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Les politologues Éric Bélanger (Université McGill) et Richard Nadeau (Université de Montréal), ont publié récemment une rareté au Québec: un ouvrage scientifique portant sur les comportements électoraux au Québec. Nous disons bien rareté puisqu’il existe peu d’ouvrages généraux en science politique consacrés à la problématique des comportements de l’électorat québécois sur la scène provinciale, à part peut-être Comportement électoral au Québec, qui date de 1984, et quelques ouvrages qui se concentrent sur un seul scrutin (élection générale ou référendum). L’inexistence d’une étude électorale québécoise n’est certainement pas de nature à nous aider à avoir un portrait sérieux et constant des principaux déterminants du vote au sein de l’électorat québécois.
Aussi, souhaitons que l’ouvrage de Bélanger et Nadeau, qui ont tous les deux consacrés leurs travaux sur le vote et sur la politique canadienne et québécoise, soit le premier jalon vers une étude plus systématique des comportements électoraux des Québécois et vers l’établissement d’une véritable étude électorale québécoise inspirée du modèle américain ou britannique (Richard Nadeau a d’ailleurs un des codirecteurs de l’Étude électorale canadienne il y a quelques années).
Nous ne manquerons pas de commenter cet ouvrage lorsque nous en aurons terminé la lecture, qu’il suffise de préciser pour l’instant que l’ouvrage porte sur les élections générales de 2007 et 2008 et que les observations des auteurs sont basées sur des enquêtes réalisées immédiatement après chaque scrutin. En attendant, voici la recension qu’en a fait le chroniqueur Louis Cornellier du Devoir il y a une dizaine de jours.
Richard Nadeau et Éric Bélanger (2009), Le comportement électoral des Québécois, Montréal: Presses de l’Université de Montréal, ISBN 978-2-7606-2132-9. Poursuivez la lecture de «Le comportement électoral des Québécois»→
Voici quelques observations préliminaires sur l’élection générale d’hier:
- En nombres absolus, le nombre de votes obtenus par le PQ et les libéraux a subi une légère hausse depuis 2007 (+50 000 pour les libéraux, +15 000 pour le PQ). C’est l’ADQ qui a subi une baisse importante (-700 000 votes environ).
- Taux de participation de 57,33%: le pire depuis 1927 (56,38%). Et encore, en 1927, il y avait eu 12 députés élus par acclamation. Si les électeurs de ces 12 comtés avaient eu l’opportunité de voter, on aurait aisément dépassé le score d’hier.
- Angus Reid a vu juste. Leur sondage donnait 42-36 entre le PLQ et le PQ. C’est ici que vous l’aurez (probablement) lu en premier, samedi soir dernier (certains animateurs de sites de projection ont même appris l’existence de ce sondage par notre entremise).
- Avec 66 sièges, il faudrait seulement une perte de 4 sièges pour que le Parti libéral redevienne minoritaire de facto. Il sera intéressant de voir s’ils seront frappés par le «syndrome du 2e mandat» (dans ce cas-ci, le 3e) qui frappe les partis gouvernementaux depuis une trentaine d’années:
- sous le 2e mandat du PQ de 1998-2003, le PQ avait perdu 9 sièges entre le début et la fin de la législature;
- sous le 2e mandat libéral de 1989-1994, le PLQ avait perdu 14 sièges entre le début et la fin de la législature (sauf qu’à la dissolution, il y avait 8 sièges vacants);
- sous le 2e mandat du PQ de 1981-1985, le PQ avait perdu 20 sièges entre le début et la fin de la législature, à un point tel qu’à la dissolution, il y avait égalité 60-60 entre les députés péquistes et ceux de l’opposition (53 libéraux et 7 indépendants).
- Ah! Les joies du mode de scrutin:
- Le PLQ finit avec 7% d’avance sur le PQ, mais vu les nombreuses luttes serrées, quelques milliers de voix bien placées auraient pu transformer cette victoire libérale en victoire péquiste.
- L’ADQ a moins de voix qu’en 2003, mais 3 députés de plus que lors de cette élection (7 en 2008 vs 4 en 2003).
- QS voit ses appuis baisse légèrement entre 2007 et 2008, mais a fait élire son premier député hier.




Traditionnellement, la circonscription de Saint-Jean était considérée comme la circonscription baromètre par excellence puisqu’à chaque élection générale depuis 1944 (1939, si on compte la brève période où elle était incluse dans Saint-Jean–Napierville), elle a élu un député issu du parti formant le gouvernement. En 1994, les électeurs de Saint-Jean ont même poussé le scrupule jusqu’à mettre les candidats péquiste et libéral à égalité alors que 0,35% d’écart séparait les 2 partis au niveau national, forçant ainsi la tenue d’une élection partielle pour les départager. Mais ça, c’était avant la dernière élection générale puisqu’en 2007, Saint-Jean avait élu un député adéquiste.
Outre le comté de Saint-Jean, dont on ne peut plus dire désormais qu’il est «infaillible», y a-t-il d’autres comtés qui suivent les grandes tendances électorales au Québec? Si on excepte les élections partielles, il y a 5 circonscriptions qui, outre Saint-Jean, vote systématiquement du «bon bord» depuis 30-40 ans. Comme vous constaterez, la région de Laval est très bien pourvue en matière de comtés baromètres:
- Fabre: élit un député du parti gouvernemental depuis 1970
- Louis-Hébert: depuis 1970
- Mille-Îles: depuis 1973 (mais en 1970, cette circonscription était encore incluse dans Laval, qui avait alors élu un député libéral)
- Laval-des-Rapides: depuis 1981
- Vimont: depuis 1981.
Inutile de dire que ce sont des circonscriptions que nous surveillerons de près demain soir.
L’inquiétude envers le taux de participation le 8 décembre prochain est devenu un thème récurrent de la présente campagne électorale. Pour se consoler, on a écrit à quelques reprises (dans les journaux notamment) que «c’était bien pire dans le temps» puisque, par exemple, 27% des électeurs seulement avaient pris la peine de voter lors de l’élection générale de 1919.
Ce genre d’affirmations tout être replacé en contexte car ce qu’on oublie souvent de mentionner, c’est qu’avant les années 1930, le phénomène des élections «sans opposition» ou «par acclamation» (c’est-à-dire une élection où il n’y a qu’un seul candidat qui est déclaré élu dès la fin de la période de mise en candidature) était courant lors des scrutins au Québec.
À titre d’exemple, en 1919, 43 candidats libéraux avaient été élus par acclamation, ce qui assurait au Parti libéral une majorité d’élus en Chambre avant même que ne débute le scrutin. Or, cette situation avait un effet direct sur le taux de participation puisque plus de la moitié des électeurs inscrits n’avait tout simplement pas à voter. C’est ce qui explique le faible taux de participation de 27,30% cette année là.
L’élection générale de 1919 est un cas extrême, mais à chaque élection générale entre 1867 et 1927 (plus 1935 et 1939), il y a eu au moins 1 député élu par acclamation.

En réalité, comme le démontre le graphique ci-dessous, lorsqu’on tient compte uniquement des circonscriptions où il y a eu un scrutin, le taux de participation est rarement tombé sous les 60% depuis 1867. Et depuis 1931, le taux de participation n’est jamais tombé sous les 70%. Par exemple, en 1867, le taux officiel était de 46,84%, mais le taux réel dans les circonscriptions où il y a eu un scrutin dépasse les 66% (19 députés sur 65 avaient été élus par acclamation). Et si on reprend notre exemple de 1919, le taux de participation s’élève à 54,5% dans les circonscriptions où il y a eu un scrutin. Ce taux (qui reste plus bas que la moyenne) s’explique probablement par le fait que l’élection dans les 36 circonscriptions où il y avait 2 candidats ou plus était devenue «inutile», vu la majorité déjà garantie pour les libéraux.

Ah! La magie des trackbacks! Un rétrolien du blogue de Renart Léveillé vers notre article de ce matin sur le dernier sondage CROP nous a permis de découvrir le tout récent mémoire de maîtrise (janvier 2008) de François Yale, étudiant au département de sociologie à l‘Université de Montréal, dont le titre est «L‘évolution de l‘appui à la souveraineté du Québec: effets de la formulation de la question et effets de contexte». À lire absolument pour celles et ceux qui s‘intéressent à la méthodologie des sondages et/ou qui ne veulent pas faire de raisonnements et d‘extrapolations trop boiteuses lorsqu‘ils en lisent un. L‘auteur résume son mémoire comme suit:
Cette recherche étudie l‘évolution de l‘appui à la souveraineté du Québec entre 1976 et aujourd‘hui, en considérant les diverses formulations de la question utilisées par les acteurs politiques et par les sondeurs.
