘élection de 2007 à d‘autres qui ont été le théâtre d‘un réalignement de notre système de partis, notamment les élections générales de 1936 (arrivée au pouvoir de l‘Union nationale), de 1970 (le PQ devient le 2e parti le plus populaire au Québec) et de 1976 (arrivée au pouvoir du PQ). Ce n‘est pas impossible, mais il est encore trop tôt pour le dire. En 1936 et 1970-76, un seul parti a été frappé par la montée d‘un tiers parti (le Parti conservateur dans les années 30 et le PQ dans les années 70) et l‘autre s‘est maintenu (le Parti libéral dans les deux cas). En 2007, ce sont les deux principaux partis qui ont écopé; le PQ et les libéraux ont tous les deux subi des reculs historiques hier.
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Le Parti vert et Québec solidaire: Vrai, les deux partis ont obtenu moins de voix que ne leur attribuaient les sondages au cours de la campagne. Ils ont néanmoins progressé depuis 2003 et, financement (partiellement) public des partis politiques oblige, ils auront maintenant droit à des ressources financières en raison des voix supplémentaires qu‘ils ont obtenus et qui leur permettra de consolider leur progression. C‘est la stratégie qu‘a adoptée le Parti vert sur la scène fédérale depuis le début des années 2000, et ils sont passés de moins de 1% à travers le Canada en 2000 à 4% en 2004 et 2006, et ils sont maintenant dans les deux chiffres dans les sondages pancanadiens.
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Volatilité de l‘opinion publique: Depuis 2002, l‘opinion publique québécoise est très volatile et chacun des principaux partis ont connus des très hauts et des très bas dans les sondages au cours de la période. Ça risque de se poursuivre au cours des prochains mois. À titre d‘exemple:
- LIB: 21% en avril 2005 (Léger), 48% en août 2003 (Léger);
- PQ: 25% en septembre 2002 (Léger), 50% en décembre 2005 (CROP);
- ADQ: 11% en mars 2006 (Léger), 40% en août, septembre et octobre 2002 (Léger et CROP).
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Réforme du mode de scrutin: ironiquement, la répartition des sièges entre les principaux partis est la plus proportionnelle qu‘on ait vu depuis longtemps. Malgré tout, la perspective qu‘un des trois partis puisse disparaitre à plus ou moins brève échéance pourrait être propice à une réforme du mode de scrutin.
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Débat de sondeurs: Aucune firme de sondage et aucun site de prédiction n‘a prévu ce qui s‘est passé hier, et cela relancera vraisemblablement un énième débat sur la fiabilité des sondages électoraux. Notons tout de même qu‘à l‘exception du résultat de l‘ADQ (et du fait que l‘ADQ a terminé deuxième contrairement à ce que laissaient croire les sondages), tous les autres étaient à l‘intérieur de la marge d‘erreur, sauf Strategic Counsel qui était dans le champ.
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Renouvellement de la députation: Beaucoup de députés sortants du PQ et du PLQ ont été battus hier et plusieurs nouveaux députés feront leur entrée à l‘Assemblée nationale prochainement (surtout à l‘ADQ, mais aussi du PQ et des libéraux). Reste à voir comment ce renouvellement de la députation se reflètera au niveau du débat politique. Il y a là potentiel à des dérapages et à des erreurs de débutants, mais aussi à un renouvellement et à un rafraîchissement du discours politique.
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Évolution de l‘opinion publique sur l‘avenir du Québec: Avec une opposition officielle qui prétend incarner une troisième voie entre le fédéralisme et la souveraineté, comment évoluera l‘opinion publique sur la question de l‘avenir du Québec au cours des prochains mois?
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Débats internes au PQ et au PLQ: Ce que nous nous apprêtons à écrire à ce sujet est loin d‘être original. Le PQ qui obtenu son pire score depuis 1970, les libéraux qui obtiennent leur pire score depuis 1867 et tous deux ont perdu des comtés réputés « imprenables » aux mains de l‘ADQ. Des débats passionnés et des remises en question à l‘interne risquent de surgir en ce qui a trait à leur idéologie et à leur leadership.
