Dans la lignée de l’article du Soleil dont nous faisions mention hier, Le Devoir a interviewé d’autres militants libéraux qui se sont prononcés sur le candidat qu’ils appuieront dans Charlevoix lundi prochain. Le tout est paru dans l’édition de ce matin (accès réservé aux abonnés).

Et avant que quelqu’un nous pose la question: non, nous ne commenterons pas le sondage interne qui est mentionné dans l’article car il y a zéro information là-dessus: pas de taille de l’échantillon, pas de marge d’erreur, pas de période de cueillette, pas de questionnaire, etc.

Charlevoix, à mille lieues de la cage à homards

Robert Dutrisac
Le Devoir
Édition du jeudi 20 septembre 2007

L’élection, «je ne la sens pas serrée», avoue Pauline Marois

La Malbaie — Bertrand Maltais est maire de Saint-Aimé-des-Lacs, une petite municipalité située à dix kilomètres de La Malbaie, dans la circonscription de Charlevoix. Comme bien des maires en région, il est d’allégeance libérale. Dans son cas, c’est de famille, depuis des générations: deux Maltais ont même été députés du Parti libéral à la Chambre des communes. Or, à l’élection partielle de lundi, c’est sans hésitation qu’il votera pour la chef du Parti québécois, Pauline Marois.

«C’est un choix facile», a-t-il expliqué au Devoir. «On a une occasion pour la région d’avoir un chef de parti.

Ça m’apparaît vraiment intéressant pour la région et pour ma municipalité. Un maire, c’est plus puissant qu’un conseiller, alors j’imagine qu’un chef de parti, c’est plus puissant qu’un député.» Selon M. Maltais, plusieurs électeurs libéraux l’imiteront, d’autant plus qu’on reconnaît à Mme Marois d’indéniables qualités. «C’est une femme de valeur qui a déjà fait des choses; elle ne sort pas de la cuisse de Jupiter», a souligné Bernard Maltais.

Sur papier, le candidat de l’Action démocratique du Québec, Conrad Harvey, a de bonnes chances de l’emporter lundi. C’est une course à deux puisque Jean Charest a choisi de ne pas présenter de candidat libéral: troisième en 2007, le Parti libéral du Québec n’avait rien à gagner dans cette élection. Si l’ADQ conserve les voix qu’il a récoltées en mars 2007, il suffira que la majorité des électeurs libéraux du comté, dont plusieurs répugnent à voter pour le Parti québécois, choisisse l’ADQ pour que M. Harvey coiffe la chef du Parti québécois. Or, à quelques jours du scrutin, rien n’est moins sûr.

En mars 2007, Conrad Harvey avait obtenu un score honorable: 7436 voix, soit 31 % des suffrages, contre 9099 voix (38 % des votes) pour le député péquiste Rosaire Bertrand. Le candidat libéral, Jean-Guy Bouchard, avait terminé troisième avec 27 % des suffrages, récoltant 6541 voix. Si les deux tiers des libéraux votent ADQ, un parti dont la plateforme autonomiste le place dans le camp des fédéralistes, malgré que Mario Dumont cherche à éviter cette étiquette, le tour sera joué.

Lors d’une conférence de presse dans son local électoral de La Malbaie, mardi dernier, Pauline Marois, qui faisait son bilan de campagne, avait ce message à livrer aux fédéralistes indécis. «[Je n’ai] aucun problème avec les fédéralistes qui veulent voter pour moi. Nous ne sommes pas dans une élection référendaire ni dans une campagne référendaire. Et il n’y a personne qui ne sera jamais pris par surprise par moi. Le jour où on voudra décider de se donner un pays, on va le faire à visage découvert […], et nous n’en sommes pas là», a-t-elle affirmé. On est loin de l’amorce d’un quelconque processus référendaire, à mille lieues aussi de la cage à homards.

Charlevoix n’est pas à proprement parler une forteresse péquiste. En 1976, la vague qui avait porté René Lévesque au pouvoir n’avait pas enlevé cette circonscription. Elle a été représentée par un libéral jusqu’en 1994, année où Rosaire Bertrand a été élu pour la première fois. Les Charlevoisiens ont voté NON au référendum de 1980, mais lors du référendum de 1995, le OUI a récolté 56 % des appuis.

Comptant 33 000 électeurs, Charlevoix longe le fleuve de la côte de Beaupré, presque en banlieue de Québec, jusqu’à Baie-Sainte-Catherine, bornée au nord par la rivière Saguenay. Elle compte deux MRC et demie, soit la MRC de Charlevoix autour de Baie-Saint-Paul, et la MRC de Charlevoix-Est à partir de La Malbaie, la demie restante étant la MRC de la Côte-de-Beaupré. L’économie de Charlevoix est dominée par le tourisme, la villégiature, la forêt, les pâtes et papier ainsi que l’agriculture. Elle affiche un taux de chômage supérieur et un revenu moyen inférieur à la moyenne québécoise. Par contre, le taux de pauvreté est plus bas que dans le reste du Québec.