Cette question est abordée en faisant une analyse longitudinale multiniveaux de plus de 800 sondages. Une telle approche suggère que les caractéristiques des sondages sont nichées à l‘intérieur d‘unités contextuelles plus larges, des unités de temps. Cela permet d‘une part d‘observer quels sont les facteurs liés à la mesure qui influencent l‘appui à la souveraineté du Québec et ensuite de voir comment ces mêmes effets varient à travers le temps et comment ils sont influencés par certains événements jugés importants.
Il ressort de ces analyses que les propositions séparation, indépendance, souveraineté et souveraineté-association/partenariat entraînent généralement des appuis moyens significativement différents les uns des autres. Il apparaît aussi que certains événements ont eu une influence significative sur l‘évolution de l‘appui à ces diverses propositions. Enfin, il a été tenté de voir si les appuis propres à ces diverses propositions évoluaient de manière parallèle, s‘ils réagissaient similairement aux différents événements considérés dans les analyses ou si au contraire ces appuis pouvaient parfois évoluer de manière différente. Les résultats à cet égard sont intéressants mais non concluants.
Ces observations sur l‘effet de formulation dans les sondages sur la souveraineté sont loin d‘être révolutionnaires puisque ce phénomène est étudié depuis fort longtemps, notamment par Maurice Pinard. L‘intérêt du mémoire provient du fait qu‘il porte sur un échantillon de plusieurs centaines de sondages (800 en fait) sur une période de plus de 30 ans prenant fin tout récemment (novembre 1976 à juin 2007). L‘autre partie du mémoire sur l‘effet de contexte est en quelque sorte une lapalissade (c‘est sûr que le positionnement des répondants d‘un sondage est en partie en réaction à l‘actualité de l‘époque où il est réalisé), mais c‘est une démarche incontournable si on veut isoler l‘effet de la formulation pour expliquer les variations des résultats.
Ceci est un prétexte pour rappeler une vérité élémentaire concernant les sondages d‘opinion que tous ont parfois tendance à oublier (et nous nous incluons dans le lot): toute comparaison entre 2 sondages équivaut à comparer des pommes avec des oranges lorsqu‘ils ne sont pas réalisés selon une méthode similaire, surtout en ce qui a trait à la formulation des questions. S’agissant de la question nationale, rappelons que depuis le milieu de la décennie (2006 chez Léger Marketing, 2007 chez CROP), les grandes maisons de sondage questionnent les gens sur la souveraineté et non plus sur la souveraineté-partenariat comme on le faisait depuis 1995, ce qui suffit à rendre toute analyse des tendances à long terme plutôt risquées. Cette mise en garde ne s‘applique pas seulement aux sondages sur la souveraineté, mais sur toute question, même sur une question aussi anodine et standard que les intentions de vote lors des élections générales, où le libellé de la question ou les partis mentionnés dans le choix de réponse peuvent avoir un impact significatif sur les résultats (d‘ailleurs, il y a un peu plus d‘un an, nous commentions des études réalisées sur le sujet).
Voilà , c‘était notre chronique éteignoir du vendredi.
Il y a du nouveau depuis hier dans la section Élections par circonscription de ce site: les résultats électoraux (élections générales et partielles) dans chaque circonscription électorale depuis 1900* sous forme de graphique. Comme une image vaut 1000 mots, cette nouvelle fonctionnalité (assez banale à première vue, mais mine de rien, c‘est assez long à compiler et à monter dans 180 circonscriptions) permet de visualiser les variations dans l‘appui aux principaux partis au cours de l‘histoire. En voici un exemple ci-dessous:

*Pourquoi à partir de 1900 et pas avant? Merci de poser la question. C‘est tout simplement parce que la fonction «échelle chronologique» des graphiques d‘Excel ne débute qu‘au 1er janvier 1900.
Le Soleil publiait aujourd‘hui un article de Louis Massicotte, professeur en science politique à l‘Université Laval, portant sur la question de la refonte de la carte électorale au Québec. Il s‘agit en fait d‘une version écourtée de sa présentation lors de la 6e Conférence Jean-Charles-Bonenfant qui avait lieu à l‘Assemblée nationale le 16 novembre dernier sous le thème Comment dessiner une carte électorale équitable? En résumé, M. Massicotte traite des grandes étapes de l‘histoire du processus de confection de la carte électorale au Québec et des 2 grandes approches qui se sont affrontées depuis le 19e siècle et qui s‘affrontent encore aujourd‘hui: l‘approche territoriale, qui met l‘accent sur les «communautés naturelles» au sein desquelles le député doit être appelé à travailler durant son mandat, et l‘approche démographique, qui tend à rechercher la plus grande égalité possible entre les circonscriptions (en termes de nombre d‘électeurs) afin de s‘assurer que le vote de chaque électeur ait un poids le plus égal possible.
L‘ensemble de la conférence, incluant l‘intégrale de l‘allocution de M. Massicotte, peut être visionnée ici. La vidéo dure un peu plus de 1 heure 30. Poursuivez la lecture de «2 visions de la carte électorale»→
Nous avions peur de nous ennuyer pendant le temps des fêtes, mais heureusement que le directeur général des élections est là pour nous donner quelques lectures supplémentaires entre la dinde et la tourtière!
Il y a 1 an, le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, Benoît Pelletier (LIB), consultait le DGE afin d‘obtenir son avis sur un certain nombre de modalités entourant l‘adoption éventuelle d‘un mode de scrutin mixte proportionnel pour élire les députés à l‘Assemblée nationale: l‘attribution des sièges de région calculée sur la base des régions administratives, et non de districts regroupant des circonscriptions contiguës; des listes régionales de candidats des partis politiques établies en fonction de l‘alternance femmes-hommes; l‘interdiction de la double candidature; l‘utilisation de deux votes plutôt que d‘un seul et l‘introduction de mesures financières incitatives qui s‘appliquent aux élus seulement et non plus aux candidats et candidates
Le rapport issu de cette consultation, intitulé Les modalités d‘un mode de scrutin mixte compensatoire, a été rendu public hier. Résumé de 18 pages (format pdf), 260 pages de rapport (format pdf) et 150 pages d‘annexes (format pdf): oui, le rapport est aussi dense qu‘il en a l‘air, tellement que pas moins de 5 communiqués ont été publiés pour en résumer le contenu (1, 2, 3, 4 et 5). Notons tout de même l‘idée ingénieuse de réaliser des simulations à partir d‘un modèle théorique plutôt qu‘à partir des résultats des élections générales antérieures. Cela est susceptible d‘augmenter les probabilités que le lecteur se fasse une opinion sur les diverses options en présence en fonction de leur mérite propre plutôt qu‘en fonction de l‘option susceptible de favoriser le parti politique qu‘il appuie généralement.
Pour vous mettre en contexte, nous vous suggérons de lire cet article de Denis Lessard, paru mercredi dernier dans La Presse, où il brosse un portrait des démarches gouvernementales concernant le mode de scrutin depuis 2003 ainsi que des enjeux entourant le débat.
Communiqué
Communiqué no 1 – Rapport du DGE sur le mode de scrutin
Le DGE rend public son rapport sur un mode de scrutin
Québec, le 21 décembre 2007 – Le Directeur général des élections du Québec, Me Marcel Blanchet, rend public un rapport portant sur les modalités d‘un mode de scrutin mixte compensatoire et sur d‘autres questions connexes. Le DGE répond ainsi au mandat que lui a confié en décembre 2006, le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques, M. Benoît Pelletier, au nom du gouvernement. Ce dernier avait en effet utilisé une disposition de la loi lui permettant de consulter le Directeur général des élections, à la suite des travaux de la Commission spéciale sur la Loi électorale portant sur un projet de réforme du mode scrutin déposé en 2004 à l‘Assemblée nationale. On se souviendra la Commission n‘avait pu établir de consensus au sujet de certaines modalités du mode de scrutin proposé.
« Les architectes d‘un éventuel mode de scrutin mixte compensatoire doivent faire des choix, a précisé Me Blanchet, et le rapport du DGE éclairera les élus ainsi que toutes les personnes intéressées, quant aux conséquences de certains de ces choix. » L‘exercice réalisé par le Directeur général des élections consistait donc à voir comment pourrait fonctionner un mode de scrutin mixte compensatoire et quels seraient notamment les effets des changements proposés sur la proportionnalité des résultats, la représentation des femmes et des minorités, sur la représentation des régions et sur celle des petits partis.
