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Liens du 2008-04-08

Les électeurs orphelins

Comme nous l‘avions déjà indiqué hier en conclusion de notre billet sur l‘abstention lors d‘élections partielles où un chef de parti politique est dans la course (ça fait long pour dire « donner une free ride », mais bon), les électeurs du comté de Charlevoix qui ont voté pour le Parti libéral du Québec lors de la dernière élection générale pourront adopter quatre attitudes le 24 septembre prochain:

  • S’abstenir de voter
  • Voter pour le Parti québécois
  • Voter pour un tiers parti
  • Voter pour l‘Action démocratique du Québec (c‘est là l‘inédit de la situation: avoir la possibilité de voter pour deux partis représentés à l‘Assemblée nationale plutôt qu‘un seul)

Ça a l‘air banal dit comme ça, mais pour ceux qui sont dans cette situation, le choix n‘est pas nécessairement facile à faire, tant par attachement partisan qu‘en raison des conséquences que leur vote pourrait avoir sur l‘échiquier politique québécois (surtout si la lutte devient serrée). Et selon Le Soleil, les organisateurs du Parti libéral se questionnent encore sur la « consigne » à donner (s‘il y en a une) aux électeurs qui ont voté libéral le 26 mars dernier.

Petit commentaire sur la majorité de 1 663 de Rosaire Bertrand le 26 mars dernier: oui, ça semble court à première vue, mais une telle majorité n‘a pas le même poids selon qu‘elle se retrouve dans un comté de 33 000 électeurs comme Charlevoix ou dans un comté de 59 000 électeurs comme Chambly (et encore, nous ne parlons pas des Îles-de-la-Madeleine). Toutes proportions gardées, une remontée de 1 663 voix dans Charlevoix équivaut à une augmentation de près de 7% des voix par rapport à la dernière élection générale. Présenté comme ça, c‘est moins serré qu‘il n‘y paraît au premier abord. Il est vrai toutefois qu‘avec 6 541 électeurs libéraux « orphelins » (27% des suffrages en 2007), ça change passablement la donne. Poursuivez la lecture de «Les électeurs orphelins»→

Faire sortir le vote

Les sondeurs ne sont pas les seuls à avoir été surpris par la tournure qu‘a pris l‘élection générale d‘il y a deux semaines, les organisateurs politiques aussi, et selon plusieurs d‘entre eux, une révision des méthodes traditionnelles pour faire sortir le vote s‘impose (nous en parlions également le lendemain du scrutin):

Le lundi 09 avril 2007

LES MACHINES ÉLECTORALES

L‘échec des moyens traditionnels

Michel Corbeil
Le Soleil

Oubliez le « pointage » et les grosses équipes pour « sortir le vote ». Élections gagnantes ne riment pas nécessairement avec gros moyens.

Pour l‘élection du 26 mars, libéraux et péquistes se sont amenés avec de rutilantes machines électorales dans la grande région de Québec. Ils se sont cassé les dents sur une Action démocratique du Québec qui roulait sur de petits moyens.

Dans la même région, la mairesse Andrée Boucher a fait la démonstration qu‘un politicien peut gagner sans équipe et sans argent. Sa campagne victorieuse a coûté 5000 $. En 2006, des conservateurs de Stephen Harper ont remporté une demi-douzaine de circonscriptions fédérales sans que le Bloc québécois ne sache où ils étaient sur le terrain.

Les campagnes électorales ne seront plus les mêmes, croient des stratèges et des députés, du PLQ comme du PQ. Le verdict de l‘élection du 26 mars remet en question des façons de faire, a-t-on répété au Soleil, ici comme ailleurs dans la province.

En tout premier lieu, il y a le « pointage ». Cette opération consiste à repérer avant le vote les sympathisants à « la » cause, pour tout faire en vue de les amener à l‘urne. Les péquistes ont consciencieusement noirci les « cartes de bingo », ces tableaux provenant du Directeur général des élections, où ils inscrivent les noms de ceux qui penchent en leur faveur, ceux qui voteront contre eux, ceux qui sont « indécis » comme les « discrets ».

