OK tout le monde, on va respirer par le nez deux petites minutes.
Ce matin paraissant dans Le Soleil cet article de Michel Corbeil dans lequel il cite les résultats d’une étude réalisée par le Parti québécois sur les résultats de l’élection générale du 26 mars dernier. En gros, on a calculé la moyenne d’âge dans chaque circonscription puis on a tenté de faire un lien entre la moyenne d’âge et les partis politiques ayant remporté chaque circonscription. D’où la grosse conclusion: les jeunes voteraient pour l’ADQ et les vieux voteraient pour le PQ (soi dit en passant, ça n’a rien de nouveau, David Gagnon avait fait la même chose il y a quelques mois sur son blogue Antagoniste.net). Depuis, tout ce qui grouille, scribouille et grenouille sur la blogosphère politique québécoise, des dessous de la politique à l’homme en colère en passant par Patrick Lagacé, s’affaire à tirer les conclusions les plus tranchées et les plus définitives sur une étude que personne n’a lue, sauf Michel Corbeil (appel à tous: si quelqu’un au PQ voulait bien nous envoyer une “enveloppe brune virtuelle” par courriel, nous sommes preneurs ).
Seulement, il y a un détail que tous semblent ignorer: d’après ce qu’on peut en connaître, il est loin d’être certain que cette étude est valide sur le plan méthodologique. Si ça se trouve, nous venons d’assister à l’erreur la plus élémentaire, la plus “pee-wee” qui existe en méthodes quantitatives.
Pour faire une histoire courte avec une histoire longue, le procédé qui semble être employé dans l’étude (selon les données dévoilées dans l’article en tout cas) est l’inférence écologique. Une erreur courante dans l’emploi de cette méthode est d’inférer sur des comportements individuels sur la base de données collectives en prenant pour acquis que tous les individus, sans exception, partagent les mêmes caractéristiques que celles de l’ensemble du groupe. C’est ce qu’on appelle l’erreur écologique ou ecological fallacy dont l’existence fut démontrée dès le milieu du 20e siècle par le sociologue américain William Robinson qui, en tentant d’étudier la relation entre le taux d’alphabétisation et le pourcentage d’immigrants dans chaque État américain, avait observé une différence majeure selon que le taux de corrélation était basé sur des données agrégées ou individuelles (pour plus de détails, voir Robinson, W.S. 1950. «Ecological Correlations and the Behavior of Individuals». American Sociological Review 15: 351–357). Il est vrai que depuis les années 50, les méthodes quantitatives en sciences sociales se sont beaucoup raffinées et certains chercheurs ont mis de l’avant des solutions à la fois théoriques et techniques afin d’effectuer ce type d’inférence sous certaines conditions. Toutefois, ça ne fait pas l’unanimité et ça demande une expertise très poussée que peu de gens possèdent en dehors des cercles universitaires, et rien n’indique que les auteurs de l’étude en font partie.
Conclusion: aucune donnée solide (méthodologiquement parlant) tirée de l’étude citée par Michel Corbeil ne permet de confirmer l’existence d’un clivage générationnel sur la scène politique québécoise. Peut-être que ce clivage existe, mais pour s’en assurer, ça prend des données recueillies à l’échelle d’observation appropriée, c’est-à-dire l’échelle individuelle. En d’autres mots, ça prend un sondage.
Au risque de nous répéter, s’il existait une étude électorale québécoise, sur le modèle des grandes enquêtes électorales universitaires, telles que les American National Election Studies ou les British Election Studies, nous pourrions avoir l’heure juste avec des données fiables colligées et analysées par des chercheurs sérieux plutôt que de discuter d’une étude dont on ne sait pas grand chose dans le fond, à commencer par son (ses?) auteur(s).
Bref, circulez, y a rien à voir! (suite de l'article…)
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Élection générale du 26 mars 2007: taux de participation
Dans la foulée de la publication la semaine dernière du Rapport des résultats officiels du scrutin du 26 mars 2007, La Presse consacre aujourd’hui un article sur la baisse marquée du taux de participation dans un certain nombre de circonscriptions électorales de l’ouest de l’île de Montréal. L’article fait également état d’une “forte hausse” de la participation électorale dans Champlain par rapport à l’élection générale de 2003.
Si on replace cette hausse dans son contexte, on conclura rapidement qu’elle n’est pas aussi spectaculaire qu’il n’y paraît. En effet, lors du scrutin général du 14 avril 2003, 75,64% des électeurs inscrits s’étaient prévalus de leur droit de vote dans Champlain. Toutefois, le scrutin a dû être repris le 20 mai suivant car les deux premiers candidats étaient arrivés à égalité à l’issue du recomptage judiciaire (la Loi électorale prévoit la tenue d’une “élection spéciale” lorsqu’une telle situation survient). Le taux de participation était alors de 57,70%. Étant donné qu’il y avait campagne électorale dans Champlain depuis le début de mars et que les électeurs avaient déjà voté une première fois le 14 avril, on peut présumer qu’il y avait une certaine lassitude chez ces derniers, sans compter que leur vote était devenu moins déterminant qu’il ne l’aurait été lors de l’élection générale proprement dite (un siège de plus ou de moins n’aurait rien changé sur l’identité du parti formant le gouvernement, les libéraux étant nettement majoritaires). De plus, comme il s’agissait d’une élection spéciale qui n’avait lieu que dans une seule circonscription, la couverture de la campagne dans les médias “nationaux” était pour le moins minimaliste. Bref, une baisse aussi radicale du taux de participation en 1 mois et demi ne devrait pas surprendre.
En réalité, si on compare des pommes avec des pommes (élection générale vs élection générale), la participation électorale dans Champlain a connu une hausse beaucoup plus modeste (0,90%) entre 2003 et 2007 puisqu’il est passé à 76,54%.
Le mardi 26 juin 2007
Élections provinciales: baisse de participation dans l’Ouest-de-l’Île
Hugo Fontaine
La PresseLes sept circonscriptions qui ont enregistré la plus forte baisse du taux de participation lors des élections provinciales du 26 mars sont situées dans l’île de Montréal.
Six d’entre elles sont dans l’Ouest-de-l’Île.
Volà l’un des faits saillants du Rapport sur les résultats officiels du scrutin, dévoilé cette semaine par le Directeur général des élections (DGE).
L’organisme a enregistré des baisses variant de 4,5 à 8,5% par rapport aux élections de 2003 dans ces sept circonscriptions, parmi lesquelles se trouvent Marguerite-Bourgeoys, Mont-Royal et Jeanne-Mance-Viger. C’est dans D’Arcy-McGee que la baisse est la plus marquée.
Dans Champlain: forte hausse
À l’autre extrémité de la liste, la circonscription de Champlain voit son taux de participation augmenter de près de 19%. C’est que, en 2003, il avait fallu reprendre le scrutin parce que deux candidats étaient arrivés ex aequo. Mais lors de la reprise, beaucoup moins de gens étaient allés voter.
On remarque les plus fortes hausses dans les régions éloignées, notamment au Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Vote le plus massif: 82,6%
Ce sont les électeurs de Marguerite-D’Youville, au sud de Montréal, qui sont allés voter le plus massivement (82,6%) pour élire le plus jeune député de l’Assemblée nationale, Simon-Pierre Diamond. Moins de la moitié des citoyens (46,5%) de la plus grande circonscription du Québec, Ungava, se sont rendus aux urnes.
Le taux de participation global a été de 71,23%, une hausse de moins d’un point par rapport à 2003. C’est donc dire que les dispositions de la loi 22 (commissions de révision itinérantes, prolongation des heures de vote par anticipation, élargissement du vote par anticipation, itinérant et par correspondance) n’ont pas eu d’effet significatif sur la participation des électeurs.