d‘abord, dans Le Devoir (accès réservé aux abonnés), la chroniqueuse Chantal Hébert résume pour le lectorat québécois l‘histoire politique de l‘Ontario des 30 dernières années. Où est l‘intérêt, demandez-vous? L‘intérêt est dans la dynamique tripartite qui prévaut généralement dans la province voisine depuis les années 70 et qui a généré plusieurs gouvernement minoritaires (les conservateurs sous Bill Davis), un gouvernement minoritaire remplacé par l‘opposition officielle avec l‘appui du 3e parti (le gouvernement conservateur de Frank Miller remplacé par les libéraux de David Peterson en 1985), 2 partis qui forment une alliance parlementaire (les libéraux et le NPD entre 1985 et 1987), un parti qui remporte une majorité à la surprise générale (le NPD en 1990) et 3 partis qui prennent le pouvoir en trois élections successives (Libéraux en 1987, NPD en 1990 et conservateurs en 1995).
Ensuite, dans La Presse, le journaliste Mario Girard traite du comportement électoral des groupes ethnoculturels au Québec. Bien que cette question ne soit pas à l‘avant-scène de la recherche en science politique au Québec, certains chercheurs s‘intéressent à la question. Ainsi, le vote des membres des groupes ethnoculturels serait moins monolithique (selon l‘expression de Salam Elmenyawi, président du Conseil musulman de Montréal) qu‘il ne l‘a déjà été. On parle également de la participation des électeurs appartenant aux groupes des minorités visibles au processus électoral, qui serait moins élevée que parmi la majorité (notamment en ce qui a trait à l‘inscription sur les listes électorales).
L‘arbre qui cache la forêt
Philippe Schnobb de Radio-Canada écrit ce matin sur ce billet de Bryan Breguet, directeur des affaires politiques de la Commission des jeunes de l‘ADQ et auteur du blogue De gauche à droite, dans lequel il écrit notamment que « L‘ADQ n‘est pas prête à gouverner SEULE ». Nous vous invitons à lire le billet en entier pour la réflexion qu‘il propose sur le parlementarisme tel qu‘il se pratique au Québec et au Canada, notamment en ce qui a trait à la fragmentation de l‘électorat et au rôle que devraient jouer les partis en contexte de gouvernement minoritaire.
Les femmes députées: analyse comparative
En ce 8 mars, tandis que plusieurs groupes de femmes dénoncent le peu de progrès enregistré depuis 2003 quant au nombre de femmes candidates dans les trois principaux partis politiques, nous avons voulu comparer la situation québécoise par rapport à d‘autres parlements ailleurs au Canada et dans le monde (sur le plan strictement numérique, nous n‘avons pas les données et le temps disponibles pour faire une analyse qualitative qui prendrait en compte le rôle et l‘influence qu‘exercent les femmes au sein des pouvoirs législatif et exécutif).
Lors de la dissolution de l‘Assemblée nationale le 21 février dernier, 39 femmes y siégeaient, représentant ainsi 31,2% de l‘ensemble des députés (Note: 38 femmes avaient été élues le 14 avril 2003, mais le jeu des élections partielles a fait en sorte qu‘une députée s‘est ajoutée en cours de route. On avait même atteint les 40 députées ou 32% en septembre 2004.) Selon l‘Assemblée nationale, il s‘agissait de la plus importante délégation féminine en Chambre dans toute l‘histoire du parlementarisme québécois.
Où le Québec se classe-t-il par rapport aux autres provinces canadiennes et aux parlements nationaux dans le monde? Dans le cas des autres provinces, une visite rapide des sites web des différentes assemblées législatives nous a permis d‘additionner les chiffres suivants qui parlent par eux-mêmes:
- Île-du-Prince-Édouard: 7 députées sur 27 (25,9%)
- Ontario: 26 députées sur 103 (25,2%)
- Manitoba: 13 députées sur 55 (23,6%)
- Colombie-Britannique: 17 députées sur 79 (21,5%)
- Terre-Neuve-et-Labrador: 10 députées sur 48 (20,8%)
- Saskatchewan: 10 députées sur 55 (18,2%)
- Nouvelle-Écosse: 9 députées sur 52 (17,3%)
- Alberta: 12 députées sur 83 (14,5%)
- Nouveau-Brunswick: 7 députées sur 55 (12,7%)
À l‘échelle mondiale, selon l‘Union interparlementaire (IPU), le parlement qui contient la plus grande proportion de députées est celui du Rwanda, qui comprend 39 femmes sur un total de 80 députés à l‘Assemblée nationale (48,8%). Un autre pays qui est près de la parité hommes/femmes est la Suède, où les femmes représentent 47,3% des députés au Riksdag (165 sur 349). Avec 31,2% de députées, le Québec suivrait l‘Allemagne, qui est au 15e rang mondial avec 31,6% de députées élues (194 sur 614) à la Chambre basse du parlement allemand, le Bundestag. Le Canada se classe au 47e rang – à égalité avec la Pologne – avec 20,8% de femmes à la Chambre des communes (64 députées sur 308). Le classement mondial de la place des femmes dans les parlements nationaux peut être consulté ici.