Dans le langage d‘un péquiste, « le PQ se cherche des amis » lorsqu‘il se prête à cet exercice. Dans Louis-Hébert, à 17 h 30, 77 % des « amis » présumés avaient voté. Le hic, là comme dans bien d‘autres circonscriptions, c‘est que le résultat électoral infirme le pointage.

Les militants d‘André Boisclair ont conduit sans le savoir des adéquistes à la boîte de scrutin. Un haut gradé libéral a confirmé que le pointage libéral a aussi fait sortir le vote de partisans du chef de l‘ADQ, Mario Dumont.

« Moi, des gens qui mentent lorsqu‘on fait le pointage, je n‘avais jamais vu ça », a indiqué un député péquiste battu dans l‘ouest de la province. « De plus en plus, le pointage ne vaut rien », a critiqué un organisateur à Québec.

Le député libéral Norm MacMillan a fait valoir que le concept de machine électorale est « dépassé. C‘était ma sixième campagne électorale et sûrement ma meilleure, a commenté le représentant de Papineau. Je pense que c‘est fini le pointage. On va devoir faire autre chose. J‘ai gagné par 4000 voix. Mais quand tu en perds 5000 par rapport à la dernière élection! »

Norm MacMillan s‘est montré décontenancé par le score de l‘adversaire de l‘ADQ qui a fini troisième, tout près du PQ dans Papineau. « L‘adéquiste ? Zéro débat. Pas d‘entrevues avec des journalistes. Pas de pancartes. Moi, j‘ai rempli mes promesses dans le comté et mes! salles. »

Le président du PQ de Chaudière-Appalaches, Claude Lachance, a rapporté que son organisation avait appris du précédent scrutin. Dans Bellechasse, cette fois-ci, peu de pointage. « En 2003, on en avait fait énormément » dans Bellechasse pour finir troisième. En 2007, le PQ a fini au même rang, mais l‘ADQ a détrôné le PLQ.

« On ne les voit pas, on ne les sent pas, mais ils sont là , le jour du vote, a-t-il dit des adéquistes. C‘est un curieux de phénomène. Les gens ne se vantent pas de voter ADQ, mais ils sont là . »

M. Lachance croit que les campagnes électorales sont devenues des campagnes présidentielles. Les chefs dominent tout le débat. Dans Bellechasse, a-t-il avancé, le candidat adéquiste Jean Domingue l‘a emporté, même s‘il n‘est pas du comté et inconnu de la population. « C‘est une grande leçon d‘humilité pour ceux qui pensent que le candidat fait une différence. »

À l‘Action démocratique du Québec, Sylvie Roy, réélue dans Lotbinière, s‘est rappelé avec amusement de sa campagne victorieuse en 2003. « C‘était la technique de la termite. On gruge du vote un peu partout. Et puis, boom ! Ça s‘effondre. Ils (péquistes et libéraux) ne m‘ont jamais vu venir.

Éclipse

« Les sondages, les pointages, les machines, il ne faut pas juste penser à ça. Sinon on n‘aurait pas d‘élections. » D‘autant plus que la technique du pointage a amené des adéquistes à se faire discrets lorsque interrogés. « Beaucoup se sont fait engueuler lorsqu‘ils disaient qu‘ils voteraient pour moi », a-t-elle avancé.

Les machines électorales subissent probablement une éclipse temporaire, a convenu Mme Roy. « Quand c‘est serré, cela peut faire la différence. »

Pour un conseiller de Jean Charest, « c‘est ce qui nous a fait gagner dans Louis-Hébert (Sam Hamad). Mais la meilleure machine électorale péquiste dans Jacques-Cartier (forteresse libérale anglophone de Montréal) perdra toujours. Il y a des mouvements contre lesquels aucune machine ne peut résister », a-t-il conclu en plaçant le 26 mars dans cette catégorie.