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L’expérience est une lanterne que l’on porte dans le dos et qui n’éclaire que le chemin parcouru
C’est maintenant un classique: après chaque élection générale, les sondeurs se lancent en pleine introspection afin de trouver pourquoi le scrutin ne se déroule pas comme ils l’avaient prévu. Ce matin dans La Presse (pas de lien disponible), Claire Durand, professeure au département de sociologie à l’Université de Montréal, dévoile les résultats d’une étude réalisée en collaboration avec CROP afin de tenter d’expliquer les raisons pour lesquelles le vote de l’ADQ avait été sous-estimé par les sondeurs à la veille de l’élection générale du 26 mars dernier.
Mais d’abord, une petite mise en contexte s’impose: le texte de Mme Durand porte spécifiquement sur le sondage CROP paru deux jours avant le scrutin, soit le 24 mars. Or, trois autres sondages étaient parus le même jour.
Sondage | LIB | ADQ | PQ | VRT | QS | Aut. | Écart total* | Écart total** |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Résultats du scrutin (arrondi à l’unité près) | 33 | 31 | 28 | 4 | 4 | 0 | ||
Angus Reid Strategies (sondage par Internet, réalisé du 22 au 23 mars, N=838, ME=3,5%) | 30 | 31 | 27 | 7 | 5 | 0 | 4 | 6 |
CROP (sondage téléphonique, réalisé du 15 au 22 mars, N=1053, ME 3,1%) | 34 | 25 | 28 | 8 | 5 | 0 | 7 | 10 |
Léger Marketing (sondage téléphonique, réalisé du 19 au 23 mars, N=1000, ME=3,1%) | 35 | 26 | 29 | 5 | 4 | 1 | 8 | 10 |
The Strategic Counsel (sondage téléphonique, réalisé du 21 au 22 mars, N=1000, ME=3,1%) | 30 | 28 | 31 | 6 | 5 | 0 | 9 | 10 |
* Écart total pour les trois principaux partis.
** Écart total pour tous les partis.
Les nombres en caractères gras indiquent les scores “prédits” par les sondeurs dont l’écart par rapport au score “réel” est supérieur à la marge d’erreur. On peut voir qu’Angus Reid Strategies a les résultats qui sont les plus près du vote réel (lui seul met le PQ en troisième place) tandis que CROP et Léger sous-estiment le vote adéquiste selon un écart supérieur à la marge d’erreur. Quand à Strategic Counsel, il n’a aucun écart individuel qui dépasse la marge d’erreur (pour les trois principaux partis, il est “flush” à chaque fois), mais lorsque l’on cumule les écarts, c’est le sondage qui s’avère le moins exact (il allait jusqu’à prédire une première place au PQ).
(Petite parenthèse sur Angus Reid Strategies: c’est une firme basée principalement à Vancouver, fondée par un vieux routier des sondages d’opinion au Canada anglais, Angus Reid, et qui occupe un créneau encore peu occupé au Canada: les panels sur Internet (pour ceux qui sont à l’aise en anglais et qui veulent en savoir plus sur les panels en ligne, il y a un document explicatif (format pdf) ici). Le sondage que cette firme a publié le 24 mars est passé complètement inaperçu au Québec (quand nous disons complètement inaperçu, nous nous incluons là dedans; nous n’en avons pris connaissance que quelques jours après le jour J). Pourtant, ils se vantent d’avoir réalisé le sondage le plus précis lors des dernières élections générales au Québec et au Manitoba (c’était en mai). Fin de la parenthèse)
Selon l’étude postélectorale de Claire Durand, 16% des répondants qui avaient révélé leur choix lors du sondage ont changé d’avis au moment de voter (on parle d’une personne sur six, quand même!). De plus, les “indécis” et les “discrets” se répartissent de la même manière que les autres répondants, ce qui semble confirmer que la répartition “proportionnelle” des indécis lors des sondages serait, dans le contexte actuel, la plus susceptible de donner des bons résultats. Or, en tenant compte des mouvements de dernière minute (rappelons que le sondage CROP a débuté le 15 mars), on revient à l’intérieur de la marge d’erreur. Donc, la principale erreur de CROP est vraisemblablement d’avoir échelonné le sondage sur huit jours. Quand on y pense, c’est énorme sur une campagne électorale de 33 jours.
La grosse conclusion de Mme Durand, c’est que le Québec est divisé en trois et que si les sondeurs se sont trompés, c’est parce que l’électorat est très volatile.
Cela nous rappelle une controverse similaire en 1998 alors que les sondeurs avaient sous-évalué le vote libéral et mis le PQ largement en avance avant l’élection générale du 30 novembre 1998. Après coup, on a découvert que les indécis avaient des caractéristiques proches de l’électorat libéral, que la répartition proportionnelle des indécis n’était pas valide et qu’il fallait plutôt transférer la très grande majorité des indécis au Parti libéral (la fameuse méthode 60-30-10). En 2003, ça a marché mais maintenant, ça ne marche plus et la répartition proportionnelle semble redevenir valide.
Bref, comme le disait si bien Confucius (pour vrai!): « L’expérience est une lanterne que l’on porte dans le dos et qui n’éclaire que le chemin parcouru. »
Vendredi, 08 juin 2007
Que s’est-il passé?
Claire Durand
La PresseL’auteur est professeur titulaire au département de sociologie de l’Université de Montréal
Au moment où tant de politiciens, de militants, de journalistes invoquent les sondages, il est important de se pencher sur les raisons qui pourraient expliquer pourquoi les sondages n’avaient pas bien estimé le vote pour l’Action démocratique du Québec (ADQ) lors des dernières élections, l’écart entre l’intention de vote déclarée et le vote ayant été de 5%.
Deux raisons sont habituellement invoquées lorsque les sondages « se trompent » : Soit les électeurs ont changé d’avis entre le moment où ils ont été interrogés et le jour du scrutin, soit les non-répondants – à la question sur l’intention de vote ou au sondage lui-même – n’avaient pas la même intention de vote que les répondants.
Notre équipe de recherche (John Goyder, de l’Université de Waterloo, et moi-même) a collaboré avec CROP et La Presse au cours des dernières élections pour mener une recherche permettant entre autres de répondre à ces questions.
Dans la semaine qui a suivi l’élection, nous avons effectué un sondage auprès des répondants aux sondages préélectoraux faits par CROP durant la campagne. Plus de 80% des répondants au dernier sondage CROP effectué du 15 au 22 mars, soit de deux à dix jours avant les élections du 26 mars 2007, ont été joints après les élections.
Parmi les 602 personnes qui ont révélé leur vote, un peu plus de 16% n’ont pas voté comme elles avaient dit vouloir le faire. Ces répondants «volatiles» se répartissent comme suit: 4,1% sont passés à I’ADQ, 3,3% au PLQ; 6,9% au PQ et 2,2% à Québec solidaire ou au Parti vert. Qui a perdu dans ces mouvements? Les pertes touchent l’ADQ pour 4,1%, le PLQ pour 3,2% le PQ pour 2,9% et Québec solidaire ou le Parti vert pour 6,0% (ces derniers changements se faisant proportionnellement plus vers le Parti québécois).
Il y a donc eu des mouvements entre les partis durant les derniers jours avant le scrutin mais ceux-ci ont été plus favorables au Parti québécois qu’à l’ADQ et ont nui plus aux deux petits partis qu’aux trois principaux.
Par ailleurs, 7,0% de ceux qui ont révélé leur vote s’étaient dits indécis ou n’avaient pas révélé leur intention de vote au sondage préélectoral. Ils se répartissent sensiblement de la même manière que les autres répondants. Au total, les mouvements provenant des autres partis ou des indécis vers l’ADQ ont donc atteint 6,7% alors qu’ils atteignaient 5% vers le PLQ, 8,9% vers le PQ et 2,7% vers Québec solidaire ou le Parti vert.