Un modèle théorique et des simulations statistiques
Comment «faire fonctionner» un mode de scrutin qui n‘existe pas au Québec, de façon à «le voir en action» et à prévoir ses différents impacts possibles? Pour y arriver, le DGE a conçu un modèle théorique en collaboration avec différents spécialistes des mathématiques et des sciences politiques. L‘idée de «tester» le mode de scrutin avec des résultats d‘élections antérieures n‘a pas été retenue : d‘une part pour produire l‘analyse la plus neutre et la plus impartiale possible et, d‘autre part, parce qu‘on ne retrouve pas dans les scrutins québécois, des modalités qu‘il était nécessaire d‘inclure dans l‘analyse, comme le fait de voter deux fois. Le modèle théorique a donc permis de créer une sorte de « laboratoire » où l‘on a pu notamment tester :
- trois types de compensation;
- des façons d‘élire les députés qui feraient en sorte que la répartition des élus représenterait plus ou moins les pourcentages de votes exprimés (le caractère « proportionnel » de la représentation);
- des méthodes de calcul pour attribuer les sièges de compensation (qui seraient attribués à des « députés de liste », lesquels s‘ajouteraient à des « députés de circonscription » choisis selon le mode majoritaire traditionnel);
- des seuils de représentation (des pourcentages minimaux de vote qu‘un parti devrait obtenir pour avoir droit à des sièges de liste);
- des hypothèses en vertu desquelles l‘électrice ou l‘électeur exerce un vote ou deux votes pour élire les députés de circonscription et les députés de liste.
C‘est en procédant à des simulations statistiques, en collaboration avec l‘Institut de la statistique du Québec, que l‘on a appliqué le modèle théorique. « Nous avons ainsi fait appel à des mathématiciens statisticiens à qui nous avons soumis divers scénarios », a précisé Me Blanchet. « Cela nous amenait inévitablement sur un terrain très spécialisé, mais c‘était la meilleure façon d‘obtenir des réponses éclairantes, et de voir quels impacts les modalités d‘un mode de scrutin mixte compensatoire pouvaient avoir », a ajouté le DGE.
Les consultations effectuées au Québec et l‘expérience internationale
Le rapport du DGE sur le mode de scrutin mixte compensatoire fait également écho aux consultations qui ont suivi le dépôt de l‘avant-projet de loi sur la Loi électorale. Tous les mémoires soumis en 2005 et 2006 à la Commission spéciale sur la réforme de la Loi électorale ont été réexaminés. La documentation émanant des États généraux sur la réforme des institutions démocratiques qui se sont déroulés au début de 2003, et de la consultation publique qui les avait précédés, a aussi été passée en revue.
L‘examen des différentes modalités du mode de scrutin mixte compensatoire a en outre été alimenté par des recherches réalisées par divers experts internationaux. De plus, le DGE a compilé un inventaire de nombreuses expériences vécues dans les provinces canadiennes et dans différents pays, et qui avaient un lien avec le projet québécois.
Toute cette recherche documentaire, autant au Québec, au Canada, qu‘à l‘international, a permis de compléter les informations recueillies lors des simulations statistiques.
Les «autres questions» abordées par le DGE et sa position quant aux choix à effectuer
Le mandat confié par le gouvernement au DGE était «ouvert», puisqu‘il permettait au Directeur général des élections de « proposer toute suggestion ou modalité apparaissant appropriée afin d‘atteindre l‘objectif d‘une Assemblée nationale qui représente mieux la diversité des opinions politiques et des volontés de l‘électorat québécois».
Le rapport rendu public aujourd‘hui va donc plus loin que ne le demandait le ministre, en étudiant certains impacts particuliers d‘un mode de scrutin mixte compensatoire et en abordant la question du nombre de députés à l‘Assemblée nationale. Sur le strict plan de l‘administration des scrutins, le document revient par ailleurs sur l‘idée de voter le dimanche plutôt que le lundi, en plus de répondre au souhait du ministre d‘examiner l‘idée de tenir des élections à date fixe au Québec.
Finalement, il est important de souligner que s‘il se prononce sur de nombreux sujets en termes «d‘avantages et d‘inconvénients», le rapport du DGE demeure avant tout une source d‘analyses et de renseignements ayant pour but d‘éclairer celles et ceux qui prendront les décisions quant à d‘éventuelles modifications du mode de scrutin québécois. «Le DGE ne prétend pas se substituer au législateur, a voulu réaffirmer Me Blanchet, car la façon d‘élire les députées et les députés, ainsi que la représentation des électrices et des électeurs à l‘Assemblée nationale, sont porteuses d‘enjeux extrêmement importants qui doivent faire l‘objet de décisions qui appartiennent avant tout aux citoyens et aux élus.»
Le rapport du Directeur général des élections sur les modalités d‘un mode de scrutin mixte compensatoire est accessible sur le site Web du DGE à l‘adresse www.electionsquebec.qc.ca.
– 30 –
À la veille de la période de mise en candidature pour les élections scolaires du 4 novembre prochain (les candidats ont jusqu‘à demain à 17h pour produire leur déclaration de candidature), voici quelques chiffres sur les mises en candidature et la participation électorale lors des deux dernières élections scolaires au Québec (commissions scolaires francophones et anglophones), soit celles de 1998 et de 2003 (source: Ministère de l‘Éducation, du Loisir et du Sport):
Ensemble du Québec |
|
1998 |
2003 |
Circonscriptions électorales scolaires |
1 305 (100%) |
1 311 (100%) |
Candidats élus sans opposition |
716 (54,9%) |
913 (69,6%) |
Circonscriptions avec aucun candidat |
0 (0,0%) |
8 (0,6%) |
Circonscriptions en élection |
589 (45,1%) |
396 (30,2%) |
Candidats |
1 324 |
840 |
Électeurs inscrits |
3 025 882 |
2 221 890 |
Vote exercé |
465 601 |
187 632 |
Taux de participation |
15,4% |
8,4% |
Commissions scolaires francophones |
|
1998 |
2003 |
Circonscriptions électorales scolaires |
1 142 (100%) |
1 148 (100%) |
Candidats élus sans opposition |
654 (57,3%) |
795 (69,3%) |
Circonscriptions avec aucun candidat |
0 (0,0%) |
4 (0,3%) |
Circonscriptions en élection |
488 (42,7%) |
354 (30,8%) |
Candidats |
1 085 |
747 |
Électeurs inscrits |
2 764 455 |
2 118 095 |
Vote exercé |
326 108 |
172 436 |
Taux de participation |
11,8% |
8,1% |
Commissions scolaires anglophones |
|
1998 |
2003 |
Circonscriptions électorales scolaires |
163 (100%) |
163 (100%) |
Candidats élus sans opposition |
62 (38,0%) |
118 (72,4%) |
Circonscriptions avec aucun candidat |
0 (0%) |
4 (2,5%) |
Circonscriptions en élection |
101 (62,0%) |
42 (25,8%) |
Candidats |
239 |
93 |
Électeurs inscrits |
261 427 |
103 795 |
Vote exercé |
139 493 |
15 196 |
Taux de participation |
53,4% |
14,6% |
Notons qu‘au moment d‘écrire ces lignes, il y avait déjà 1 044 candidats inscrits officiellement en vue des élections du 4 novembre prochain, ce qui excède déjà le nombre de candidats en lice en 2003 (source: DGE).
Comme nous l‘avions déjà indiqué hier en conclusion de notre billet sur l‘abstention lors d‘élections partielles où un chef de parti politique est dans la course (ça fait long pour dire “donner une free ride”, mais bon), les électeurs du comté de Charlevoix qui ont voté pour le Parti libéral du Québec lors de la dernière élection générale pourront adopter quatre attitudes le 24 septembre prochain:
- S’abstenir de voter
- Voter pour le Parti québécois
- Voter pour un tiers parti
- Voter pour l‘Action démocratique du Québec (c‘est là l‘inédit de la situation: avoir la possibilité de voter pour deux partis représentés à l‘Assemblée nationale plutôt qu‘un seul)
Ça a l‘air banal dit comme ça, mais pour ceux qui sont dans cette situation, le choix n‘est pas nécessairement facile à faire, tant par attachement partisan qu‘en raison des conséquences que leur vote pourrait avoir sur l‘échiquier politique québécois (surtout si la lutte devient serrée). Et selon Le Soleil, les organisateurs du Parti libéral se questionnent encore sur la “consigne” à donner (s‘il y en a une) aux électeurs qui ont voté libéral le 26 mars dernier.