Norm MacMillan constate aussi qu‘une marée adéquiste a monté dans plusieurs circonscriptions. « Morale de cette histoire (le résultat électoral), a-t-il ajouté, c‘est que les gens nous ont dit de changer nos manières de gouverner et de faire de la politique. »

À lire également dans la série d‘articles de Michel Corbeil du Soleil sur les « machines électorales »:

Mythes et flottement: analyse sur le scrutin d‘hier

Après avoir dormi sur les résultats d‘hier, et avec un peu de recul, voici notre analyse sur l‘élection générale de 2007 et ce qui nous attend au cours des prochains mois.

d‘entrée de jeu, ce qui nous a frappé de l‘élection d‘hier et du déroulement de la campagne électorale est le nombre d‘idées reçues sur la vie politique québécoise qui – en 2007 – ont été contredites par les faits:

  • «Les Québécois élisent un parti au pouvoir pour deux mandats»: techniquement, c‘est vrai, mais jamais depuis l‘Union nationale en 1970 a-t-on vu le parti ministériel perdre 13% des voix et 28 sièges (22% des sièges) après un premier mandat. Habituellement, la réélection d‘un gouvernement pour un deuxième mandat (majoritaire qui plus est) est une formalité, mais ça n‘a pas été le cas en 2007.
  • «Les Québécois n‘élisent pas de gouvernements minoritaires»: les sondages laissaient entrevoir un gouvernement minoritaire tout au long de la campagne électorale, donc on a eu assez de temps pour se faire à l‘idée que cette idée reçu n‘était peut-être pas aussi vraie qu‘on pouvait le penser. Toutefois, rien ne laissait présager une Assemblée nationale aussi divisée qu‘elle le sera durant la prochaine législature. Le parti majoritaire n‘a que 48 sièges en chambre (38,4% des sièges), le « tiers parti » n‘est que 12 sièges derrière, et l‘opposition officielle est entre les deux.
  • «Plus l‘issue d‘un scrutin s‘annonce serrée, plus la participation électorale s‘accroît»: deux chiffres suffisent pour remettre cette idée reçue en cause: 70,5% en 2003; 71,3% en 2007.
  • «Les organisations électorales jouent un rôle important dans la sortie du vote»: tous les commentateurs politiques s‘accordaient pour affirmer que l‘ADQ faisait figure de parent pauvre face au PQ et aux libéraux sur les plans des finances et de l‘organisation. Et pourtant… Après l‘élection d‘Andrée Boucher à la mairie de Québec avec un budget de 3000$ en 2005 et l‘élection de 10 députés conservateurs au fédéral en 2006 avec une organisation « légère », il faudrait peut-être relativiser un peu plus l‘importance de la « machine » dans la sortie du vote.
  • «Le mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour déforme la volonté exprimée par les électeurs»: c‘est peut-être un accident de parcours, mais la répartition des sièges reflète assez bien le pourcentage de voix obtenus par chaque parti: LIB 38,4% des sièges, ADQ 32,8% des sièges et PQ 28,8% des sièges. Il est vrai qu‘à 4% chacun, Québec solidaire et les Verts n‘ont pas élu de députés, mais avec de tels chiffres, rien ne garantit qu‘ils seraient parvenus à le faire sous un mode de scrutin mixte ou proportionnel.
  • «La circonscription de Saint-Jean vote toujours du côté du pouvoir»: cette fois-ci, ce n‘est pas vrai, le député libéral a été battu.
  • «Le vote libéral est sous-évalué dans les sondages»: Léger Marketing accordait 35% aux libéraux samedi dernier, CROP leur accordait 34%. Le vote libéral a été légèrement en-deçà de ce qu‘accordaient les sondeurs, mais ça reste dans la marge d‘erreur. Tout comme en 2003, il n‘y a pas eu de « prime de l‘urne ».