Après l’ensemble de ces mouvements, le vote déclaré lors du sondage postélectoral se situe à l’intérieur de la marge d’erreur si on le compare aux résultats du scrutin. L’ADQ se situe à 27,6%, soit à 3,2% de moins que le vote obtenu, et le PLQ à 31,3% (1,8% de moins que le vote). Toutefois, le Parti québécois est maintenant surévalué à 32% (à la limite de la marge d’erreur étant donné le vote de 28,3%). La prise en compte des mouvements déclarés permet donc d’obtenir une estimation du vote à l’intérieur de la marge d’erreur mais, étant donné le peu d’écart entre les partis, elle ne permet toujours pas de bien estimer l’ordre d’arrivée, mettant même le Parti québécois au premier rang.
Il faut donc conclure que c’est en premier lieu la volatilité de l’électorat qui explique l’écart entre le dernier sondage CROP et le vote. Il faut également conclure qu’il n’y a pas eu, du moins en fin de campagne, un mouvement vers l’ADQ nettement. plus fort que vers les autres partis.
Pourquoi changer?
Tous les répondants qui n’indiquaient pas avoir voté comme ils en avaient exprimé l’intention ou qui étaient indécis au départ ont été interrogés sur les raisons de leur choix. La moitié des répondants qui sont passés à l’ADQ justifient leur choix par une simple volonté de changement. Suivent le chef et le programme comme principales explications. Pour ce qui est des mouvements vers le PLQ, ils sont davantage justifiés par le candidat dans la circonscription et par l’importance accordée à l’expérience et à la continuité.
Enfin, les répondants qui sont allés vers le Parti québécois sont les plus nombreux (près de 40%) à ne pas donner de justification à leur changement. Suivent trois raisons qui arrivent à égalité : le fait de se définir comme souverainiste, le candidat dans le comté et le fait d’être contre un ou l’autre des deux autres partis.
Pouvons-nous tirer de ces informations des enseignements pour une éventuelle campagne? Il ressort des éléments présentés – et les derniers sondages publiés semblent le confirmer – que le Québec est en ce moment divisé en trois parties relativement égales et que les mouvements entre les partis politiques sont relativement courants. Ces mouvements ne sont pas nécessairement motivés par des changements fondamentaux dans les opinions et relèvent plutôt d’éléments conjoncturels. Dans une telle situation, l’estimation du transfert des intentions de vote en nombre de circonscriptions relève de la haute voltige.
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Pondération des sondages et représentativité de l’échantillon
Un lecteur nous faisait remarquer hier à propos du récent sondage CROP-La Presse le fait que les données employées pour pondérer les échantillons des sondages d’opinion afin de les rendre représentatifs de la population datent de six ans, soit du Recensement du Canada de 2001. Folliculaire écrivait:
(…) Les données ont été pondéré sur le recensement de 2001. Depuis le début 2007, les nouveaux chiffres du recensement sont disponibles (du moins, certain). 6 ans de différence, c’est assez important.
Rappelons qu’au Canada, les recensements ont lieu à tous les cinq ans (aux États-Unis, à titre d’exemple, ça a lieu aux 10 ans). Le dernier recensement au Canada date de 2006. Dès lors, pourquoi ne pas employer les résultats les plus récents?
C’est vrai que ça peut sembler long, pondérer un sondage réalisé en 2007 en fonction du Recensement de 2001, mais il faut comprendre que les résultats du Recensement de 2006 ne sont pas encore entièrement rendus publics. Pour l’instant, ce n’est que la population brute de chaque province, région, municipalité, etc. qui est connue (et encore, ça date de mars dernier).
D’après Statistique Canada, la publication des données s’échelonnera jusqu’au 1er mai 2008. D’ici là, des données capitales pour les sondeurs manquent. Les données portant sur l’âge et le sexe seront publiées le 17 juillet prochain, celles sur la langue (s’il y a un élément capital dans l’analyse des comportements électoraux au Québec, c’est bien celui là) le 4 décembre prochain et celles sur le marché du travail (profession, scolarité, etc.) le 4 mars 2008. Bref, il manque de gros morceaux au Recensement de 2006 avant de l’employer pour pondérer les sondages d’opinion.
Cela étant, il n’y a vraisemblablement pas eu de bouleversements majeurs dans la composition de la population québécoise entre 2001 et 2006. Ça serait surprenant que l’on découvre que la population de la Gaspésie ait augmenté à 2 millions d’habitants, que les hispanophones représentent soudainement 40% de la population du Québec ou que le revenu des ménages ait augmenté ou baissé de 50% en cinq ans. Dès lors, nous ne croyons pas que la pondération des sondages de 2007 en fonction du Recensement de 2001 ait un impact fondamental sur les résultats.
Ça a juste l’air fou, mais dans ce cas-ci, on ne peut pas blâmer les sondeurs.
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Nous sommes conscients qu’en ce lendemain d’élections, nous ne nous ferons pas d’amis en proposant “plus de sondages”. En fait, par “plus de sondages”, nous entendons “plus de un type de sondage en particulier”.
Depuis lundi soir dernier, chacun avance sa petite explication sur les facteurs qui ont amené les électeurs québécois à voter comme ils l’ont fait (sur une base individuelle, s’entend), sur la signification de leur geste ainsi que sur les conséquences sur le plan politique. Par exemple, nous citions ce matin un article dans lequel le président de Léger Marketing, Jean-Marc Léger, avançait que les gains de Québec solidaire et du Parti vert pouvaient avoir carrément couté la victoire au Parti québécois. Ce n’est pas que la thèse soit farfelue en soi, mais ça manque un peu de démonstration. Une analyse macro des résultats électoraux ne permet pas nécessairement d’inférer sur les transferts de vote sur une base individuelle (à moins que Léger Marketing ait des données là-dessus, mais si c’est le cas, le simple fait de les rendre publiques enrichirait drôlement le débat). Nous parlons spécifiquement de Jean-Marc Léger ici, mais le commentaire s’applique à bon nombre de journalistes, commentateurs et analystes qui se sont fait entendre depuis lundi soir.
Comment y voir plus clair? Comment faire en sorte que les analyses électorales (et nous nous incluons là dedans) reposent sur des bases fiables et complètes? Une solution pourrait être de lancer une “étude électorale québécoise”, sur le modèle des grandes enquêtes universitaires sur les élections, telles que les American National Election Studies, les British Election Studies ou l’Étude électorale canadienne. Ce ne serait pas un précédent, il y a déjà eu de telles études réalisées par le passé, notamment par Maurice Pinard, professeur émérite à McGill, en 1960, 1962 et 1973, mais il n’y en a eu aucune lors des récentes élections, sans compter qu’un des intérêts de l’exercice est de le tenir à chaque élection générale afin d’évaluer l’évolution de l’électorat québécois au fil des années.
Qu’est-ce que ça pourrait donner de réaliser une étude universitaire sur les élections générales au Québec, demanderez-vous? En transposant les objectifs de l’Étude électorale canadienne dans le cas québécois, on pourrait avoir une idée assez claire de l’éventuel apport d’une “étude électorale québécoise”:
Le premier objectif de l’Étude est de produire un compte-rendu complet de l’élection afin d’identifier les principales raisons pour lesquelles les électeurs appuient un parti ou un candidat donné, de déterminer les constantes et les changements pendant la campagne et d’une campagne à l’autre, et de mettre en lumière les similarités et les différences entre le comportement électoral au Canada et dans d’autres pays démocratiques. Le deuxième objectif est de contribuer au développement de connaissances scientifiques sur les motivations des électeurs, la signification des élections et sur les campagnes électorales dans les pays démocratiques. Le troisième objectif est de constituer un ensemble important de données sur les attitudes et les opinions des Canadiens à l’égard d’un large éventail d’enjeux sociaux, économiques et politiques, ainsi que de rendre ces données disponibles auprès des chercheurs en science politique, en sociologie, en économie, en communication et en journalisme.