Petit commentaire sur la majorité de 1 663 de Rosaire Bertrand le 26 mars dernier: oui, ça semble court à première vue, mais une telle majorité n‘a pas le même poids selon qu‘elle se retrouve dans un comté de 33 000 électeurs comme Charlevoix ou dans un comté de 59 000 électeurs comme Chambly (et encore, nous ne parlons pas des Îles-de-la-Madeleine). Toutes proportions gardées, une remontée de 1 663 voix dans Charlevoix équivaut à une augmentation de près de 7% des voix par rapport à la dernière élection générale. Présenté comme ça, c‘est moins serré qu‘il n‘y paraît au premier abord. Il est vrai toutefois qu‘avec 6 541 électeurs libéraux “orphelins” (27% des suffrages en 2007), ça change passablement la donne. Poursuivez la lecture de «Les électeurs orphelins»→
Alors que le résultat de la prochaine élection partielle dans Charlevoix et que tous s‘interrogent sur le comportement électoral des électeurs libéraux en l‘absence d‘un candidat du Parti libéral du Québec, nous tenterons ici de vérifier quels phénomènes peuvent être observés lors d‘une élection partielle où un des principaux partis décide volontairement de ne pas présenter de candidat.
I. Méthodologie
- Pour les besoins de ce texte, nous n‘avons retenu que les trois élections partielles où, à notre connaissance, un parti politique s‘est volontairement abstenu de présenter un candidat afin de permettre au chef d‘une formation politique adverse de faire son entrée à l‘Assemblée nationale: Saint-Laurent en 1986, Jonquière en 1996 et Pointe-aux-Trembles en 2006 (pour plus de détails sur les chefs de partis qui font leur entrée en Chambre lors d‘une élection partielle, allez voir ici).
- Nous avons comparé les résultats obtenus lors de ces trois élections partielles avec ceux de l‘élection générale précédente (1985, 1994 et 2003) et ceux de la suivante (1989, 1998 et 2007).
- Pour mieux prendre en compte le phénomène d‘abstention électorale, nous afficherons ici le pourcentage d‘électeurs inscrits (% EI) obtenu par les principaux partis. Généralement au Québec, le résultat affiché est le pourcentage des bulletins valides (%BV).
- Le pourcentage de “non votants” ou “taux d‘abstention” est le contraire du “taux de participation”. Autrement dit, on l‘obtient en faisant la soustraction suivante: 100% – taux de participation.
- Par commodité, nous n‘avons pas inscrit le pourcentage de bulletins rejetés, mais nous en avons tenu compte dans nos calculs (c‘est pourquoi la somme de tous les pourcentages lors d‘une même élection ne donne pas 100%).
- Et avant qu‘un petit comique nous remette ceci sous le nez, voici une petite précision: ceci n‘est pas de l‘inférence écologique, en ce sens que nous ne tentons pas ici de présumer de comportements individuels en nous basant sur des données collectives (par exemple, si le parti X, qui avait 25% lors de la dernière élection générale, décide de passer son tour lors de l‘élection partielle suivante et que le taux de participation baisse de 25%, les 25% d‘électeurs additionnels qui s‘abstiennent de voter ne sont pas nécessairement tous des partisans du parti; certains partisans du parti X peuvent voter pour le parti Y, et d‘autres partisans du parti Y peuvent décider de ne pas voter, phénomène qui ne peut être observé avec des données macro). Comme nous l‘avons déjà expliqué, on peut observer une variation du taux de participation lors de l‘absence d‘un parti X, mais ça ne veut pas nécessairement dire que le taux de participation varie parce qu‘il y a absence d‘un parti X. Pour plus de détails sur la différence entre un lien de corrélation et un lien de causalité, allez lire ceci.
II. Saint-Laurent: élection partielle du 20 janvier 1986
Contexte: élection tenue afin de permettre au premier ministre Robert Bourassa (LIB), défait dans sa circonscription lors de l‘élection générale du 2 décembre 1985, de faire son entrée à l‘Assemblée nationale. Le Parti québécois ne lui oppose pas de candidat.
Résultats électoraux
Saint-Laurent (1985-1989) |
|
LIB |
ADQ |
PQ |
Aut. |
N.V. |
Élection générale 1985 |
53,0% |
s.o. |
14,4% |
4,0% |
27,6% |
Élection partielle 1986 |
37,7% |
s.o. |
0,0% |
7,9% |
53,8% |
Élection générale 1989 |
38,0% |
s.o. |
13,6% |
21,3% |
25,9% |
Variation (1985-1986) |
-15,3% |
s.o. |
-14,4% |
3,9% |
26,2% |

III. Jonquière: élection partielle du 19 février 1996
Contexte: élection tenue afin de permettre au premier ministre Lucien Bouchard (PQ), assermenté premier ministre trois semaines plus tôt, de faire son entrée à l‘Assemblée nationale. Le Parti libéral du Québec et l‘Action démocratique du Québec ne lui opposent pas de candidat.
Résultats électoraux
Jonquière (1994-1998) |
|
LIB |
ADQ |
PQ |
Aut. |
N.V. |
Élection générale 1994 |
20,8% |
0,0% |
53,9% |
3,0% |
20,0% |
Élection partielle 1996 |
0,0% |
0,0% |
59,4% |
3,3% |
39,0% |
Élection générale 1998 |
14,8% |
3,8% |
46,1% |
11,6% |
23,1% |
Variation (1994-1996) |
-20,8% |
0,0% |
5,5% |
0,3% |
19,0% |

IV. Pointe-aux-Trembles: élection partielle du 14 août 2006
Contexte: élection tenue afin de permettre au chef du Parti québécois, André Boisclair, élu à la direction du parti neuf mois plus tôt, de faire son entrée à l‘Assemblée nationale. Le Parti libéral du Québec et l‘Action démocratique du Québec ne lui opposent pas de candidat.
Résultats électoraux
Pointe-aux-Trembles (2003-2007) |
|
LIB |
ADQ |
PQ |
Aut. |
N.V. |
Élection générale 2003 |
23,6% |
10,1% |
35,7% |
1,7% |
27,7% |
Élection partielle 2006 |
0,0% |
0,0% |
22,4% |
9,2% |
67,7% |
Élection générale 2007 |
13,1% |
19,0% |
34,0% |
5,8% |
27,1% |
Variation (2003-2006) |
-23,6% |
-10,1% |
-13,3% |
7,5% |
40,0% |

V. Observations
- Dans les trois cas étudiés, le taux d‘abstention ou de “non votants” augmente sensiblement, mais c‘est un phénomène généralisé dans à peu près toutes les élections partielles. Un beau jour, quand ça adonnera, nous tenterons de voir si l‘absence d‘un parti politique majeur lors d‘une partielle peut causer une hausse plus marquée du taux d‘abstention par rapport à d‘autres partielles.
- Dans les trois cas étudiés, lorsque l‘appui envers un des partis “restants” varie, c‘est une variation marginale, et pas toujours à la hausse. Le taux de participation varie beaucoup plus.
- Généralement, lors de l‘élection générale suivante (1989, 1998, 2007), la situation revient à peu près à ce qui prévalait lors de l‘élection générale “initiale” (1985, 1994, 2003), et les disparités entre les deux élections générales s‘expliquent indépendamment de la tenue d‘une élection partielle entre les deux (ex.: apparition du Parti égalité dans les comtés avec une certaine présence anglophone entre 1985 et 1989; l‘ADQ qui présente des candidats dans tous les comtés en 1998, contrairement à 1994; montée de l‘ADQ entre 2003 et 2007).
- Le cas de la prochaine élection partielle dans Charlevoix varie des trois cas précédents, en ce sens que ce ne sont pas tous les partis représentés à l‘Assemblée nationale qui donneront une “free ride” afin de permettre à un chef de parti de devenir député. Contrairement aux autres fois, en dépit du choix de leur chef de “faciliter” le retour de Pauline Marois à l‘Assemblée nationale, les électeurs libéraux ont donc un choix autre que de s‘abstenir, de voter pour un tiers parti ou d‘appuyer Mme Marois (et Jean-Guy Bouchard, candidat défait (LIB) lors de la dernière élection générale, qui aurait voulu tenter à nouveau sa chance dans Charlevoix, a sa petite idée de ce qu‘ils feront). En un sens, c‘est un cas à mi-chemin entre une élection où le chef a une “free ride” et une autre où il doit rivaliser avec tous les partis significatifs.
- Évidemment, si nous avions des micro-données permettant de savoir comment un même individu a voté lors d‘un des trois cas de figure ci-dessus (ce qui n‘est pas le cas ici), nous serions en mesure de confirmer ce que font vraiment les partisans d‘un parti politique donné lorsqu‘ils n‘ont pas de candidat du même parti à appuyer lors d‘une élection partielle.