À surveiller au cours des prochaines semaines et des prochains mois, beaucoup d‘inconnues qui pourraient nous mener soit vers un tripartisme (multipartisme?) permanent, soit vers un retour au bipartisme PLQ-PQ ou soit vers un nouveau bipartisme.

  • Nouvelle dynamique parlementaire: Sur quel parti le gouvernement libéral minoritaire va-t-il s‘appuyer? Tel que nous l‘avons mentionné plus haut, aucun parti ne se démarque clairement des autres. À première vue, bien peu de choses semble rapprocher les trois partis, et ça semble particulièrement vrai pour le Parti libéral et le Parti québécois. Si l‘ADQ joue de façon relativement classique le rôle d‘un parti d‘opposition officielle, il faudra bien que les « vieux partis » trouvent un terrain d‘entente afin d‘éviter de retomber rapidement en élection.
  • Élection de réalignement?: On a souvent comparé depuis hier l‘élection de 2007 à d‘autres qui ont été le théâtre d‘un réalignement de notre système de partis, notamment les élections générales de 1936 (arrivée au pouvoir de l‘Union nationale), de 1970 (le PQ devient le 2e parti le plus populaire au Québec) et de 1976 (arrivée au pouvoir du PQ). Ce n‘est pas impossible, mais il est encore trop tôt pour le dire. En 1936 et 1970-76, un seul parti a été frappé par la montée d‘un tiers parti (le Parti conservateur dans les années 30 et le PQ dans les années 70) et l‘autre s‘est maintenu (le Parti libéral dans les deux cas). En 2007, ce sont les deux principaux partis qui ont écopé; le PQ et les libéraux ont tous les deux subi des reculs historiques hier.
  • Le Parti vert et Québec solidaire: Vrai, les deux partis ont obtenu moins de voix que ne leur attribuaient les sondages au cours de la campagne. Ils ont néanmoins progressé depuis 2003 et, financement (partiellement) public des partis politiques oblige, ils auront maintenant droit à des ressources financières en raison des voix supplémentaires qu‘ils ont obtenus et qui leur permettra de consolider leur progression. C‘est la stratégie qu‘a adoptée le Parti vert sur la scène fédérale depuis le début des années 2000, et ils sont passés de moins de 1% à travers le Canada en 2000 à 4% en 2004 et 2006, et ils sont maintenant dans les deux chiffres dans les sondages pancanadiens.
  • Volatilité de l‘opinion publique: Depuis 2002, l‘opinion publique québécoise est très volatile et chacun des principaux partis ont connus des très hauts et des très bas dans les sondages au cours de la période. Ça risque de se poursuivre au cours des prochains mois. À titre d‘exemple:
    • LIB: 21% en avril 2005 (Léger), 48% en août 2003 (Léger);
    • PQ: 25% en septembre 2002 (Léger), 50% en décembre 2005 (CROP);
    • ADQ: 11% en mars 2006 (Léger), 40% en août, septembre et octobre 2002 (Léger et CROP).
  • Réforme du mode de scrutin: ironiquement, la répartition des sièges entre les principaux partis est la plus proportionnelle qu‘on ait vu depuis longtemps. Malgré tout, la perspective qu‘un des trois partis puisse disparaitre à plus ou moins brève échéance pourrait être propice à une réforme du mode de scrutin.
  • Débat de sondeurs: Aucune firme de sondage et aucun site de prédiction n‘a prévu ce qui s‘est passé hier, et cela relancera vraisemblablement un énième débat sur la fiabilité des sondages électoraux. Notons tout de même qu‘à l‘exception du résultat de l‘ADQ (et du fait que l‘ADQ a terminé deuxième contrairement à ce que laissaient croire les sondages), tous les autres étaient à l‘intérieur de la marge d‘erreur, sauf Strategic Counsel qui était dans le champ.
  • Renouvellement de la députation: Beaucoup de députés sortants du PQ et du PLQ ont été battus hier et plusieurs nouveaux députés feront leur entrée à l‘Assemblée nationale prochainement (surtout à l‘ADQ, mais aussi du PQ et des libéraux). Reste à voir comment ce renouvellement de la députation se reflètera au niveau du débat politique. Il y a là potentiel à des dérapages et à des erreurs de débutants, mais aussi à un renouvellement et à un rafraîchissement du discours politique.
  • Évolution de l‘opinion publique sur l‘avenir du Québec: Avec une opposition officielle qui prétend incarner une troisième voie entre le fédéralisme et la souveraineté, comment évoluera l‘opinion publique sur la question de l‘avenir du Québec au cours des prochains mois?
  • Débats internes au PQ et au PLQ: Ce que nous nous apprêtons à écrire à ce sujet est loin d‘être original. Le PQ qui obtenu son pire score depuis 1970, les libéraux qui obtiennent leur pire score depuis 1867 et tous deux ont perdu des comtés réputés « imprenables » aux mains de l‘ADQ. Des débats passionnés et des remises en question à l‘interne risquent de surgir en ce qui a trait à leur idéologie et à leur leadership.