Mais alors, demanderez-vous encore, en quoi un sondage réalisé par des universitaires serait plus fiable qu’un autre réalisé par CROP ou Léger? En guise de réponse, citons le sommaire méthodologique de l’Étude électorale canadienne de 2000:
Le sondage a d’abord été mené durant la campagne électorale (fédérale de 2000) auprès de 3651 répondants. Puis, 2862 de ces répondants ont été interrogés à nouveau après l’élection. Enfin, 1535 personnes interviewées après l’élection ont complété un questionnaire postal.
Ajoutons à titre d’exemple que le questionnaire pré-électoral de l’Étude électorale canadienne de 2006 (voir ici: format pdf) fait pas moins de 159 pages dans sa version bilingue. Bref, sauf tout le respect qu’on doit aux maisons de sondage qui font face à diverses contraintes lorsqu’elles réalisent des sondages pour un journal ou un réseau télé, ça serait beaucoup plus complet qu’un questionnaire lu en 5 minutes sur l’heure du souper auprès de 1000 personnes.
Alors, avis aux chercheurs universitaires, think tanks, instituts de recherche et autres organismes subventionnaires: une étude électorale québécoise permanente serait une contribution intéressante au domaine de la science politique au Québec et aiderait certainement à donner un éclairage intéressant à l’évolution de l’opinion publique au Québec.
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Le blogueur Stéphane Dion de Go-Québec.com lance une initiative intéressante et inédite (à notre connaissance) au Québec: réaliser un sondage de sortie des urnes ou “exit poll” par Internet le 26 mars prochain:
Avec l’aide des électeurs, nous voulons déterminer les résultats des élections du 26 mars prochain avant la fermeture des bureaux de vote. Les électeurs sont invités à compléter anonymement un très court sondage par circonscription sur le choix qu’ils ont fait.
Les résultats obtenus seront combinés avec des données des élections antérieures ainsi qu’une projection de la répartition des votes dans les 125 circonscriptions. La tendance des votes dans une circonscription permettra de déclarer un candidat élu.
Un sondage de sortie des urnes est un sondage réalisé immédiatement après que les électeurs aient quitté le bureau de vote et où, contrairement aux sondages d’opinion où l’on questionne les répondants sur leurs intentions de vote, on demande aux répondants l’identité du candidat ou du parti pour lequel ils ont réellement voté. Pour de plus amples renseignements sur la méthodologie employée lors du sondage de sortie des urnes réalisé pour les principaux réseaux télé américains lors des élections de mi-mandat aux États-Unis en 2006, nous vous invitons à lire ce billet (en anglais) de Mark Blumenthal sur pollster.com.
En quoi est-ce une démarche inédite? Pourquoi n’y a-t-il pas de sondages de sortie des urnes au Québec, par exemple par CROP ou Léger Marketing? Tout simplement en raison de la rapidité avec laquelle les résultats sont compilés. Les sondages de sortie des urnes sont généralement employés dans des pays populeux (ex: États-Unis, France) et/ou qui n’ont pas les ressources qui permettent de communiquer rapidement les résultats du dépouillement, ce qui fait en sorte que le dépouillement des bulletins de vote peut s’échelonner sur plusieurs jours. Une autre utilité des sondages de sortie des urnes est de contre-vérifier les résultats “officiels” d’un scrutin dans une démocratie dite “émergente” afin d’essayer de détecter les possibles cas de fraude électorale. Au Québec (et aussi au fédéral), le premier décompte des bulletins de vote est complété dans les heures suivant la fermeture des bureaux de scrutin et, sauf résultats extrêmement serrés ou retards dans une section de vote donnée, on peut rapidement proclamer un vainqueur.
Mais revenons au projet de sondage de sortie des urnes de Go-Québec.com. De prime abord, la méthode suggérée est, à certains égards, questionnable sur le plan méthodologique:
- D’abord, comme tout sondage réalisé par Internet, rien ne garantit, contrairement aux sondages de sortie des urnes réalisés “en personne” à la sortie des lieux de votation, que chaque individu ne sera sondé qu’une seule fois.
- Ensuite, étant donné que l’échantillon ne sera pas sélectionné de façon aléatoire (les répondants sont ceux qui le veulent bien), rien n’indique que l’échantillon sera représentatif de la composition de l’électorat québécois. De plus, après avoir répondu au sondage, nous nous sommes rendus compte qu’aucune question n’est posée sur les caractéristiques socio-économiques des répondants (âge, sexe, lieu de résidence, langue maternelle, scolarité, revenu, etc.), contrairement à ce qui se fait dans d’autres pays. Rien ne permet de pondérer l’échantillon en fonction des caractéristiques de la population, ce qui rend toute extrapolation pour le moins risquée.
- Enfin, les sondages de sortie des urnes sont généralement employés afin de tenter de prédire les résultats d’une élection à l’échelle nationale (par exemple lors d’élections présidentielles) et non pas de prédire les résultats à l’échelle des circonscriptions. Dans un monde idéal, avec un échantillon représentatif de la population, ça prend un minimum de répondants dans chaque circonscription pour faire une projection valide. À 500 répondants par circonscription (marge d’erreur d’environ 5% tout de même!), ça prendrait au mimimum 62 500 répondants à l’échelle québécoise! Même Léger Marketing ou CROP seraient incapables fournir à la tâche en quelques heures, même par Internet, même avec toutes les précautions que les firmes de sondages prennent lorsqu’elles sondent par Internet!
Autrement dit, la démarche de Go-Québec.com s’apparente davantage à un “straw poll“, comme on en retrouve à tous les jours sur Cyberpresse, qu’à un sondage de sortie des urnes. Nous n’avons rien contre les straw polls en soi, nous en avons un nous-mêmes dans la section Élection 2007 de ce site. Le problème est de croire qu’un straw poll peut être représentatif de l’ensemble d’une population. Par définition, un straw poll n’est représentatif que de l’opinion des répondants et ne devrait avoir aucune prétention scientifique.
Cela étant, l’exercice de Go-Québec.com, à défaut d’être un vrai sondage scientifique, risque de mettre encore plus de piquant à la soirée électorale, comme s’il n’y en avait pas déjà assez comme ça!
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À lire ce matin dans La Presse: Denis Lessard présente les travaux de Mme Claire Durand, professeure au département de sociologie à l’Université de Montréal, sur les sondages électoraux. Mme Durand a d’ailleurs établi, sur la base des résultats de 2003 par circonscription, une liste des «victoires» attendues pour chaque parti le 26 mars prochain, liste que vous pouvez consulter sur le dépôt public de données de Mme Durand (cliquez ici).
Le mardi 20 mars 2007
ANALYSE
La sondeuse de sondages
Denis Lessard
La PresseTout le monde semble convaincu qu’une faible participation aux élections du 26 mars sera nécessairement une mauvaise nouvelle pour le Parti québécois. On tient aussi pour acquis, sans nuances, le nombre des sièges obtenus en 2003.
«Ces mythes m’énervent», lance Claire Durand qui, depuis des années à l’Université de Montréal, «sonde les sondages». De son oeil de «méthodologue», elle vérifie si les enquêtes d’opinion dont les médias font leurs choux gras en période électorale sont faites selon les règles de l’art.
Pour terrasser quelques impressions reçues, la chercheuse a pris le temps de refaire ces fameuses listes que les organisateurs des partis gardent précieusement dans leur poche. Ils ne montrent jamais ces palmarès des circonscriptions - elles décourageraient bien des aspirants candidats.
Les victoires, comme les défaites, sont courtes bien souvent. Cette circonscription peinte en bleu en 2003, devrait être plus foncée, et cette autre, un gain libéral, mériterait d’être rose plutôt que rouge.
Car c’est une chose d’établir le pourcentage que pourrait obtenir un parti dans l’urne le soir des élections; c’en est une autre de prédire comment ce chiffre se distribuera dans les circonscriptions.
C’est d’ailleurs pourquoi les sondeurs ont toujours rappelé que le PLQ avait besoin d’une demi-douzaine de points d’avance, pour l’emporter - une partie importante de ses partisans sont concentrés dans l’ouest de Montréal.