Si nous étions titreurs au Soleil, c‘est le titre que nous aurions choisi (cliché, certes, mais tellement vrai dans ce cas-ci) pour cet article portant sur les plus récents travaux d‘Henry Milner sur le niveau de connaissance des enjeux politiques chez les Nord-Américains et qui tendent à démontrer que les jeunes Québécois francophones (pourquoi segmenter les Québécois entre francophones et anglophones?) sont plus politisés que leurs aînés, plus politisés que les jeunes d‘ailleurs en Amérique du Nord, mais avec un taux de politisation “assez bas”. À première vue, voilà des données qui vont dans le même sens (pour le Québec en tout cas) qu‘une autre étude réalisée récemment par Statistique Canada et dont nous vous parlions il y a quelques semaines.
À lire cet automne dans une bibliothèque universitaire près de chez-vous. Poursuivez la lecture de «Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois»→
OK tout le monde, on va respirer par le nez deux petites minutes.
Ce matin paraissant dans Le Soleil cet article de Michel Corbeil dans lequel il cite les résultats d‘une étude réalisée par le Parti québécois sur les résultats de l‘élection générale du 26 mars dernier. En gros, on a calculé la moyenne d‘âge dans chaque circonscription puis on a tenté de faire un lien entre la moyenne d‘âge et les partis politiques ayant remporté chaque circonscription. d‘où la grosse conclusion: les jeunes voteraient pour l‘ADQ et les vieux voteraient pour le PQ (soi dit en passant, ça n‘a rien de nouveau, David Gagnon avait fait la même chose il y a quelques mois sur son blogue Antagoniste.net). Depuis, tout ce qui grouille, scribouille et grenouille sur la blogosphère politique québécoise, des dessous de la politique à l‘homme en colère en passant par Patrick Lagacé, s‘affaire à tirer les conclusions les plus tranchées et les plus définitives sur une étude que personne n‘a lue, sauf Michel Corbeil (appel à tous: si quelqu‘un au PQ voulait bien nous envoyer une “enveloppe brune virtuelle” par courriel, nous sommes preneurs 😀 ).
Seulement, il y a un détail que tous semblent ignorer: d‘après ce qu‘on peut en connaître, il est loin d‘être certain que cette étude est valide sur le plan méthodologique. Si ça se trouve, nous venons d‘assister à l‘erreur la plus élémentaire, la plus “pee-wee” qui existe en méthodes quantitatives.
Pour faire une histoire courte avec une histoire longue, le procédé qui semble être employé dans l‘étude (selon les données dévoilées dans l‘article en tout cas) est l‘inférence écologique. Une erreur courante dans l‘emploi de cette méthode est d‘inférer sur des comportements individuels sur la base de données collectives en prenant pour acquis que tous les individus, sans exception, partagent les mêmes caractéristiques que celles de l‘ensemble du groupe. C‘est ce qu‘on appelle l‘erreur écologique ou ecological fallacy dont l‘existence fut démontrée dès le milieu du 20e siècle par le sociologue américain William Robinson qui, en tentant d‘étudier la relation entre le taux d‘alphabétisation et le pourcentage d‘immigrants dans chaque État américain, avait observé une différence majeure selon que le taux de corrélation était basé sur des données agrégées ou individuelles (pour plus de détails, voir Robinson, W.S. 1950. «Ecological Correlations and the Behavior of Individuals». American Sociological Review 15: 351–357). Il est vrai que depuis les années 50, les méthodes quantitatives en sciences sociales se sont beaucoup raffinées et certains chercheurs ont mis de l‘avant des solutions à la fois théoriques et techniques afin d‘effectuer ce type d‘inférence sous certaines conditions. Toutefois, ça ne fait pas l‘unanimité et ça demande une expertise très poussée que peu de gens possèdent en dehors des cercles universitaires, et rien n‘indique que les auteurs de l‘étude en font partie.
Conclusion: aucune donnée solide (méthodologiquement parlant) tirée de l‘étude citée par Michel Corbeil ne permet de confirmer l‘existence d‘un clivage générationnel sur la scène politique québécoise. Peut-être que ce clivage existe, mais pour s‘en assurer, ça prend des données recueillies à l‘échelle d‘observation appropriée, c‘est-à -dire l‘échelle individuelle. En d‘autres mots, ça prend un sondage.
Au risque de nous répéter, s‘il existait une étude électorale québécoise, sur le modèle des grandes enquêtes électorales universitaires, telles que les American National Election Studies ou les British Election Studies, nous pourrions avoir l‘heure juste avec des données fiables colligées et analysées par des chercheurs sérieux plutôt que de discuter d‘une étude dont on ne sait pas grand chose dans le fond, à commencer par son (ses?) auteur(s).
Bref, circulez, y a rien à voir! Poursuivez la lecture de «Vote générationnel? Pas si vite…»→
Le Soleil a publié hier une série d‘articles sur les “conclusions” à tirer du vote du 26 mars dernier, notamment en ce qui a trait aux comportements électoraux de certains segments de la population québécoise. d‘abord, Martin Pelchat, il parle des comportements électoraux dans les banlieues, particulièrement celle de Québec, citant notamment les travaux de géographie électorale de Paul Villeneuve, chercheur associé à l‘École supérieure d‘aménagement du territoire et de développement régional de l‘Université Laval, travaux donc nous avions d‘ailleurs parlé durant la dernière campagne électorale:
Le dimanche 29 avril 2007
LES LEÇONS DU 26 MARS
La banlieue a parlé…
Martin Pelchat
Le Soleil
Québec
C‘est un mouvement qui dépasse même les frontières de l‘Amérique du Nord qui a propulsé l‘ADQ à l‘avant-scène du Québec politique, il y a cinq semaines. Un mouvement qui prend sa source dans la montée des banlieues et qui, n‘en déplaise au PLQ et au PQ, n‘est pas près de s‘essouffler.
Le chercheur Paul Villeneuve en a vu les premiers signes après l‘élection de 2003, quand Mario Dumont a raflé 28 % des voix dans la capitale. En y regardant de plus près, la percée adéquiste dans le 450 devenait dès lors probable, dit-il. Et lorsqu‘il se tourne vers l‘avenir, M. Villeneuve a l‘œil sur Laval, où l‘ADQ a terminé deuxième dans quatre circonscriptions sur cinq le 26 mars. « S‘il y a un autre endroit au Québec qui passe à l‘ADQ, ça va être là je pense. »
L‘ADQ eut-elle pris ces quatre circonscriptions aux libéraux le 26 mars qu‘elle formerait aujourd‘hui le gouvernement.
Suburban strategy
« Suburban strategy » : ce sont les maîtres mots des succès adéquistes, estime ce chercheur associé à l‘école supérieure d‘aménagement du territoire et de développement régional de l‘Université Laval, qui, avant le dernier scrutin, avait analysé trois élections depuis 2003 à Québec dans une perspective de « géographie électorale ».
En examinant la distribution des résultats par bureaux de vote, il a constaté que le comportement électoral en banlieue était plus conservateur et adéquiste. « Si on regarde la prochaine élection et les années à venir, comme les banlieues et les milieux suburbains ont un taux de croissance de population plus élevé que les quartiers centraux, on peut donc penser qu‘il y a une tendance à ce que cette orientation augmente », disait-il quelques jours avant que Jean Charest ne lance la dernière course et bien avant que Mario Dumont ne remporte assez de sièges pour former l‘opposition officielle.
Comment expliquer cette tendance conservatrice de la banlieue ? Les valeurs du mode de vie de banlieue, royaume de la classe moyenne où chacun a sa maison et son auto, seraient plus associées au désir de contrôler sa vie, son milieu, le plus possible, explique M. Villeneuve. Plus grande ouverture au privé, que ce soit à l‘école, pour assurer la réussite de ses enfants, ou en santé. Désir de payer moins de taxes. Et un style de vie qui passe moins par les regroupements, par les stratégies collectives, plus populaires dans les centres-villes.
De Reagan à Blair
Ronald Reagan, le premier, a entrepris de courtiser les banlieusards avec sa « suburban strategy » à mesure que la population américaine se « suburbanisait ». Bill Clinton et ses démocrates lui ont emprunté la recette. Et même l‘Anglais Tony Blair. Le Québec n‘allait pas y échapper dans la mesure où la moitié de la population du Québec vit dans un milieu de banlieue, observe M. Villeneuve.