Bref, à l‘échelle canadienne et mondiale, le Québec se classe relativement bien par rapport aux autres juridictions, même si on est encore loin de la parité hommes/femmes à l‘Assemblée nationale (et encore, nous n‘abordons pas la question de la place des femmes au Conseil des ministre, tant en termes de nombre et d‘influence).
Reste à voir s‘il y aura du progrès à ce chapitre à l‘issue du scrutin du 26 mars prochain.
Les premières pancartes étaient déjà sur les poteaux ce matin, mais les choses sérieuses vont commencer à 11h:
Le mercredi 21 février 2007
ÉLECTIONS
Charest chez la lieutenant-gouverneure à 11h
Le premier ministre du Québec, Jean Charest, annonce qu‘il se rendra au bureau de la lieutenant-gouverneure du Québec, Lise Thibault, à 11h00 pour la signature des décrets permettant de dissoudre l‘Assemblée nationale et de tenir une élection dans toutes les circonscriptions du Québec.
Selon plusieurs sources, le scrutin se tiendra le 26 mars.
Il y a trois semaines à peine, prononcer dans la même phrase les expressions « Assemblée nationale » et « gouvernement minoritaire » relevait soit de la politique-fiction, soit de la folie furieuse.
On a commencé à évoquer la possibilité depuis quelques jours (depuis la publication des sondages Léger et CROP de fin janvier en fait), mais jusqu‘à présent, c‘était plus sous la forme interrogative qu‘autre chose.
Voici que jeudi dernier, la dernière projection de DemocraticSPACE.com sur la base des 5 derniers sondages a été rendue publique:
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PQ: 62 sièges;
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LIB: 51 sièges;
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ADQ: 12 sièges.
(pour votre information: il faut 63 sièges pour obtenir la majorité à l‘Assemblée nationale.)
Reste à voir comment les choses évolueront afin que la probabilité que 2007 voit le Québec élire un premier gouvernement minoritaire depuis 1878 se matérialise.
MISE À JOUR (20 février 2007): Tristan Péloquin parle également de la dernière projection de Greg Morrow aujourd‘hui dans La Presse
Notre système parlementaire est basé sur un système de représentation qui remonte aux débuts du parlementarisme britannique au 13e siècle: la représentation territoriale. Un député est élu par la population d‘un territoire donné (la circonscription électorale) et, en principe, en est le porte-parole.
Michel C. Auger proposait il y a quelques jours une réflexion intéressante sur la pertinence de ce principe à notre époque, surtout dans un contexte où un candidat peut voter pour lui-même sans résider dans la circonscription où il se présente et où un ministre peut décider de changer de circonscription entre deux élections.
Dans ce dernier cas (celui de Philippe Couillard, pour ne pas le nommer), il y a tout de même des nuances à apporter car c‘est un phénomène qui a existé de tout temps au Québec. Déjà sous le régime de l‘Acte constitutionnel de 1791, il était de pratique courante qu‘une personne fasse acte de candidature dans plus d‘une circonscription au cours de la même élection générale. Certains ont même été élus deux circonscriptions durant le même scrutin. De même, il arrivait souvent qu‘un député représente plus d‘une circonscription, parfois très éloignées géographiquement, au cours de sa carrière politique. Un des exemples les plus célèbres est celui de Louis-Joseph Papineau qui a été élu dans pas moins de 6 circonscriptions entre 1808 et 1854 (Kent, Montréal-Quartier-Ouest, Surrey, Comté de Montréal, Saint-Maurice et Deux-Montagnes).
Analyse-moi ça!