Pour chacun des trois principaux partis, Mme Durand a établi, circonscription par circonscription, l’ordre des «victoires» attendues le soir du 26, sur la base du vote exprimé en 2003 - la liste que les apparatchiks gardent dans leur petite poche.
Bien sûr, des courses à trois peuvent toujours brouiller les cartes. La montée de l’ADQ dans une circonscription péquiste peut, tout à coup, ouvrir la voie à un élu libéral. C’est ainsi que les libéraux soutiennent avoir des chances dans Nicolet ou dans Berthier. Dans Roberval ou Lévis, les libéraux ont été élus en 2003 grâce à une bonne performance de l’ADQ.
Premier constat, les libéraux peuvent compter sur plus de 35 circonscriptions où, en 2003, ils ont gagné avec une avance d’au moins 20 % des voix sur leur plus proche adversaire, montre le manuel Durand.
Les victoires du PQ sont moins fortes. Dans 25 des 45 circonscriptions les plus péquistes, il y a quatre ans, le gagnant avait moins de 10 % d’avance sur son plus proche adversaire.
L’ADQ, de son côté, est habituée aux courtes victoires, et plus encore aux défaites de justesse. En 2003, sur cinq élus, l’ADQ a gagné par plus de 10 % des voix seulement une fois. C’était dans Rivière-du-Loup grâce à Mario Dumont.
Comme tous les sondages montrent que l’ADQ aura plus de voix qu’en 2003 - elle avait alors recueilli 18 % des suffrages - la liste de Mme Durand montre très nettement là où l’ADQ a le plus de chances. C’était prévisible, la région de Québec s’y retrouve au complet. Mais en descendant la liste, on retrouve aussi Mirabel, René-Lévesque, Arthabaska, Saint-Maurice, Berthier, Rouyn-Noranda, Frontenac, Maskinongé.
Petits calculs intéressants : si l’ADQ parvient à faire élire ses candidats dans les 20 circonscriptions où elle a eu ses meilleurs scores en 2003, on risque de voir un gouvernement libéral minoritaire -12 de ces 20 circonscriptions appartiennent actuellement au PLQ, qui comptait 72 sièges lors de la dissolution de la Chambre.
Pour Claire Durand, quand on regarde qui l’a emporté de justesse en 2003, «on a l’impression qu’il y a une quarantaine de circonscriptions où les libéraux n’ont pas trop à s’inquiéter. Sauf dans la région de Québec, rouge en 2003, où l’on retrouve 14 des 20 «meilleurs comtés» adéquistes.
En revanche, partout ailleurs, les péquistes et les adéquistes sont, dans bien des cas, à se battre pour les mêmes sièges. «En 1973, le PQ et l’Union nationale étaient souvent dans les mêmes circonscriptions et Bourassa était passé entre les deux», se souvient-elle.
La faiblesse du PLQ chez les francophones est certes un élément défavorable, mais en 2003, cela ne l’a pas empêché de l’emporter. Il faut dire que Jean Charest avait manifestement remporté le débat télévisé, ce qui est loin d’être le cas cette année.
La théorie qui veut que plus la participation est faible plus le PQ est en difficulté, est un autre «mythe», selon la spécialiste. En apparence, cela semble pourtant évident. Les libéraux ont toujours grosso modo 1,7 million de votes dans les urnes depuis 1989. Ce score s’est vérifié en 1989, 1994, 1998 et 2003.
C’est le suffrage péquiste qui varie. Quand le PQ l’emporte, c’est qu’il a autant ou presque autant de voix que le PLQ. Quand il perd, c’est qu’il lui manque entre 400 000 et 500 000 voix le soir du vote, ce qui entraîne la participation à la baisse. L’ADQ, pour sa part, a augmenté à chaque scrutin de 200 000 voix son appui populaire.
Mais quand on scrute la participation circonscription par circonscription, on constate que c’est là où la participation a été la plus forte que le PQ a, plus souvent qu’à son tour, mordu la poussière.
Dans les 10 circonscriptions où on a voté le plus massivement, le PQ a perdu neuf fois. Et la tendance se confirme dans les 20 circonscriptions qui suivent au palmarès de la participation.
Inversement, dans les 30 endroits où la participation a été la plus faible, en 2003, le PQ a perdu un seul siège, passant de huit à sept.
Pour obtenir le palmarès Durand:www.webdepot.umontreal.ca/Usagers/durandc/MonDepotPublic/electionQc2007
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Le Parti libéral et les “discrets”
Pierre Drouilly, professeur à l’UQAM et spécialiste des questions de méthodologie quantitative et de sociologie politique et électorale, a écrit un texte publié ce matin dans Le Devoir dans lequel il traite d’un sujet pointu, mais néanmoins important dans l’analyse des sondages électoraux: la répartition des “discrets”, c’est-à-dire ceux qui se disent indécis, “ne savent pas” ou refusent de répondre dans un sondage politique. En effet, la composition de cette partie de l’échantillon n’est pas la même que celle de l’ensemble des répondants d’un sondage. Dans le cas du Québec, les “discrets” présenteraient des caractéristiques qui les rapprocheraient du Parti libéral du Québec. Dès lors, répartir les indécis proportionnellement aux intentions de vote constituerait une erreur méthodologique qui conduirait à une sous-évaluation du vote libéral (Note: sans prendre directement en compte les caractéristiques des “discrets”, CROP répartit les indécis/discrets en fonction de la réponse sur la question de la souveraineté du Québec. Quant à Léger Marketing, il répartit les indécis en proportion des intentions de vote). Bref, selon M. Drouilly, le Parti libéral du Québec serait en meilleure posture que ce que ne l’indiqueraient les sondages récents compte tenu de la manière dont les indécis sont répartis.
M. Drouilly fut parmi les premiers à mettre de l’avant au Québec le concept de “l’effet miroir”, ce phénomène en vertu duquel les variations de la courbe des intentions du vote du Parti libéral du Québec (avant répartition des indécis) varient inversément à celles des “discrets” (lorsque les intentions de vote libérales montent, les “discrets” baissent, et vice-versa).
Opinion
Sondages: le PLQ est en meilleure posture qu’il n’y paraît
Pierre Drouilly, Professeur, Département de sociologie, Université du Québec à Montréal
Le Devoir
Édition du mardi 06 mars 2007Lorsqu’on effectue un sondage, il y a toujours une proportion non négligeable de gens qui refusent de répondre à certaines questions, en particulier qui refusent de dire pour qui ils voteraient si une élection avait eu lieu le jour de l’entrevue, soit qu’ils se déclarent «indécis» ou qu’ils répondent «je ne sais pas» ou encore qu’ils refusent tout net de répondre. Nous qualifions tous ces répondants des «discrets», car souvent se déclarer «indécis» ou dire «je ne sais pas» est une façon commode, et polie, de refuser de révéler ses intentions de vote.
Ne pas tenir compte de ces répondants «discrets», qui sont rarement moins de 10 % et qui parfois représentent jusqu’à 20 % de l’échantillon (soit un répondant sur cinq), et ne retenir que ceux qui ont exprimé une préférence politique, c’est répartir les répondants discrets au prorata des réponses exprimées. C’est donc faire une hypothèse implicite, à savoir que ces répondants discrets, s’ils avaient exprimé une opinion, l’auraient fait dans les mêmes proportions que ceux qui ont effectivement exprimé des opinions. Or cette hypothèse est intenable.
Autre profil
L’analyse des sondages montre, de manière récurrente, que le profil socio-démographique des répondants discrets n’est pas le même que celui des répondants qui expriment leurs intentions de vote.
On retrouve plus de répondants discrets parmi les femmes, les personnes âgées, les personnes faiblement scolarisées, celles ayant des bas revenus, en milieu rural plus qu’en milieu urbain, et parfois parmi les non-francophones. Or tous ces groupes ont en général tendance à appuyer plus fortement les partis politiques fédéralistes. Leur attribuer les mêmes opinions que ceux qui ont révélé les leurs est donc une erreur.