Il s‘agit donc pour un parti politique de développer un discours et des politiques qui répondent aux besoins de ce milieu de vie. Un des engagements typiques d‘une « suburban strategy » est de baisser les impôts. Ce qui fait par exemple que Mario Dumont aura bien du mal à voter contre celles que promet Jean Charest dans le prochain budget, estime M. Villeneuve. « Devant son électorat, il ne pourra pas s‘opposer à ça. »
Sur la foi des résultats dans le 450, notamment de la percée adéquiste en Montérégie jusqu‘à Huntingdon, près de la frontière américaine, Paul Villeneuve avance aussi que les thèmes privilégiés par Mario Dumont correspondent mieux au système de valeurs « des gens qui vivent dans le monde des PME », peu syndiquées et plus hostiles à l‘intervention de l‘État. Dans cette région s‘est d‘ailleurs développée une agriculture industrielle prospère, souligne-t-il. « Sur les routes de campagne, on rencontre des camions de livraison qui vont d‘une PME à l‘autre », ajoute le géographe. En Beauce et dans le centre du Québec aussi, où l‘ADQ a cartonné, les PME sont reines. « C‘est dans ce milieu que l‘ADQ obtient du succès », dit-il.
Comme si Mario Dumont avait fait sa niche entre la ville et les régions-ressources, qui ont voté pour le PQ et où prédominent encore la grande industrie et les grands syndicats collectivistes.
Et Québec, ville de fonctionnaires ? N‘oublions pas que la région, pour pallier à la réduction de l‘État, a entrepris une reconversion industrielle et contribue beaucoup à la nouvelle économie, souligne Paul Villeneuve. Mais non sans noter que la vague adéquiste s‘y est heurtée à une poche de résistance dans le tissu plus urbain, comme dans Taschereau.
Quant à Gilbert Lavoie, il parle du vote de la clientèle étudiante dans les résidences des campus universitaires et semble faire l‘adéquation “vote pour le PQ=appui au gel des frais de scolarité” et “vote libéral et ADQ=appui au dégel”. Ça nous semble un peu simpliste comme conclusion, comme si les étudiants dans leur ensemble votaient uniquement en fonction d‘un seul enjeu qui les concerne directement. De plus, il ne faut pas perdre de vue le fait que les étudiants résidant sur un campus universitaire n‘ont pas nécessairement les mêmes caractéristiques socio-économiques que ceux qui résident hors-campus (donc, les comportements électoraux peuvent varier entre les deux). Bref, Gilbert Lavoie semble manquer de prudence ici: Poursuivez la lecture de «Analyses électorales du 26 mars»→
Après la Colombie-Britannique et l‘Île-du-Prince-Édouard, l‘Ontario sera la troisième province à tenir un référendum sur la réforme du mode de scrutin. L‘Assemblée des citoyens sur la réforme électorale de l‘Ontario a en effet décidé aujourd‘hui de recommander à la population ontarienne l‘adoption d‘un nouveau mode de scrutin de type proportionnel:
Après plusieurs mois d‘apprentissage, de consultation et de délibération, la première assemblée de citoyens de la province a décidé de recommander l‘adoption d‘un nouveau système électoral en Ontario : un système de représentation proportionnelle mixte.
L‘Assemblée s‘est employée à déterminer quels principes nous tiennent le plus à cœur, lorsqu‘il s‘agit de notre système électoral, et a pesé les diverses options qui en découlent. Ce processus a permis aux citoyens de s‘exprimer directement sur le choix que nous devons avoir, aux élections, et sur la façon dont nos voix doivent se traduire en sièges à l‘Assemblée législative provinciale.
Cette recommandation aura une portée réelle.
Une loi prévoyant un référendum a été déposée, pour permettre aux Ontariennes et Ontariens de se prononcer sur la question. Le gouvernement tiendra ce référendum en même temps que les prochaines élections provinciales, en octobre 2007, de façon à ce que tous les électeurs puissent dire s‘ils acceptent ou non le système de représentation proportionnelle mixte que recommande l‘Assemblée des citoyens. (…)
Les travaux de l‘Assemblée des citoyens sont presque achevés. Nous présenterons notre rapport final au gouvernement le 15 mai 2007.
Le mode de scrutin proposé est une représentation proportionnelle mixte en vertu de laquelle 90 députés à l‘Assemblée législative de l‘Ontario seraient élus dans des circonscriptions électorales comme c‘est le cas présentement, auxquels s‘ajouteraient 29 députés élus à la représentation proportionnelle (c‘est-à -dire proportionnellement au pourcentage de voix obtenu par chaque parti) au niveau provincial. La proposition d‘un tel mode de scrutin vise à faire en sorte que la répartition des sièges à l‘Assemblée à la suite d‘une élection générale reflète davantage la répartition des voix entre les divers partis durant la même élection.
Pendant qu‘une coalition voit le jour au Québec afin de mousser l‘idée d‘une Assemblée nationale élue à la représentation proportionnelle et que plusieurs quotidiens, dont Le Devoir et Le Soleil (pas de lien disponible), prennent position en faveur d‘une telle réforme, l‘Ontario pourrait possiblement tenir un référendum sur la question l‘automne prochain:
Réforme électorale
La proportionnelle mixte à l‘étude
Radio-Canada.ca
Mise à jour le mardi 3 avril 2007, 11 h 02
L‘Assemblée des citoyens sur la réforme électorale en Ontario songe à recommander l‘adoption d‘un système électoral proportionnel mixte.
Si ce mode de scrutin était adopté, certains députés provinciaux seraient élus à la majorité simple, comme c‘est le cas présentement, et d‘autres seraient nommés en proportion des votes obtenus par leur parti.
La proposition étudiée prévoit une Assemblée législative de 129 députés: 90 seraient élus directement par les électeurs et 39 le seraient selon le système proportionnel. Ainsi, un parti qui recueillerait le tiers des votes aurait droit à 13 députés de plus, en vertu du vote proportionnel. Les 13 premiers candidats sur une liste présentée par le parti en question deviendraient députés.
Le ministre des Finances, Greg Sorbara, n‘est pas emballé par l‘idée d‘un système proportionnel mixte. Même si c‘est son parti qui a lancé le processus de révision électorale, M. Sorbara se déclare satisfait du système en place.
Le chef du Parti conservateur, John Tory, affirme attendre la proposition de l‘Assemblée des citoyens sur la réforme électorale avant de se prononcer. Mais il ne peut s‘empêcher d‘exprimer des réserves sur le système proportionnel mixte: « Queen‘s Park compte 103 députés en ce moment et je n‘ai rencontré personne qui m’a dit qu‘il en voulait davantage. »
Le NPD est le seul des trois principaux partis à s‘exprimer clairement pour l‘instauration d‘un système proportionnel mixte. Lors des élections provinciales de 2003, le parti n‘a fait élire que sept députés (sur 103 à Queen‘s Park), malgré un pourcentage de votes de 15 %.
L‘Assemblée des citoyens remettra son rapport le 15 mai. Si elle recommande l‘adoption d‘un système proportionnel mixte, le gouvernement lancera une campagne d‘information en vue de la tenue d‘un référendum qui aurait lieu en même temps que les élections provinciales, le 10 octobre.
L‘Assemblée des citoyens sur la réforme électorale a été mise sur pied par le gouvernement de l‘Ontario en 2006 afin d‘examiner le mode de scrutin en vigueur dans la province et de formuler une recommandation sur celui-ci (soit conserver le système actuel, soit en adopter un nouveau).
Si l‘Assemblée des citoyens recommande d‘apporter quelque changement au mode de scrutin actuel de l‘Ontario – ce qui sera vraisemblablement le cas -, le gouvernement tiendra un référendum sur la question en même temps que l‘élection générale qui aura lieu en octobre 2007 (une loi déterminant des élections générales à date fixe est en vigueur en Ontario), projet qui avait d‘ailleurs été envisagé par le gouvernement Charest l‘automne dernier avant d‘être abandonné. La Colombie-Britannique et l‘Île-du-Prince-Édouard avaient déjà tenu une consultation semblable il y a quelques années, mais le projet de réforme du mode de scrutin avait été rejeté dans les deux cas (quoique dans le cas de la Colombie-Britannique, le projet avait reçu l‘appui d‘une majorité plus que claire d‘électeurs, mais ils se sont barrés les pieds avec un seuil trop élevé; il fallait au moins 60% d‘appuis pour que la réforme entre en vigueur).
Pour plus d‘infos sur le déroulement des travaux de l‘Assemblée des citoyens sur la réforme électorale de l‘Ontario, nous vous invitons à consulter l‘excellent blogue de J.H. Snider, senior research fellow à la New America Foundation, qui couvre les travaux de plusieurs assemblées de ce type qui se déroulent partout dans le monde. Gregory Morrow de Democraticspace.com suit également de près les travaux de l‘Assemblée.
Nous sommes conscients qu‘en ce lendemain d‘élections, nous ne nous ferons pas d‘amis en proposant “plus de sondages”. 😉 En fait, par “plus de sondages”, nous entendons “plus de un type de sondage en particulier”.