Hors du coroplast, point de salut?

En cette ère où l‘affichage électoral massif et envahissant a la cote (chez les organisateurs politiques à tout le moins), La tribune de Sherbrooke rapporte ce matin une stratégie d‘affichage pour le moins étonnante de la part du député de Drummond, M. Normand Jutras (PQ):

Le lundi 26 février 2007

Pas de pancartes pour Normand Jutras

Jean-Pierre Boisvert
La Tribune
DRUMMONDVILLE

Stratégie étonnante sinon risquée, le député sortant du Parti québécois Normand Jutras a décidé de ne pas faire d‘affichage sur les poteaux au cours de la présente campagne électorale.

«Tous les membres de mon organisation sont unanimes dans cette prise de décision», a-t-il dit lundi au cours d‘une conférence de presse tenue à son nouveau local électoral situé sur la rue Heriot, tout juste en face des bureaux de la députée bloquiste Pauline Picard.

«Pour nous, c‘est une question de protection de l‘environnement, l‘environnement visuel, mais aussi de développement durable, car on sait que le polypropylène ondulé (ou coroplast) n‘est pas recyclable… À cet égard, je me dois, comme politicien, de donner l‘exemple», a expliqué M. Jutras, se disant le seul, à sa connaissance, à opter pour cette stratégie au sein de son parti.

Selon lui, les électeurs de Drummond sont prêts pour cette nouvelle façon de faire et l‘affichage sur les poteaux sera de plus en plus délaissé.

(…)

C‘est pas comme si ça venait d‘un tiers parti (qui n‘aurait pas les moyens d‘acheter des pancartes de toute façon) ou d‘un candidat qui se présente contre un libéral dams D‘Arcy-McGee: on parle d‘un député en poste depuis 13 ans, ancien ministre de la Justice et candidat pour le parti formant l‘opposition officielle.

Nous sommes bien curieux de voir comment les électeurs vont réagir dans Drummond.

26 mars 2007? – 2e partie

Après Paul Larocque et Jean Lapierre sur TVA hier, c‘est au tour de Denis Lessard aujourd‘hui dans La Presse de rapporter les dernières rumeurs – que Jean Charest refuse de commenter depuis Paris – sur la possible date de la prochaine élection générale:

Le samedi 03 février 2007

Charest déclencherait les élections à la fin du mois

Denis Lessard
La Presse
Québec

Même s‘il a dit publiquement qu‘il ne déclencherait pas les élections avant la présentation du budget fédéral, le premier ministre Jean Charest veut désormais presser le pas.

Les officiers libéraux présenteront en début de semaine à leur commandant le plan de campagne qui lui permettra de déclencher, dès la fin du mois de février, la campagne électorale en vue d‘un scrutin à la toute fin de mars.