Pour prendre un exemple extrême, les non-francophones qui expriment une intention de vote ne sont que 10 % environ à déclarer qu’ils voteraient pour le Parti québécois: peut-on dès lors penser que parmi les non-francophones «discrets», le tiers environ voteraient pour le PQ comme l’ensemble des répondants qui ont exprimé une intention de vote claire? C’est pourtant l’hypothèse implicite que fait la pondération proportionnelle.
Lors du référendum de 1995, cette mésinterprétation des sondages fut flagrante: alors que de la mi-octobre jusqu’au jour du vote, tous les sondages mettaient le OUI en avance dans les intentions de vote exprimées (donc aussi dans une répartition proportionnelle des discrets), ce fut finalement le NON qui l’emporta.
Prime de l’urne
C’est le même phénomène, souvent appelé «prime de l’urne», qui fait que, dans toutes les consultations électorales depuis 1970 sauf une, le Parti libéral obtient davantage, le jour du vote, que ce que les derniers sondages précédant le vote lui attribuent par cette méthode de répartition proportionnelle. Une répartition plus réaliste des répondants discrets (les trois quarts au NON et un quart au OUI) annonçait au contraire une victoire serrée du NON, ce qui fut le cas.
La seule exception, sur cette longue période de plus de 30 ans, fut l’élection de 2003, alors que cette méthode de répartition proportionnelle a prévu très précisément le vote réel.
À la suite de cette élection, certains sondeurs ont rangé au placard leurs différentes méthodes de répartition des répondants discrets et sont revenus à la traditionnelle répartition au prorata. Nous estimons que cela est imprudent, car nous pensons qu’en 2003 la bonne concordance des sondages pondérés proportionnellement avec le vote réel ne fut qu’une coïncidence qui ne se reproduira pas forcément.
Le graphique ci-joint représente l’évolution depuis un an des intentions de vote pour le Parti libéral et l’évolution du pourcentage de répondants discrets dans les sondages. On constate que les deux courbes évoluent de façon symétrique: quand le pourcentage de discrets augmente d’un sondage à l’autre, les intentions de vote pour le Parti libéral diminuent, et inversement quand le pourcentage de discrets diminue, les intentions de vote pour le Parti libéral augmentent.
On remarquera en particulier que les deux sondages qui ont eu le moins de répondants discrets (8 % dans le Léger Marketing du 5 décembre 2006 et 7 % dans celui du 24 février 2007) sont aussi ceux dans lesquels le Parti libéral obtient son meilleur score (34 % de l’échantillon). Nous avons appelé en 1995 ce phénomène «l’effet miroir», car les deux courbes semblent le reflet l’une de l’autre dans un miroir. Ce phénomène illustre bien que les répondants discrets ont plutôt un profil «libéral», et qu’il faut donc en attribuer une plus forte proportion au Parti libéral dans la répartition des répondants discrets.
Bien entendu, cette proportion est inconnue, et ne pourra être estimée que le lendemain des élections. Mais en se basant sur l’expérience passée et en attribuant une forte majorité des répondants discrets au Parti libéral (entre la moitié et les deux tiers), on se rend compte que celui-ci est probablement en meilleure posture dans l’opinion publique qu’il n’y paraît.
Selon une estimation raisonnable, le Parti libéral se situerait pas loin de 40 % des intentions de vote (six points de moins que son vote de 2003, mais à peu de choses près le même niveau que le pourcentage de répondants qui se disent satisfaits du gouvernement libéral), le Parti québécois à environ 30 % (trois points de moins qu’en 2003), l’ADQ à environ 20 % (deux points de mieux qu’en 2003), les autres partis (Parti vert, Québec solidaire, etc.) se partageant les 10 % restants.
Avec une telle distribution des opinions, la réélection du gouvernement Charest est évidemment loin d’être exclue.
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Sondage Léger: reality check
Nous vous rassurons tout de suite: cet article n’a pas pour but d’essayer de trouver des failles dans le “méga-sondage” publié hier. Alors que les commanditaires s’intéressaient surtout aux luttes serrées que laissaient entrevoir les résultats régionaux, nous allons comparer les résultats des sous-échantillons régionaux avec les résultats de la dernière élection générale. Bref, c’est le “swing vote” potentiel qui nous intéresse ici.
Nous avertissons d’entrée de jeu: avec une marge d’erreur allant de 4 à 7% selon la région, l’exercice doit être pris avec un grain de sel. De plus, le territoire des circonscriptions électorales ne coïncide pas nécessairement partout avec celui des régions administratives, ce qui vient apporter un bémol supplémentaire aux résultats qui suivent (sans compter qu’il n’existe aucun élément dans le sondage qui nous indique à quelle région est rattachée la circonscription d’Ungava; elle a donc été exclue du calcul des résultats régionaux de 2003). Bref, c’est un exercice qui peut être éclairant à certains égards, mais nous vous invitons à exercer votre jugement critique en les lisant.
Enfin, autre précision élémentaire: le sondage est une photographie de la situation telle qu’elle se présentait du 24 au 28 février derniers et non une prévision de ce qui nous attend d’ici le 26 mars prochain.
Bas-Saint-Laurent/Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine (01-11): 8 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 39,62% | 37,54% | 21,59% | 1,25% |
Sondage Léger | 40% | 29% | 27% | 4% |
n=201 marge d’erreur=7% |
Appui libéral stable, mais baisse du PQ qui excède la marge d’erreur, principalement vers l’ADQ, mai aussi vers les autres partis (QS à 2%, VRT à 2%). Le territoire des 8 circonscriptions coïncide à peu près complètement avec celui des deux régions administratives.
Saguenay–Lac-Saint-Jean/Côte-Nord (02-09): 8 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 35,21% | 42,73% | 19,79% | 2,27% |
Sondage Léger | 38% | 39% | 15% | 9% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Baisse du PQ et de l’ADQ, hausse des libéraux et des autres partis (QS à 5%, VRT à 3%), le tout à l’intérieur de la marge d’erreur. Le territoire des 8 circonscriptions coïncide à peu près complètement avec celui des deux régions administratives.
Capitale-Nationale (03): 11 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 41,20% | 28,86% | 27,11% | 2,83% |
Sondage Léger | 30% | 27% | 31% | 12% |
n=500 marge d’erreur=4% |
Légère variation du PQ et de l’ADQ à l’intérieur de la marge d’erreur, forte baisse des libéraux et forte hausse des autres partis (QS à 5%, VRT à 6%). Le territoire des 11 circonscriptions coïncide à peu près complètement avec celui de la région administrative.
Mauricie/Centre-du-Québec (04-17): 8 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 38,12% | 35,99% | 24,31% | 1,57% |
Sondage Léger | 36% | 24% | 30% | 10% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Appui libéral à peu près stable, renversement de position du PQ et de l’ADQ et hausse des autres partis (QS à 6%, VRT à 3%) qui excède la marge d’erreur. Le territoire des 8 circonscriptions présente des différences marquées par rapport à celui des deux régions administratives (surtout la région 17).
Estrie (05): 6 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 47,96% | 33,39% | 17,26% | 1,39% |
Sondage Léger | 33% | 35% | 19% | 12% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Légère hausse PQ et de l’ADQ, baisse libérale qui excède la marge d’erreur et hausse des autres partis (QS à 9%, VRT à 3%) qui excède également la marge d’erreur. Le territoire des 6 circonscriptions présente des différences marquées par rapport à celui de la région administrative.
Montréal (06): 28 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Sondage Léger | 32% (E) 61% (O) | 29% (E) 17% (O) | 21% (E) 10% (O) | 18% (E) 12% (O) |
n=200 marge d’erreur=7% (Montréal Est et Ouest) |
Nous sommes confrontés à une double impossibilité ici: impossibilité d’une part de fusionner les deux échantillons de Léger (Montréal-Est et Montréal-Ouest), faute de pouvoir pondérer les résultats en fonction des caractéristiques de la population de l’île de Montréal et impossibilité d’autre part de subdiviser la région administrative de Montréal, faute de connaître les limites géographiques exactes des deux échantillons montréalais de Léger Marketing. Voici néanmoins les données brutes de Léger Marketing pour votre information.