Depuis lundi soir dernier, chacun avance sa petite explication sur les facteurs qui ont amené les électeurs québécois à voter comme ils l‘ont fait (sur une base individuelle, s‘entend), sur la signification de leur geste ainsi que sur les conséquences sur le plan politique. Par exemple, nous citions ce matin un article dans lequel le président de Léger Marketing, Jean-Marc Léger, avançait que les gains de Québec solidaire et du Parti vert pouvaient avoir carrément couté la victoire au Parti québécois. Ce n‘est pas que la thèse soit farfelue en soi, mais ça manque un peu de démonstration. Une analyse macro des résultats électoraux ne permet pas nécessairement d‘inférer sur les transferts de vote sur une base individuelle (à moins que Léger Marketing ait des données là -dessus, mais si c‘est le cas, le simple fait de les rendre publiques enrichirait drôlement le débat). Nous parlons spécifiquement de Jean-Marc Léger ici, mais le commentaire s‘applique à bon nombre de journalistes, commentateurs et analystes qui se sont fait entendre depuis lundi soir.
Comment y voir plus clair? Comment faire en sorte que les analyses électorales (et nous nous incluons là dedans) reposent sur des bases fiables et complètes? Une solution pourrait être de lancer une “étude électorale québécoise”, sur le modèle des grandes enquêtes universitaires sur les élections, telles que les American National Election Studies, les British Election Studies ou l‘Étude électorale canadienne. Ce ne serait pas un précédent, il y a déjà eu de telles études réalisées par le passé, notamment par Maurice Pinard, professeur émérite à McGill, en 1960, 1962 et 1973, mais il n‘y en a eu aucune lors des récentes élections, sans compter qu‘un des intérêts de l‘exercice est de le tenir à chaque élection générale afin d‘évaluer l‘évolution de l‘électorat québécois au fil des années.
Qu‘est-ce que ça pourrait donner de réaliser une étude universitaire sur les élections générales au Québec, demanderez-vous? En transposant les objectifs de l‘Étude électorale canadienne dans le cas québécois, on pourrait avoir une idée assez claire de l‘éventuel apport d‘une “étude électorale québécoise”:
Le premier objectif de l‘Étude est de produire un compte-rendu complet de l‘élection afin d‘identifier les principales raisons pour lesquelles les électeurs appuient un parti ou un candidat donné, de déterminer les constantes et les changements pendant la campagne et d‘une campagne à l‘autre, et de mettre en lumière les similarités et les différences entre le comportement électoral au Canada et dans d‘autres pays démocratiques. Le deuxième objectif est de contribuer au développement de connaissances scientifiques sur les motivations des électeurs, la signification des élections et sur les campagnes électorales dans les pays démocratiques. Le troisième objectif est de constituer un ensemble important de données sur les attitudes et les opinions des Canadiens à l‘égard d‘un large éventail d‘enjeux sociaux, économiques et politiques, ainsi que de rendre ces données disponibles auprès des chercheurs en science politique, en sociologie, en économie, en communication et en journalisme.
Mais alors, demanderez-vous encore, en quoi un sondage réalisé par des universitaires serait plus fiable qu‘un autre réalisé par CROP ou Léger? En guise de réponse, citons le sommaire méthodologique de l‘Étude électorale canadienne de 2000:
Le sondage a d‘abord été mené durant la campagne électorale (fédérale de 2000) auprès de 3651 répondants. Puis, 2862 de ces répondants ont été interrogés à nouveau après l‘élection. Enfin, 1535 personnes interviewées après l‘élection ont complété un questionnaire postal.
Ajoutons à titre d‘exemple que le questionnaire pré-électoral de l‘Étude électorale canadienne de 2006 (voir ici: format pdf) fait pas moins de 159 pages dans sa version bilingue. Bref, sauf tout le respect qu‘on doit aux maisons de sondage qui font face à diverses contraintes lorsqu‘elles réalisent des sondages pour un journal ou un réseau télé, ça serait beaucoup plus complet qu‘un questionnaire lu en 5 minutes sur l‘heure du souper auprès de 1000 personnes.
Alors, avis aux chercheurs universitaires, think tanks, instituts de recherche et autres organismes subventionnaires: une étude électorale québécoise permanente serait une contribution intéressante au domaine de la science politique au Québec et aiderait certainement à donner un éclairage intéressant à l‘évolution de l‘opinion publique au Québec.
Après avoir dormi sur les résultats d‘hier, et avec un peu de recul, voici notre analyse sur l‘élection générale de 2007 et ce qui nous attend au cours des prochains mois.
d‘entrée de jeu, ce qui nous a frappé de l‘élection d‘hier et du déroulement de la campagne électorale est le nombre d‘idées reçues sur la vie politique québécoise qui – en 2007 – ont été contredites par les faits:
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«Les Québécois élisent un parti au pouvoir pour deux mandats»: techniquement, c‘est vrai, mais jamais depuis l‘Union nationale en 1970 a-t-on vu le parti ministériel perdre 13% des voix et 28 sièges (22% des sièges) après un premier mandat. Habituellement, la réélection d‘un gouvernement pour un deuxième mandat (majoritaire qui plus est) est une formalité, mais ça n‘a pas été le cas en 2007.
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«Les Québécois n‘élisent pas de gouvernements minoritaires»: les sondages laissaient entrevoir un gouvernement minoritaire tout au long de la campagne électorale, donc on a eu assez de temps pour se faire à l‘idée que cette idée reçu n‘était peut-être pas aussi vraie qu‘on pouvait le penser. Toutefois, rien ne laissait présager une Assemblée nationale aussi divisée qu‘elle le sera durant la prochaine législature. Le parti majoritaire n‘a que 48 sièges en chambre (38,4% des sièges), le “tiers parti” n‘est que 12 sièges derrière, et l‘opposition officielle est entre les deux.
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«Plus l‘issue d‘un scrutin s‘annonce serrée, plus la participation électorale s‘accroît»: deux chiffres suffisent pour remettre cette idée reçue en cause: 70,5% en 2003; 71,3% en 2007.
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«Les organisations électorales jouent un rôle important dans la sortie du vote»: tous les commentateurs politiques s‘accordaient pour affirmer que l‘ADQ faisait figure de parent pauvre face au PQ et aux libéraux sur les plans des finances et de l‘organisation. Et pourtant… Après l‘élection d‘Andrée Boucher à la mairie de Québec avec un budget de 3000$ en 2005 et l‘élection de 10 députés conservateurs au fédéral en 2006 avec une organisation “légère”, il faudrait peut-être relativiser un peu plus l‘importance de la “machine” dans la sortie du vote.
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«Le mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour déforme la volonté exprimée par les électeurs»: c‘est peut-être un accident de parcours, mais la répartition des sièges reflète assez bien le pourcentage de voix obtenus par chaque parti: LIB 38,4% des sièges, ADQ 32,8% des sièges et PQ 28,8% des sièges. Il est vrai qu‘à 4% chacun, Québec solidaire et les Verts n‘ont pas élu de députés, mais avec de tels chiffres, rien ne garantit qu‘ils seraient parvenus à le faire sous un mode de scrutin mixte ou proportionnel.
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«La circonscription de Saint-Jean vote toujours du côté du pouvoir»: cette fois-ci, ce n‘est pas vrai, le député libéral a été battu.
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«Le vote libéral est sous-évalué dans les sondages»: Léger Marketing accordait 35% aux libéraux samedi dernier, CROP leur accordait 34%. Le vote libéral a été légèrement en-deçà de ce qu‘accordaient les sondeurs, mais ça reste dans la marge d‘erreur. Tout comme en 2003, il n‘y a pas eu de “prime de l‘urne”.
À surveiller au cours des prochaines semaines et des prochains mois, beaucoup d‘inconnues qui pourraient nous mener soit vers un tripartisme (multipartisme?) permanent, soit vers un retour au bipartisme PLQ-PQ ou soit vers un nouveau bipartisme.
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Nouvelle dynamique parlementaire: Sur quel parti le gouvernement libéral minoritaire va-t-il s‘appuyer? Tel que nous l‘avons mentionné plus haut, aucun parti ne se démarque clairement des autres. À première vue, bien peu de choses semble rapprocher les trois partis, et ça semble particulièrement vrai pour le Parti libéral et le Parti québécois. Si l‘ADQ joue de façon relativement classique le rôle d‘un parti d‘opposition officielle, il faudra bien que les “vieux partis” trouvent un terrain d‘entente afin d‘éviter de retomber rapidement en élection.