M. Charest rentre demain soir d‘une mission officielle en Europe. Officiellement, dans sa garde rapprochée, on affirmait hier que «tous les scénarios sont sur la table» et qu‘aucune décision n‘était prise.

Mais la réalité est différente. «Le mot d‘ordre est d‘appuyer partout sur l‘accélérateur», a-t-on confié à La Presse. Autour de Jean Charest, on croit maintenant que le budget fédéral sera satisfaisant et donnera des munitions au premier ministre en campagne électorale.

À Québec, on «évalue» maintenant la possibilité de ramener les députés au Parlement dès février, bien avant le 13 mars, la date normale de la rentrée prévue au règlement de l‘Assemblée nationale. Une courte session dans un seul but : la présentation d‘un budget rempli de mesures populaires. Le PQ avait fait la même chose au printemps 2003.

Jean Charest a décidé de passer en vitesse supérieure quand il est devenu clair que le budget fédéral, normalement présenté dans la deuxième moitié de février, ne serait pas prêt avant la fin de mars. Déclencher des élections début avril, après avoir déposé son propre budget, posait des problèmes: Pâques, la fête des Patriotes et même la fête des Mères étaient autant d‘obstacles à des élections ou à un vote par anticipation en mai. Aussi, après le 31 mars, M. Charest risquait de voir le rapport de la commission Grenier sur Option Canada torpiller sa campagne. M. Charest doit témoigner sous peu devant le juge Bernard Grenier, qui entend toujours à huis clos d‘anciens permanents du PLQ.

Surtout, les libéraux ont eu la frousse ces derniers jours. Ils ont suivi avec angoisse les hauts et les bas d‘André Boisclair. Ils craignaient par-dessus tout le départ précipité du chef péquiste. Les organisateurs du Parti québécois auraient alors «planté» un congrès à la direction quelque part en mai, fermant d‘un coup la «fenêtre du printemps» sur les doigts des organisateurs libéraux.

En accélérant les choses, le gouvernement Charest tentera de faire passer le message qu‘il «prend le leadership» et, en présentant son budget avant celui d‘Ottawa, exercera une pression sur le gouvernement fédéral. Présenté durant la campagne électorale au Québec, le budget de l‘allié Stephen Harper devrait donner du tonus au camp libéral.

Le congrès du PLQ, prévu pour les 24 et 25 mars, sera probablement remis à plus tard pour que les libéraux n‘aient pas à le comptabiliser dans leurs dépenses électorales.

«Le premier ministre déclenchera la campagne quand il estimera que les Québécois sont prêts», s‘est contenté de dire hier Hugo d‘Amour, son attaché de presse, joint à Paris.

Mais même s‘il forcera M. Charest à s‘expliquer sur ses déclarations passées, le déclenchement rapide des élections comporte plusieurs avantages pour les libéraux.

Les sondages internes du PLQ et du PQ, a appris La Presse, montrent clairement une remontée de l‘Action démocratique, actuellement en avance dans une douzaine de circonscriptions de la grande région de Québec. Cette tendance n‘est pas une mauvaise nouvelle pour Jean Charest, même s‘il doit renoncer à quelques circonscriptions à Québec: l‘ADQ gruge l‘électorat péquiste dans le 450, ce qui rend tout à coup accessibles aux libéraux quelques sièges autour de Montréal.

Mario Dumont ne cache pas, en privé, qu‘il vise davantage André Boisclair que Jean Charest dans son plan de match.

Quelques gourous libéraux restent bien réticents face au déclenchement rapide des élections. Rien ne garantit que la vogue de l‘ADQ se maintiendra – son essoufflement en 2003 avait scellé la défaite du gouvernement Landry.

Certains craignent aussi que la population voie d‘un mauvais oeil un premier ministre qui, contrairement à ce qu‘il avait dit, appuie tout à coup sur l‘accélérateur parce que des problèmes évidents sont apparus au PQ.