Outaouais (07): 5 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 62,41% | 22,74% | 11,98% | 2,86% |
Sondage Léger | 45% | 23% | 20% | 15% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Appui péquiste stable, baisse libérale marquée qui excède la marge d’erreur et hausse de l’ADQ et des autres partis (QS à 6%, VRT à 8%) qui excède également la marge d’erreur. Le territoire des 5 circonscriptions est identique à celui de la région administrative.
Abitibi-Témiscamingue (08): 3 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 38,65% | 37,37% | 22,58% | 1,41% |
Sondage Léger | 27% | 42% | 20% | 10% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Légère hausse du PQ et légère baisse de l’ADQ, à l’intérieur de la marge d’erreur dans les deux cas, baisse libérale et hausse des autres partis (QS à 5%, VRT à 4%) qui excèdent la marge d’erreur. Le territoire 3 circonscriptions est identique à celui de la région administrative.
Chaudière-Appalaches (12): 8 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 38,12% | 24,36% | 36,01% | 1,52% |
Sondage Léger | 32% | 27% | 37% | 6% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Appui adéquiste stable, baisse libérale et hausse du PQ et des autres partis (QS à 3%, VRT à 3%), le tout à l’intérieur de la marge d’erreur. Le territoire des 8 circonscriptions présente des différences marquées par rapport à celui de la région administrative (surtout à l’ouest).
Laval (13): 5 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 51,66% | 32,68% | 12,12% | 3,54% |
Sondage Léger | 43% | 28% | 22% | 6% |
n=200 marge d’erreur=7% |
Baisse des libéraux qui excède la marge d’erreur, baisse moyenne du PQ, mais à l’intérieur de la marge d’erreur, forte fausse de l’ADQ qui excède la marge d’erreur et hausse modeste des autres partis (QS à 1%, VRT à 5%). Le territoire des 5 circonscriptions coïncide parfaitement avec celui de la région administrative.
Lanaudière/Laurentides (14-15): 16 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 35,42% | 41,65% | 20,93% | 2,00% |
Sondage Léger | 17% | 39% | 37% | 7% |
n=300 marge d’erreur=6% |
Baisse légère du PQ à l’intérieur de la marge d’erreur, mais renversement de position entre les libéraux et l’ADQ et hausse des autres partis à l’intérieur de la marge d’erreur (QS à 5%, VRT à 1%). Le territoire des 14 circonscriptions coïncide parfaitement avec celui des deux régions administratives.
Montérégie (16): 21 circonscriptions
LIB | PQ | ADQ | Aut. | |
---|---|---|---|---|
Élection 2003 | 44,26% | 37,34% | 16,07% | 2,33% |
Sondage Léger | 33% | 31% | 27% | 10% |
n=300 marge d’erreur=6% |
Baisse des libéraux et du PQ qui égale ou excède la marge d’erreur, le tout au profit de l’ADQ et des autres partis (QS à 4%, VRT à 5%) dont la hausse des appuis est supérieure à la marge d’erreur. Le territoire des 21 circonscriptions présente certaines différences par rapport à celui de la région administrative.
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Gouverner selon les sondages
Les réguliers de ce site l’auront probablement deviné: nous sommes maniaques des sondages politiques (avec toute la rigueur que ce type d’outil demande en science politique, bien entendu). Alors, quand Jean-Marie De Koninck, professeur de mathématiques à l’Université Laval, fait la suggestion suivante, nous ne pouvons nous empêcher de songer à toutes les conséquences que cette idée utopique pourrait entraîner, à défaut d’y croire.
Il n’est peut-être pas loin, le jour où l’expression “gouverner avec l’oeil sur les sondages” aura une connotation positive plutôt que préjorative:
Le mardi 20 février 2007
VERS LE 26 MARS JOUR 1
Pourquoi pas un sondage électoral ?
Pierre Asselin
Le Soleil
QuébecLa marge d’erreur d’une élection générale est plus grande que celle d’un sondage, estime le mathématicien Jean-Marie De Koninck. Dans ces conditions, pourquoi ne pas laisser tomber là méthode électorale pour élire nos représentants au moyen d’un sondage scientifique?
Un échantillon de 1067 personnes choisies statistiquement donnerait une meilleure image que le vote de 60% des 5,5 millions d’électeurs inscrits. Pourquoi? Parce que tous les groupes ne sont pas également représentés dans une élection générale. Les démunis et les moins instruits votent moins que les autres groupes, par exemple.
« C’est la première élection de Rush aux États-Unis, en 2000, qui m’y a fait penser. Seulement 47% des Américains admissibles étaient allés voter. Ça veut dire qu’il n’a été élu que par 24 % de la population Ce n’est pas représentatif, particulièrement des Noirs et des pauvres.
On se demande, est-ce qu’il n’y aurait pas une façon plus efficace d’élire nos représentants? Je pense tout de suite aux sondages Pourquoi ne pas y aller d’une manière scientifique? On prend un échantillon de 1000 personnes avec le bon pourcentage de femmes, d’hommes, de classes sociales, de nations autochtones, de minorités, etc.
Le prof de Laval avait développé cette thèse l’automne dernier dans la revue Découvrir. C’est scientifiquement démontré, explique-t-il, qu’avec un échantillon de 1067 personnes, la marge d’erreur n’est que de 3 %, peu importe la taille de la population. Pour une marge d’erreur de 2 %, il faut monter à 2 400 personnes et pour 1 % d’erreur, il faut un échantillon de 9 600 personnes.
L’idée du prof, c’est de choisir un échantillon représentatif et de donner 1000 $ à chaque électeur pour l’inciter, à aller voter. Même pour un échantillon de 9 600 personnes, ça ne ferait que 9,6 millions $, en regard des 250 millions $ que coûte une élection générale.
«Les gens vont dire que ça n’a pas de bon sens, que ça viole le principe de démocratie. Je leur répondrais que c’est vrai, mais le problème, c’est qu’ils ne vont pas voter.»
VOTE OBLIGATOIRE
En Australie, les taux de participation aux élections dépassent 90%. C’est parce que dans ce pays comme dans une vingtaine d’autres, le vote est obligatoire et l’amende est de 20$ pour ceux qui s’abstiennent de voter La marge d’erreur est donc beaucoup moins grande.
Le Parti démocrate australien compare cette obligation à d’autres qui sont faites aux citoyens : siéger comme juré, recevoir une éducation ou payer ses taxes. Jean-Marie De Koninck serait-il pour autant favorable à un tel système?
«Je ne serais pas d’accord avec ça, je trouve que c’est aller un peu loin. Je serais favorable à plus d’information, parce que les gens ne se rendent pas compte que leur vote peut avoir un impact. »
Il préfère réfléchir à des mesures qui inciteraient le citoyen à aller voter Par exemple, améliorer l’environnement physique des endroits où on va voter en offrant des beignes, du café, de l’animation, etc.
«Tant qu’à parler de probabilité, pourquoi ne pas faire tirer 10 voitures écologiques parmi tous ceux et celles qui exercent leur droit de vote? Chaque électeur aurait une chance sur 500 000 de gagner une voiture; c’est 28 fois plus de chances que de gagner à la 6/49, où la probabilité est d’une sur 14 millions Je parierais que le taux de participation passerait alors des 60% actuels à plus de 95%!»
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Toujours sur la question des partis politiques nommés comme choix de réponse dans les sondages d’opinion, M. André Larocque, professeur associé à l’École nationale d’administration publique (ENAP), signe ce matin dans Le Soleil une lettre ouverte, sous le titre-choc “Sondages manipulés?”, dans lequel il critique avec virulence le choix de Léger Marketing de ne pas mentionner le Parti vert du Québec parmi les choix de réponse proposés.