Voici quelques analyses du contexte électoral pour commencer la journée:
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L‘état des troupes: dans Le Soleil, Michel C. Auger discute des points forts et des points faibles respectifs des trois principaux partis;
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Gérer les vedettes: dans La Presse, Denis Lessard nous explique à quel point le recrutement de candidats-vedettes peut s‘avérer une tâche ardue, tant pour convaincre une personnalité connue de faire le saut en politique active que pour convaincre un député sortant de laisser sa place;
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Québec champ de bataille: Paul Roy de La Presse nous propose une analyse de la situation électorale dans la grande région de Québec (Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches), où s‘annoncent de nombreuses luttes à trois;
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Le roi est mort, vive le roi?: selon Joël-Denis Bellavance de La Presse, le règne de la lieutenante-gouverneure du Québec, Mme Lise Thibault, tirerait à sa fin. Le premier ministre fédéral, Stephen Harper (qui a le pouvoir de nommer ou de démettre les lieutenants-gouverneurs), n‘attendrait que la fin de la prochaine campagne électorale pour nommer son successeur (c‘est vrai, ce n‘est pas une « nouvelle électorale », mais on parle du chef de l‘État québécois après tout).
C‘est à cette étonnante conclusion qu‘arriverait Mme Karen Eltis, professeure de droit à l‘Université d‘Ottawa, dans un article à paraitre prochainement dans une revue de droit, selon Radio-Canada.
Transfuges politiques
Traverser la Chambre serait inconstitutionnel
Les députés qui changent de parti politique en échange d‘un poste plus alléchant en cours de mandat violent la Constitution, selon une professeure de droit de l‘Université d‘Ottawa, Karen Eltis.
Dans un article à paraître dans une revue de droit, Mme Eltis considère que les députés transfuges violent le droit fondamental des citoyens à la liberté d‘expression. Elle rappelle que les électeurs ont exercé leur liberté d‘expression en votant, et que leur vote perd sa valeur si leur député change de parti.
Les députés jouissent eux aussi des libertés d‘expression et d‘association. Pour concilier leurs droits à ceux des citoyens, Mme Eltis propose que les députés puissent changer de parti, mais qu‘ils n‘aient pas droit à un poste de ministre avant le scrutin suivant. On pourrait ainsi différencier, selon elle, les opportunistes des députés qui agissent par principe.
Le nouveau ministre de la Réforme démocratique et leader du gouvernement Harper en Chambre, Peter Van Loan, se dit ouvert à toute proposition sur les transfuges.
La question a été relancée par la récente défection du député Wajid Khan, qui a quitté les libéraux pour joindre le Parti conservateur. Ce cas fera partie d‘une vaste consultation populaire que le gouvernement Harper tiendra cet hiver sur le fonctionnement des institutions démocratiques.
Le moins que l‘on puisse dire, c‘est que la nouvelle est de circonstance alors qu‘un tel événement a failli survenir à Québec. Plus de détails sur la question lorsque l‘article de Mme Eltis sera publié.
Dans un éditorial publié ce matin dans Le Soleil, Jean-Marc Salvet propose que le Québec se dote d‘une législation introduisant des élections générales à date fixe à tous les quatre ans:
(…)
Il est temps de changer les choses. La quête de la meilleure «fenêtre» fait partie intégrante de notre système politique. Mais bien des citoyens réprouvent aujourd‘hui cette façon de faire. Ils veulent que la joute politique soit la plus transparente possible.
Il n‘est pas sain qu‘un gouvernement, quel qu‘il soit, puisse choisir une date de scrutin plutôt qu‘une autre en fonction de la force du vent qui souffle dans son dos, ou qu‘il croit sentir. Le problème, nous l‘avons déjà déploré, est qu‘il est alors joueur et arbitre.
Ce blocage n‘a plus aucune raison d‘être. La preuve est faite qu‘un tel changement ne bouleverserait en rien nos équilibres politiques. Stephen Harper a lui-même dévoilé un projet pour la tenue d‘élections à date fixe au niveau fédéral – qui est évidemment sans effet lorsque l‘équipe au pouvoir est minoritaire.
Du côté des provinces, l‘Ontario et la Colombie-Britannique ont opté pour des élections à date fixe. Elles auront lieu en octobre prochain chez nos voisins. Et en mai 2009 dans la province du Pacifique.
Vivement une pareille avancée démocratique au Québec !