Au cours de la campagne, Conrad Harvey a essentiellement exploité trois filons. Il a fait valoir que l’ADQ est le parti de la régionalisation. C’est aussi celui de l’autonomisme, une position plus acceptable que l’option souverainiste aux yeux de l’électeur fédéraliste. Mardi, à la conférence de presse au cours de laquelle il a dressé un bilan de sa campagne, Conrad Harvey s’est d’ailleurs présenté avec Auguste Choquette, 75 ans, député libéral à la Chambre des communes de 1963 à 1968. M. Choquette lui accorde son appui, tout comme le candidat du PLQ défait en 2003, André Lavoie, que le parti a écarté de l’investiture en 2007. On ne peut pas dire que ce sont là des appuis déterminants, d’autant plus que l’appui de M. Choquette est momentané: il a confié qu’il ne manquera pas de voter libéral lors des prochaines élections générales au Québec.

Le député adéquiste s’est aussi posé en homme enraciné dans la région, contrairement à Pauline Marois, née dans la région de Québec. Le chalet de Mme Marois à Saint-Irénée, qui appartient en fait à une entreprise de son mari, a aussi défrayé la chronique au début de la campagne. Il a même été présenté comme un château, ce qu’il n’est manifestement pas, même si les terrains que possède son mari à proximité constitueraient un emplacement de choix pour l’érection d’une demeure cossue.

En fait, s’il est natif de Baie-Saint-Paul, Conrad Harvey a passé la majeure partie de son existence à Québec alors qu’il était fonctionnaire. En 2003, à 55 ans, il a pris sa retraite et est revenu dans la région. Il a fait de la politique municipale en fondant Option Baie-Saint-Paul, une formation politique qui n’a pas connu de succès. Alors que son équipe s’acharne sur le fait que Pauline Marois n’est pas originaire du coin, Option Baie-Saint-Paul proposait une vision plus accueillante. «Tous ceux qui prennent l’option de Baie-Saint-Paul, c’est tous ceux qui prennent l’option d’y vivre, d’y rester et de nous enrichir. On n’était pas xénophobes», a-t-il livré au Devoir cette semaine.

La participation du chef Mario Dumont à la campagne a été plus que modeste. Il n’a fait qu’un petit saut à Beaupré au début de la campagne. En revanche, des dizaines de députés adéquistes sont venus prêter main-forte à M. Harvey. Le candidat dispose de moyens financiers bien plus considérables qu’aux dernières élections générales: son organisation a posé quatre fois plus d’affiches qu’en mars 2007, ce qui surpasse de loin l’affichage de Mme Marois, et la publicité dans les hebdos locaux est à l’avenant. «Notre campagne se déroule comme prévu. Au fil des jours, on se rend compte qu’on progresse», a fait valoir Conrad Harvey.

Les sondages internes du PQ indiquent toutefois que les intentions de vote en faveur de Mme Marois sont deux fois plus élevées que pour son adversaire adéquiste: 44 % contre 22 %, a-t-on confié au Devoir. L’élection, «je ne la sens pas serrée», a avoué Pauline Marois cette semaine. «C’est du plaisir à plein temps. C’est la plus belle campagne que j’ai jamais faite», a-t-elle dit, parce qu’elle peut s’y consacrer totalement. Multipliant les activités, le porte-à-porte et les poignées de main, Pauline Marois n’a rien ménagé: elle a rencontré non seulement les maires mais aussi les conseillers municipaux des 18 municipalités du comté, ainsi que les dirigeants d’une centaine d’organismes. «J’ai l’impression qu’on m’a adoptée», a-t-elle lancé. On peut penser qu’une défaite serait catastrophique pour elle. «Ce serait plus difficile, mais vous savez, je suis une femme déterminée. Alors, ce serait une épreuve de plus à mettre à mon expérience», a minimisé Pauline Marois.


Tags: , , , , , , , , , , ,

Articles connexes:

  • PQ: une 1re investiture dimanche (0)
  • Cohue et désistements (0)
  • Retour dans Joliette; forfait dans Orford (0)
  • Bourget: McKay «consulte» (2)
  • Pointe-aux-Trembles: jamais 2 sans 3 (0)
  • 1 sur 52 sur 53 sur 54 sur 55 sur 5 (1 votes, moyenne: 4 sur 5)
    Loading ... Loading ...