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Élection de réalignement?: On a souvent comparé depuis hier l‘élection de 2007 à d‘autres qui ont été le théâtre d‘un réalignement de notre système de partis, notamment les élections générales de 1936 (arrivée au pouvoir de l‘Union nationale), de 1970 (le PQ devient le 2e parti le plus populaire au Québec) et de 1976 (arrivée au pouvoir du PQ). Ce n‘est pas impossible, mais il est encore trop tôt pour le dire. En 1936 et 1970-76, un seul parti a été frappé par la montée d‘un tiers parti (le Parti conservateur dans les années 30 et le PQ dans les années 70) et l‘autre s‘est maintenu (le Parti libéral dans les deux cas). En 2007, ce sont les deux principaux partis qui ont écopé; le PQ et les libéraux ont tous les deux subi des reculs historiques hier.
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Le Parti vert et Québec solidaire: Vrai, les deux partis ont obtenu moins de voix que ne leur attribuaient les sondages au cours de la campagne. Ils ont néanmoins progressé depuis 2003 et, financement (partiellement) public des partis politiques oblige, ils auront maintenant droit à des ressources financières en raison des voix supplémentaires qu‘ils ont obtenus et qui leur permettra de consolider leur progression. C‘est la stratégie qu‘a adoptée le Parti vert sur la scène fédérale depuis le début des années 2000, et ils sont passés de moins de 1% à travers le Canada en 2000 à 4% en 2004 et 2006, et ils sont maintenant dans les deux chiffres dans les sondages pancanadiens.
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Volatilité de l‘opinion publique: Depuis 2002, l‘opinion publique québécoise est très volatile et chacun des principaux partis ont connus des très hauts et des très bas dans les sondages au cours de la période. Ça risque de se poursuivre au cours des prochains mois. À titre d‘exemple:
- LIB: 21% en avril 2005 (Léger), 48% en août 2003 (Léger);
- PQ: 25% en septembre 2002 (Léger), 50% en décembre 2005 (CROP);
- ADQ: 11% en mars 2006 (Léger), 40% en août, septembre et octobre 2002 (Léger et CROP).
-
Réforme du mode de scrutin: ironiquement, la répartition des sièges entre les principaux partis est la plus proportionnelle qu‘on ait vu depuis longtemps. Malgré tout, la perspective qu‘un des trois partis puisse disparaitre à plus ou moins brève échéance pourrait être propice à une réforme du mode de scrutin.
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Débat de sondeurs: Aucune firme de sondage et aucun site de prédiction n‘a prévu ce qui s‘est passé hier, et cela relancera vraisemblablement un énième débat sur la fiabilité des sondages électoraux. Notons tout de même qu‘à l‘exception du résultat de l‘ADQ (et du fait que l‘ADQ a terminé deuxième contrairement à ce que laissaient croire les sondages), tous les autres étaient à l‘intérieur de la marge d‘erreur, sauf Strategic Counsel qui était dans le champ.
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Renouvellement de la députation: Beaucoup de députés sortants du PQ et du PLQ ont été battus hier et plusieurs nouveaux députés feront leur entrée à l‘Assemblée nationale prochainement (surtout à l‘ADQ, mais aussi du PQ et des libéraux). Reste à voir comment ce renouvellement de la députation se reflètera au niveau du débat politique. Il y a là potentiel à des dérapages et à des erreurs de débutants, mais aussi à un renouvellement et à un rafraîchissement du discours politique.
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Évolution de l‘opinion publique sur l‘avenir du Québec: Avec une opposition officielle qui prétend incarner une troisième voie entre le fédéralisme et la souveraineté, comment évoluera l‘opinion publique sur la question de l‘avenir du Québec au cours des prochains mois?
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Débats internes au PQ et au PLQ: Ce que nous nous apprêtons à écrire à ce sujet est loin d‘être original. Le PQ qui obtenu son pire score depuis 1970, les libéraux qui obtiennent leur pire score depuis 1867 et tous deux ont perdu des comtés réputés “imprenables” aux mains de l‘ADQ. Des débats passionnés et des remises en question à l‘interne risquent de surgir en ce qui a trait à leur idéologie et à leur leadership.
Le blogueur Stéphane Dion de Go-Québec.com lance une initiative intéressante et inédite (à notre connaissance) au Québec: réaliser un sondage de sortie des urnes ou “exit poll” par Internet le 26 mars prochain:
Avec l‘aide des électeurs, nous voulons déterminer les résultats des élections du 26 mars prochain avant la fermeture des bureaux de vote. Les électeurs sont invités à compléter anonymement un très court sondage par circonscription sur le choix qu‘ils ont fait.
Les résultats obtenus seront combinés avec des données des élections antérieures ainsi qu‘une projection de la répartition des votes dans les 125 circonscriptions. La tendance des votes dans une circonscription permettra de déclarer un candidat élu.
Un sondage de sortie des urnes est un sondage réalisé immédiatement après que les électeurs aient quitté le bureau de vote et où, contrairement aux sondages d‘opinion où l‘on questionne les répondants sur leurs intentions de vote, on demande aux répondants l‘identité du candidat ou du parti pour lequel ils ont réellement voté. Pour de plus amples renseignements sur la méthodologie employée lors du sondage de sortie des urnes réalisé pour les principaux réseaux télé américains lors des élections de mi-mandat aux États-Unis en 2006, nous vous invitons à lire ce billet (en anglais) de Mark Blumenthal sur pollster.com.
En quoi est-ce une démarche inédite? Pourquoi n‘y a-t-il pas de sondages de sortie des urnes au Québec, par exemple par CROP ou Léger Marketing? Tout simplement en raison de la rapidité avec laquelle les résultats sont compilés. Les sondages de sortie des urnes sont généralement employés dans des pays populeux (ex: États-Unis, France) et/ou qui n‘ont pas les ressources qui permettent de communiquer rapidement les résultats du dépouillement, ce qui fait en sorte que le dépouillement des bulletins de vote peut s‘échelonner sur plusieurs jours. Une autre utilité des sondages de sortie des urnes est de contre-vérifier les résultats “officiels” d‘un scrutin dans une démocratie dite “émergente” afin d‘essayer de détecter les possibles cas de fraude électorale. Au Québec (et aussi au fédéral), le premier décompte des bulletins de vote est complété dans les heures suivant la fermeture des bureaux de scrutin et, sauf résultats extrêmement serrés ou retards dans une section de vote donnée, on peut rapidement proclamer un vainqueur.
Mais revenons au projet de sondage de sortie des urnes de Go-Québec.com. De prime abord, la méthode suggérée est, à certains égards, questionnable sur le plan méthodologique:
- d‘abord, comme tout sondage réalisé par Internet, rien ne garantit, contrairement aux sondages de sortie des urnes réalisés “en personne” à la sortie des lieux de votation, que chaque individu ne sera sondé qu‘une seule fois.
- Ensuite, étant donné que l‘échantillon ne sera pas sélectionné de façon aléatoire (les répondants sont ceux qui le veulent bien), rien n‘indique que l‘échantillon sera représentatif de la composition de l‘électorat québécois. De plus, après avoir répondu au sondage, nous nous sommes rendus compte qu‘aucune question n‘est posée sur les caractéristiques socio-économiques des répondants (âge, sexe, lieu de résidence, langue maternelle, scolarité, revenu, etc.), contrairement à ce qui se fait dans d‘autres pays. Rien ne permet de pondérer l‘échantillon en fonction des caractéristiques de la population, ce qui rend toute extrapolation pour le moins risquée.
- Enfin, les sondages de sortie des urnes sont généralement employés afin de tenter de prédire les résultats d‘une élection à l‘échelle nationale (par exemple lors d‘élections présidentielles) et non pas de prédire les résultats à l‘échelle des circonscriptions. Dans un monde idéal, avec un échantillon représentatif de la population, ça prend un minimum de répondants dans chaque circonscription pour faire une projection valide. À 500 répondants par circonscription (marge d‘erreur d‘environ 5% tout de même!), ça prendrait au mimimum 62 500 répondants à l‘échelle québécoise! Même Léger Marketing ou CROP seraient incapables fournir à la tâche en quelques heures, même par Internet, même avec toutes les précautions que les firmes de sondages prennent lorsqu‘elles sondent par Internet!
Autrement dit, la démarche de Go-Québec.com s‘apparente davantage à un “straw poll“, comme on en retrouve à tous les jours sur Cyberpresse, qu‘à un sondage de sortie des urnes. Nous n‘avons rien contre les straw polls en soi, nous en avons un nous-mêmes dans la section Élection 2007 de ce site. Le problème est de croire qu‘un straw poll peut être représentatif de l‘ensemble d‘une population. Par définition, un straw poll n‘est représentatif que de l‘opinion des répondants et ne devrait avoir aucune prétention scientifique.
Cela étant, l‘exercice de Go-Québec.com, à défaut d‘être un vrai sondage scientifique, risque de mettre encore plus de piquant à la soirée électorale, comme s‘il n‘y en avait pas déjà assez comme ça!
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