Enfin, un vote à la fin de mars se fera sans le retour des snowbirds, 150 000 électeurs en bonne partie acquis aux libéraux.

Le Soleil en parle également ici.

Scénarios électoraux printaniers

Denis Lessard a publié aujourd‘hui dans La Presse un topo sur d‘éventuelles élections générales printanières en 2007. Deux scénarios seraient sur la table au Cabinet du premier ministre:

  1. un déclenchement de la campagne électorale à la mi-février, ce qui mènerait vers un scrutin le 19 ou le 26 mars 2007;
  2. un déclenchement de la campagne électorale dans la première moitié du mois de mars, le scrutin ayant lieu le 2 ou le 16 avril.

Le samedi 16 décembre 2006

Des élections au Québec en février?

Denis Lessard
La Presse
Québec

Des élections générales risquent d‘avoir lieu plus tôt que prévu, au Québec. Les troupes de Jean Charest pressent le pas et se préparent désormais à devancer d‘éventuelles élections fédérales forcées par le renversement du gouvernement Harper.

Selon les informations obtenues, le premier ministre tient à avoir la possibilité de déclencher des élections dès la mi-février, ce qui signifierait un scrutin à la mi-mars. Rien n‘est encore irréversible, rien n‘assure qu‘il saisira cette occasion et déclenchera la campagne électorale, mais il veut être certain qu‘il pourra le faire dès février, s‘il le juge opportun.

C‘est pourquoi, par exemple, les libéraux ont prévu non pas une mais deux réunions de caucus coup sur coup en janvier – une fréquence exceptionnelle pour une période ou l‘Assemblée nationale ne siège pas. Dans les officines du PLQ, on rappelle que des réunions identiques, destinées à passer en revue les thèmes d‘une éventuelle campagne, avaient été convoquées dès le début de 2003, quand il était clair que le premier ministre Bernard Landry s‘apprêtait à déclencher des élections.

À compter du début de 2007, tous les scénarios sont possibles. « À partir du retour des Fêtes, c‘est une année électorale », se contente-t-on de répéter. Mais durant tout le mois de décembre, des conseillers du premier ministre ont fait le tour des élus libéraux et ont clairement indiqué que leur patron était bien tenté par des élections hâtives. Avec seulement 33 jours, cinq lundis consécutifs, les campagnes électorales sont bien plus faciles à prévoir qu‘il y a quelques années, quand elles duraient 54 jours.

Toute la semaine à l‘Assemblée nationale, les chefs de parti semblaient s‘entendre pour un baroud d‘honneur au Parlement avant l‘affrontement. LCN a annoncé cette semaine qu‘il y avait des scénarios d‘élections le 2 ou le 16 avril. En fait elles pourraient bien avoir lieu plus tôt.

Le signe le plus transparent d‘élections imminentes sera l‘annonce d‘un remaniement ministériel, destiné à redistribuer les armes avant le combat. Le ministre des Finances Michel Audet paraît en situation précaire : il a perdu bien des batailles auprès de ses collègues cet automne. Il a échoué à faire reporter des annonces coûteuses, qui font qu‘il sera bien difficile de présenter un budget crédible au printemps 2007.

En coulisses, on indique qu‘à la fin de l‘automne dernier, M. Charest a songé très sérieusement à déclencher des élections, mais il s‘y est pris un peu tard et a été refroidi quand l‘organisation lui a demandé cinq semaines de préparation, un délai qui l‘aurait amené trop tard en saison.

Satisfaction plutôt qu‘intentions de vote

Chez les libéraux, on a mis de côté les sondages sur les intentions de vote, qui montrent encore une très nette avance du PQ dans l‘électorat francophone.