Par souci de transparence, il importe de mentionner que M. Larocque a occupé pendant plusieurs années (sous René Lévesque et Bernard Landry notamment) le poste de sous-ministre à la Réforme électorale au gouvernement du Québec, en plus d’avoir été candidat défait (ADQ) lors de l’élection partielle de 2001 dans Mercier. Nous rapportions par ailleurs en novembre dernier que M. Larocque est actuellement membre de l’exécutif national du Parti vert du Québec.
MISE À JOUR (6 février 2007, 20h): Voici l’article en question, mais avant, une correction s’impose. Contrairement à ce que laisse entendre M. Larocque dans sa lettre ouverte en affirmant que
depuis plus d’un an, chaque fois que les deux options Parti vert et Québec solidaire. sont présentées dans un sondage (y compris chez Léger Marketing), le premier fait grosso modo deux fois mieux que le second,
Léger Marketing n’a jamais mentionné le Parti vert du Québec dans aucun sondage sur les intentions de vote au Québec. On peut difficilement les accuser de manipuler ponctuellement les résultats en invoquant comme “preuve” une omission permanente dans leurs sondages!
Le Soleil
6 février 2007, p. 20Point de vue
André Larocque, professeur associé, ENAPSondages manipulés ?
Léger Marketing – Le Devoir et CROP – La Presse… le même jour (30 janvier 2007), c’est beaucoup d’information. La principale provient du fait que les deux donnent à peu près la même tendance pour les deux partis principaux. Mais qu’en est-il pour le reste ?
CROP établit le vote pour le Parti vert du Québec (PVQ) à 9%, presque le double du vote attribué à Québec solidaire. Or, stupéfaction, Léger Marketing choisit de ne même pas donner aux sondés la possibilité de répondre PVQ! S’il y a une caractéristique prédominante de la scène politique actuelle, c’est justement la priorité donnée par l’électorat à la question de l’environnement. Et c’est dans ce contexte-là, alors qu’il posait la question dans des sondages antérieurs, que Léger Marketing trouve soudain le moment opportun de ne pas offrir aux sondés l’alternative verte ! Ce qui ne l’empêche pas de sonder par rapport à Québec solidaire !
Depuis plus d’un an, chaque fois que les deux options Parti vert et Québec solidaire. sont présentées dans un sondage (y compris chez Léger Marketing), le premier fait grosso modo deux fois mieux que le second. Et cette fois, Léger Marketing choisit de maintenir’ le second et d’écarter le premier !
Le grand bond adéquiste s’explique peut-être par l’omission de l’option verte
Quand on cherche une réponse à l’oubli du PVQ, on est frappé par le fait que la grande «nouvelle» dans le sondage Léger Marketing provient de ce que l’ADQ fait un bond spectaculaire de 10%. Or, si Léger Marketing avait introduit l’option Parti vert et obtenu le même score que CROP, cela aurait donné au PVQ 9 % ! Le grand bond adéquiste est peut-être complètement contenu dans le fait qu’on ait omis l’option verte. Évidemment, on ne le saura jamais puisque le sondeur, justement, nous a volontairement privés de cette information…
Donc, en plus de se demander au nom de quoi Léger Marketing écarte l’option verte au moment même où tout le monde se dit vert, on est en droit de se demander s’il n’avait pas l’intention de produire un sondage choc – donc media friendly – en gonflant le vote de l’ADQ. Au moment où l’accommodement raisonnable est devenu le thème du jour; est-ce que Léger Marketing a eu la tentation d’y succomber?
On serait peut-être tenté d’écarter cette « mauvaise pensée» si on n’avait pas eu récemment le spectacle du directeur de CROP, qui nous apprenait, de sa propre bouche, que son sondage sur les «lucides» et les «solidaires» avait été biaisé en faveur des premiers ! Tout le monde sait que les maisons de sondages sont des maisons commerciales et qu’elles visent à tendre de la copie. Mais elles remplissent aussi une fonction sociale qui risque fort de se discréditer si elles généralisent la pratique de les biaiser elles-mêmes.
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À chaque sortie de sondage de Léger Marketing depuis l’ouverture de ce blogue, nous posons incessamment la question suivante: pourquoi le Parti vert du Québec n’est pas mentionné comme choix de réponse dans les intentions de vote, contrairement à CROP? Compte tenu que les verts récoltent de 7 à 10% des intentions de vote chez CROP depuis un an, il nous semble que cette omission risque d’affecter la validité des résultats.
Les responsables du Parti vert du Québec commencent également à poser publiquement la question:
Opinion
Lettres: Pourquoi exclure le Parti vert du Québec?
Paul-André Martineau, Président, Parti vert du Québec (PVQ), Montréal, le 31 janvier 2007
Édition du lundi 05 février 2007
Mardi dernier, Le Devoir a publié un sondage qui excluait le Parti vert du Québec (PVQ). En conséquence, au bénéfice des personnes qui ne lisent que Le Devoir, il est important de mentionner trois faits indiscutables.
Primo, il y a un autre parti politique qui existe au Québec qui s’appelle le Parti vert du Québec. Secundo, ce parti s’est vu attribuer par une autre maison de sondage (des résultats publiés la même journée que le sondage divulgué par Le Devoir) 9 % des intentions de vote des Québécoises et des Québécois (un pourcentage qui se maintient autour de 8 à 9 % depuis quelques mois). Tertio, en corollaire, le PVQ constitue la quatrième formation politique en importance du Québec.
Plusieurs personnes s’expliquent mal pourquoi on exclut volontairement le Parti vert du Québec des sondages publiés par Le Devoir. Les temps ont bien changé depuis 2003. Exclure le Parti vert du Québec des sondages alors que l’environnement devient un enjeu majeur pour bon nombre d’électeurs, c’est représenter de manière fort inadéquate la réalité politique québécoise d’aujourd’hui.
Petite observation en passant: avez-vous remarqué que depuis l’automne, le taux d’appuis à l’Action démocratique du Québec a tendance à être plus élevé chez Léger que chez CROP ou SOM, qui tous deux incluent le Parti vert dans les choix de réponse? Lors des 8 sondages parus depuis août 2006, les 2 seules fois où les intentions de vote de l’ADQ ont dépassé les 14% l’ont été dans les sondages Léger Marketing. Par contre, lors des 2 sondages Léger Marketing de mai et juin 2006, c’est plutôt le Parti libéral du Québec qui semblait bénéficier de l’absence des verts.
Ne nous demandez pas d’explication logique et rationnelle à ce phénomène, nous en avons aucune!
Ça nous dépasse d’autant plus que normalement, la base électorale des partis écologistes a tendance à être à gauche plutôt qu’à droite (donc, en contexte québécois, les appuis à Québec solidaire devraient bondir lorsque le Parti vert n’est pas dans les choix de réponse). En effet, la firme de sondage Decima avait réalisé l’été dernier une petite expérience afin d’évaluer l’impact de la présence ou non du Parti vert du Canada dans les sondages visant à égaluer les intentions de vote sur la scène fédérale (voir le communiqué en format pdf ici). Pendant 4 semaines en juin et juillet 2006, Decima, dans le cadre de ses sondages hebdomadaires, subdivisé ses échantillons en deux sous-échantillons: un où le Parti vert du Canada était mentionné dans les choix de réponse et un où il ne l’était pas. Conclusions:
- When the Green Party is specifically read as a choice to respondents, 7% of all respondents pick that party, or 8% of those who are “decided or leaning”.
- Expressed support levels for the other parties remain essentially the same when the Green Party is mentioned, with the exception of the NDP. When the Green Party is read as a choice, NDP support drops by 3% among the overall sample, 4% among those decided or leaning.
Bref, pour conclure, tout ça deviendrait plus clair si Léger devait finir par inclure le Parti vert dans ses choix de réponse une bonne fois pour toutes.
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