Rappelons qu‘à l‘heure actuelle, le lieutenant-gouverneur en conseil (en pratique: le premier ministre) a toute la latitude voulue pour déclencher une élection générale au moment où il le juge opportun, d‘où la tentation pour le gouvernement sortant de convoquer les électeurs aux urnes à un moment qui lui serait favorable et au détriment de l‘intérêt public. Michel C. Auger soulevait également la question il y a quelques mois.
Rappelons également qu‘en plus de l‘Ontario et de la Colombie-Britannique dont parle M. Salvet dans son éditorial, Terre-Neuve-et-Labrador a également adopté une loi instaurant des élections à date fixe, le prochain scrutin sous l‘égide de cette loi étant prévu pour le deuxième mardi octobre 2007. Et sur la scène fédérale, le gouvernement Harper a déposé au printemps dernier le projet de loi C-16 (Loi modifiant la Loi électorale du Canada) qui, s‘il était adopté (et à moins d‘une défaite du gouvernement minoritaire en Chambre), fixerait la prochaine élection fédérale au 19 octobre 2009, puis aux quatre ans par la suite. Notons que le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique appuient ce projet de loi.
Michel Corbeil relate dans l‘édition du Soleil de ce matin les tractations qui auraient pu mener vers un événement rarissime à l‘Assemblée nationale, soit un député qui quitte son groupe parlementaire pour joindre un autre parti politique. Le député de Groulx, Pierre Descôteaux (LIB), aurait été approché par des membres de l‘État-major du Parti québécois afin de joindre l‘opposition officielle:
Le mardi 12 décembre 2006
PASSAGE DU PLQ AU PQ
Le député Descôteaux nie les rumeurs
Michel Corbeil
Le Soleil
Québec
Le député libéral de Groulx, Pierre Descôteaux, nie formellement la rumeur voulant qu‘il songe à traverser le parquet de la Chambre à l‘Assemblée nationale pour se joindre au Parti québécois.
L‘élu s‘est amusé d‘être approché à ce sujet. « C‘est rare qu‘un journaliste appelle un député d‘arrière-banc », a-t-il blagué.
« Si j‘étais sollicité par le PQ, je m‘en serais vanté », a-t-il ajouté. Il a signalé qu‘il comprend bien le jeu politique, même s‘il n‘a pas une longue expérience comme député.
Selon les bruits qui sont parvenus au Soleil, des tractations avaient eu lieu au plus haut niveau, ces derniers jours. Certains ont même affirmé que le député de Groulx, une circonscription au nord de Montréal, avait rencontré son chef, Jean Charest, et un conseiller du leader péquiste André Boisclair.
On a souvent vu un député démissionner (ou être démissionné!) de son parti politique afin de siéger en chambre comme député indépendant, mais le fait de passer directement d‘un parti à un autre est très peu fréquent à l‘Assemblée nationale. Les derniers événements de ce type remontent à la 31e législature (1976-1981), le député de Huntingdon, Claude Dubois (UN), ayant quitté l‘Union nationale en septembre 1979 afin de joindre le Parti libéral du Québec, tandis qu‘un an plus tard, le député de Rouyn-Noranda et chef du Parti démocrate créditiste, Camil Samson (CS), joignait également les libéraux. Pour sa part, le député de Lotbinière, Rodrigue Biron (ind.), avait démissionné comme chef de l‘Union nationale en mars 1980 et siégé comme député indépendant avant de joindre le PQ en novembre 1980.
Plus récemment, en août 1992, le député de Westmount, Richard B. Holden (ind.), annonçait qu‘il joignait le groupe parlementaire du Parti québécois, mais il s‘était écoulé près d‘un an entre sa démission du Parti égalité et son adhésion au PQ. Par ailleurs, le 2 mars 1994, le député d‘Iberville, Yvon Lafrance (ind.), qui avait quitté le Parti libéral du Québec un mois plus tôt, annonçait qu‘il siégerait comme député de l‘Action démocratique du Québec. L‘ADQ ne constituait toutefois pas un groupe parlementaire reconnu en chambre, n‘ayant pas encore participé à un scrutin à l‘époque.
Dans un registre plus positif, l‘hebdo Le Reflet de Delson a publié récemment dans ses pages un article démystifiant le travail d‘attaché politique dans un bureau de circonscription.
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