On garde plutôt les yeux rivés au baromètre de la satisfaction à l‘endroit du gouvernement. Compte tenu que près de 45 % de gens se disent plutôt satisfaits des décisions à Québec, on parie que ces électeurs, une fois dans l‘isoloir, n‘iront pas appuyer le Parti québécois ou l‘Action démocratique du Québec. Avec ce niveau de satisfaction, le PLQ n‘est pas loin de son seuil d‘appui traditionnel. Dans une course à trois où l‘ADQ garde autour de 15 % d‘appuis, les libéraux peuvent espérer être réélus en misant sur le taux de satisfaction plutôt que sur les intentions de vote.

Chez les stratèges libéraux, on confie avoir senti « un mouvement favorable » dès l‘automne dernier dans la perception des électeurs, quand le premier ministre Charest multipliait les annonces. L‘entrée d‘André Boisclair à l‘Assemblée nationale n‘a pas freiné cette tendance. À chaque occasion, M. Charest a tapé sur le clou du manque de « maturité », le point faible du leader souverainiste selon les groupes de discussion des sondeurs du PLQ. Au cours du dernier mois, les libéraux ont sondé l‘opinion publique chaque semaine, une opération sans douleur pour un parti dont les coffres débordent.

De surcroît, dans les circonscriptions, les organisateurs se disent désormais prêts à des élections, ce qui est très nouveau dans les rangs libéraux, passablement moroses depuis trois ans.

Besoin de Harper

Dans un monde idéal, le gouvernement libéral visait le dépôt d‘un budget électoral en mars, et se servait de son congrès biennal, à la fin de mars, comme tremplin pour le lancement de sa campagne. Mais devant l‘incertitude quant à l‘espérance de vie du gouvernement Harper à Ottawa, on a décidé d‘examiner des scénarios de déclenchement plus hâtif.

Une défaite des conservateurs à Ottawa serait une catastrophe pour M. Charest, qui aurait dès lors bien de la difficulté à « vendre le rêve » d‘un règlement imminent au problème du déséquilibre fiscal. Les conseillers de M. Charest ont subitement pris conscience de la volatilité de la stratégie avec le partenaire Harper. Dès l‘arrivée de Stéphane Dion à la tête du PLC, le plan de match où Ottawa s‘engageait à limiter le pouvoir fédéral de dépenser s‘est volatilisé – avec un programme constitutionnel, Stephen Harper serait entré de plain-pied sur le terrain de prédilection de Stéphane Dion.

À Québec, on réfléchit aussi sur l‘opportunité de convoquer l‘Assemblée nationale en février plutôt qu‘à la mi-mars. On pourrait alors déposer un « cadre financier », basé sur la synthèse des opérations financières au 31 décembre. Avec les dépenses de l‘automne, un vrai budget serait difficile à équilibrer.

Les avis sont très partagés sur les risques de déclenchement d‘élections à Ottawa dès le printemps. Personne ne croit chez les libéraux que la question de l‘Afghanistan puisse servir de détonateur, comme le suggère le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe.

Certains conservateurs québécois, qui ont l‘oreille de Jean Charest, prédisent même que le gouvernement Harper pourrait survivre au vote sur le prochain budget. Il serait difficile pour le Bloc de battre un budget qui donnera plus d‘argent au Québec (on parle de 1 milliard de plus en transferts, comme début de règlement du déséquilibre fiscal). Et surtout, le PLC est sans le sou, et n‘aurait pas intérêt à se lancer trop vite sur le sentier de la guerre.

Une femme présidera la prochaine campagne libérale

La députée de Bourassa-Sauvé et ministre de la Culture et des Communications, Line Beauchamp (LIB), a été nommée présidente de la prochaine campagne électorale du Parti libéral du Québec. Le communiqué de presse du PLQ précise:

Line Beauchamp (…) présidera les travaux du comité électoral. Ce comité est formé de membres des ailes militante et parlementaire ainsi que de permanents du Parti libéral du Québec. Elle agira également à titre de porte-parole du comité électoral du PLQ.